If You Need A Friend.
6.5 Si l’on a vu le précédent film du cinéaste (Le très bon Les Berkman se séparent) on sait donc que Greenberg ne sera pas seulement un film qui prouvera une fois de plus le génie comique de Ben Stiller. Greenberg permet de voir Ben Stiller en acteur formidable tout simplement. Deux hommes dans le film se nomment Greenberg, deux frères, l’un père de famille qui part en vacances au Vietnam, et l’autre, célibataire torturé, à qui le premier a confié sa maison durant une quinzaine de jours. Il y a une telle gravité sur le visage de Ben Stiller, je n’avais encore jamais vu ça chez lui. Il est incroyable de tristesse et de névrose enfouies.
C’est un film sur la solitude d’un homme mais c’est aussi celui d’une rencontre, entre deux êtres paumés. Car il y a cette femme, assistante de la bonne famille, tout aussi perdue, qui caresse le doux espoir de devenir chanteuse, en qui Roger Greenberg va découvrir pas seulement une accompagnatrice de dog-sitting mais aussi quelqu’un à qui parler, quelqu’un qu’il serait en mesure de séduire. Tous deux sont très maladroits, cherchent à combler un manque, ou un vide.
Greenberg ne ressemble à aucun autre film, il est habité d’un faux rythme, on ne sait jamais où il nous emmène, on ne sait pas ce que le personnage essaye de dire ou de faire la moitié du temps. D’une part je trouve cela passionnant ce personnage presque intouchable (parfois même antipathique) et puis dans le même temps j’ai tendance à me sentir loin. C’est un personnage dans un état dépressif, et comme face à toute dépression, il y a une part de fascination mais aussi une part d’incompréhension. Néanmoins je trouve avec le recul que le film m’a davantage passionné qu’égaré. Et quand il me perdait j’ai toujours chercher à me rattraper aux branches ici et là. Du coup j’ai l’impression d’avoir rater plein de choses, c’est une bonne chose.
Et puis faut dire que Los Angeles y est magnifiquement filmé. Le film séduit là où l’on ne l’attend jamais : la relation avec l’ami plus complexe qu’elle n’y paraît, celle avec Florence difficile à cerner, lors de cette soirée à confrontation de générations aussi (sublime séquence où l’on entend d’ailleurs Melody de Gainsbourg), ou bien dans ce départ instinctif. C’est la grande force du film à mon sens : son caractère inattendu. Je suis sorti du cinéma quelque peu désarçonné, mais il s’est passé un truc.