9.5 Il n’y a je crois pas meilleure retranscription cinématographique de l’évangile que celui du cinéaste italien Pier Paolo Pasolini. Il m’est très difficile d’en parler tant il représente pour moi une sorte de quintessence, telle une œuvre intouchable, sans équivalence. Ce ne sont donc que des superlatifs qui me viennent à l’esprit. J’aime les directions que le film s’engage à prendre, il n’a donc pas le temps d’ennuyer car tout est histoire de mise en scène, de partis pris de montage fulgurants. Dans la première partie du film, que l’on pourrait appeler L’enfance de Jésus, nous sommes dans un cinéma presque entièrement muet. Comme si Pasolini confondait les genèses. Hormis les apparitions de l’ange Gabriel à Joseph dans un style quasi-Buñuelien, nous restons dans un style très documentaire, dénués d’effets inutiles et ponctués musicalement par du Bach, du Mozart voire quelques chants africains de temps à autres. Respect de l’évangile d’une part et profanation mythologique d’autre part. Et un sublime noir et blanc. Lors du voyage de Jésus pour rejoindre la terre sainte, durant lequel il proclame les volontés du seigneur et effectue des guérisons magiques, la mise en scène est encore différente, peut-être plus théâtrale, mais pas vraiment, plutôt un cinéma qui m’évoque Dreyer ou Bergman. Et toute la fin des flagellations à la crucifixion, on dirait que Pasolini filme sous le manteau. L’objectif se cache derrière les nuques du peuple qui se délecte des souffrances du christ. Lors du chemin de croix, on semble faire aussi parti de la foule. Et chaque plan sur le mont Golgotha est une tuerie sans nom. C’est magnifique. C’est passionnant. C’est à mes yeux l’un des plus beaux films du monde.
L’évangile selon saint Matthieu (Il vangelo secondo Matteo) – Pier Paolo Pasolini – 1965
Publié 20 mai 2010 dans * 730 et Pier Paolo Pasolini 3 Commentaires3 commentaires à “L’évangile selon saint Matthieu (Il vangelo secondo Matteo) – Pier Paolo Pasolini – 1965”
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tout à fait d’accord avec vous
Comme on est loin de ttes les bondieuseries de l’église !
je viens de lire des critiques et commentaires sur son film Salo
c’est effarant ! comment a t il pu écrire 2 films aussi différents !
Il y a toujours une quête de l’excès chez Pasolini. Je n’ai pas revu ses films depuis longtemps, je pense qu’en un sens, je m’en suis un peu éloigné au fil du temps. Pourtant à une époque L’évangile, Oedipe roi, Théorème, Les mille et une nuits (vu au cinéma il y a quinze ans) ce fut de très grandes découvertes. Et Salo, bien sûr. Evidemment c’est très dur, mais il y a une portée politique très forte qui reste la marque du cinéaste italien. Pour le dire autrement ça ne m’a jamais choqué qu’il écrive L’évangile, Salo, Médée et Accattone disons. Qu’il fasse l’un ou l’autre il est un peu seul au monde, au sens « seul à faire ce cinéma là ».