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Archives pour janvier 2010



Invictus – Clint Eastwood – 2010

Invictus - Clint Eastwood - 2010 dans Clint Eastwood invictus-de-clint-eastwoodGod Defend New Zealand.

   3.5   Moins d’un an après le très beau Gran Torino Clint Eastwood s’attaque au rugby et tout particulièrement à l’influence majeure de Mandela sur la coupe du monde et l’union fédératrice qu’elle s’apprête à créer. Comme pour L’échange le cinéaste embraye une nouvelle fois vers un ton plus impersonnel qui à mon sens ne lui va pas beaucoup. Pourtant il y a de l’engagement. On y évoque bien entendu l’apartheid. Mais c’est tout, absolument rien d’autre. Tellement obnubilé par son unique sujet Clint n’a qu’un objectif formel : faire cohabiter le noir et le blanc dans tous ses plans. Quatre fédéraux gros et blancs avec quatre adjoints noirs de Mandela dans des scènes sinon inintéressantes sur-symboliques. Un petit garçon noir avec deux flics blancs. Des mains blanches qui soulèvent une coupe plus une main noire. Clint appuie le trait dès qu’il le peut c’est une horreur. Son récit tourne à une démonstration de la tolérance – il filme Mandela comme un nouveau Jésus, au moins comme le messie.

     On se rend très vite compte des enjeux du film. Installer un suspense sportif qui n’en est plus un (on sait déjà que l’Afrique du sud a gagné la finale de la coupe du monde 1995 contre les Blacks) et jouer avec chaque personnage qu’il a filmé depuis le départ. C’est un film de grimaces. Nous n’y voyons que des grimaces. Si la première partie du film est hyper insignifiante, la seconde est carrément insupportable. On suit la coupe du monde, presque matchs par matchs, avec en prime une finale qui dure un moment. Eastwood filme cette finale atrocement. En terme de rythme c’est plutôt correct mais en terme de parti pris de mise en scène c’est affreux. J’ai écarquillé les yeux plus d’une fois devant ces ralentis à n’en plus finir, son obsession à vouloir tout filmer, le mixage sonore lors des mêlées etc… En fait je crois que l’indigestion que cette longue séquence procure vient du fait que Clint veut tout montrer, vraiment tout. Chaque personnage à chaque instant, chacune de leurs grimaces. Mais il n’a pas le temps, il est pressé par le chronomètre, celui du match. Donc il opte pour des plans saccades sur ce chrono justement durant chaque seconde des vingt dernières qu’il reste à jouer, avec un boom retentissant en arrière fond. Quelque part on pense au combat dans Million Dollar baby. Lorsque Clint a le temps il s’en sort admirablement, mais lorsqu’il ne l’a plus (le dernier coup de poing et l’accident qui s’ensuit) sa réalisation devient grossière. Ici c’est la même. Certains plans sur le terrain sont bien trouvés, dans cette façon de suivre l’action. On se croirait en caméra embarquée dans un vrai match de rugby. Puis Clint est pris de vitesse.

     Mais voilà, durant les premiers matchs le réalisateur arrive à montrer ce climat fédérateur qui s’installe. Cette barrière de la couleur qui s’apprête à sauter, l’union pour une équipe, pour un pays, uniquement dans un domaine sportif. Quelque chose fonctionne assez bien. Ce pourrait être fait avec moins de gros sabots mais disons qu’il y a une tentative au moins. Cette ambiance, par moment, m’a évoqué certaines émotions que j’ai pu ressentir par le passé. Emotions sportives évidemment. Cette transe qui parfois nous accompagne et ne nous lâche plus. Donc le film ne m’a pas plu mais je ne peux pas le détester, ne serait-ce que pour les souvenirs qu’il a réussi à m’évoquer.

     Historiquement il est évident que Mandela a apporté un soutien, qu’il a crée une unité par son courage, son abnégation dans le travail qu’il s’était donné. Pourquoi l’accompagner de violons ? J’ai eu cette impression que l’image n’est jamais seule ici, la musique est toujours présente, parfois même ce sont des chansons affreuses. Alors qu’on ne demande qu’à être embarqué. L’exemple des joueurs qui viennent faire une démo sur un stade délabré dans un bidonville. Il pourrait y avoir quelque chose de fort dans l’approche, dans cette confrontation entre les vedettes et leurs fans. Mais Clint enclenche alors sa soupe récurrente pour nous servir un joli petit clip Nike où il ne manque que Ronaldinho. Pas terrible donc.

Le père des mes enfants – Mia Hansen-Løve – 2009

4003Le-père-de-mes-enfants-de-Mia-Hansen-LoveLa métamorphose de Saturne.     

   8.5   Ce père c’est Grégoire Canvel. Il a une femme, trois filles, est producteur de cinéma. Aux premiers abords il donne le sentiment de quelqu’un de certain, qui ne laisserait rien passé (très vite contredit par la perte de son permis de conduire, symbole de son échec à venir), quelqu’un qui arriverait à gérer ses affaires sans pour autant délaisser sa vie de famille. Grégoire est un producteur au sens noble du terme, il soutient la créativité. S’il décide de produire cet auteur suédois c’est avant tout parce qu’il aime ses précédents films, qu’il voit en lui l’émergence d’un cinéma d’auteur important qui marcherait. « Son heure est venue » dira t-il à son assistante, qui doute de la véracité de ses pensées. Il a aussi un côté baratineur, businessman, il a le physique, il est charmeur, tchatcheur, attributs essentiels pour réussir dans le métier. Mais il s’en sert à des fins si généreuses qu’il en devient ainsi charismatique. « C’était un personnage » dira le banquier à sa femme en fin de film.

     Et entre ces divers projets Grégoire arrive à vivre. Il passe du temps avec sa femme et ses filles. Le voyage en Italie comme la quête de la découverte, du calme, même si le téléphone n’est jamais loin. Une chapelle en ruines où il explique à ses enfants son histoire. C’est cette sensibilité qui est forte ici. La réalisatrice ne s’est pas contentée de filmer un type débordé mais aimant, elle s’est intéressée à toutes ces petites attentions, en lui donnant une image de père intéressant, à multiples facettes. Deux magnifiques scènes avec ses filles pour illustrer ça : la première avec les deux cadettes où il se délecte du spectacle qu’elles lui proposent ; La seconde avec la plus grande où il lui ferait remarquer que sa nouvelle coupe de cheveux lui va à ravir, que ses nouvelles boucles d’oreille savent la mettre en valeur. Vient ensuite le temps des échecs consécutifs. Tout Moonfilm (le nom de leur boîte de prod) commence à trembler devant les dettes accumulées, mais pas Grégoire qui semble garder sa sérénité habituelle, ponctuant ses moments de doutes par de petites siestes. En fait Grégoire va mal, très mal, mais tout est intérieur, on ne verra jamais rien transparaître. Louis-Do de Lencquesaing était déjà formidable, il devient par ce jeu de moitié de film un acteur hallucinant. Comme pour Humbert Balsan il y a quatre ans, dont la réalisatrice s’inspire de ses derniers moments de vie – et lui rend hommage – il y a un drame : Son suicide.    

     Si la boite de production était elle déjà en train de s’effondrer de son vivant, c’est maintenant une famille tout entière qui se sent délaissée, abandonnée, voire trahie. Certains sont colère, d’autres culpabilisent. Mia Hansen-Love a fait dans l’économie sentimentale, ce sont des bribes de pensées dites, d’accès de colère, de douleurs intimes qui sont recherchées, et non pas des pluies de larmes qui auraient anéanti le rythme soulevé du film. De cette incompréhension naîtra un besoin de préserver la mémoire. D’aller au bout des rêves de cet homme. D’excuser sa mort tout en finissant les projets qu’il aurait faits vivant. C’est le choix de sa femme. Si l’on ne termine pas Saturne (le nom du film suédois qui tenait tant à cœur à son mari) sa mort n’aura servi à rien, dira t-elle. Le film est baigné comme ça, avant comme après sa mort, d’un besoin d’avancer, d’une dynamique intense. Grégoire est mort mais tout semble bouger, interagir de la même manière autour de lui. Il y a donc un espace avec Grégoire, puis le même sans lui. Moonfilm va mourir mais Saturne verra le jour quoiqu’il arrive, avec ou sans la lune. Comme un système qui continuerait de tourner avant et après. Comme une famille qui continuerait de vivre avant et après la perte. La mise en scène s’accorde donc à merveille. Pas de cassure rythmique et c’est à mon sens très rare de voir ça au cinéma.

     Le père de mes enfants c’est aussi un film de révélations. Celle d’une critique devenue réalisatrice à suivre. Celle d’un acteur avant tout en la présence de Louis-Do de Lencquesaing. Et de quatre actrices, principalement la fille aînée de l’acteur, Alice, tout simplement incroyable. La réalisatrice leur a offert une partie de film chacun. Là-aussi ce double temps est présent : Deux êtres d’une même famille, deux générations, l’un vivant sans que l’on voie l’autre, l’autre vivant quand le premier meurt. Car il y a aussi la révélation d’un secret familial (le double sens de Moon, triple si l’on compte ce plan nocturne de vue sur une pleine lune qui semble être symbole d’apaisement) et l’on élargit encore les possibilités scénaristiques. Et puis des détails de la vie, que l’on se rappellera toujours, qui font mal, qui font un bien fou. Un manque de temps pour se rendre au cimetière avant un départ définitif. Une coupure de courant plongeant la ville dans le noir, faisant naître l’effervescence provisoire d’une envie de bouleversements. Oui le film de Mia Hansen-Love ne cesse d’aller de l’avant, il a cette faculté à ne jamais s’auto satisfaire, et ce jusqu’à son générique final.

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