Une nuit en enfer
9.5 Comme souvent aujourd’hui ça commence en road-movie, une bande d’amis sillonne les routes avec leur minibus, discutent de signes du zodiaque, de cimetières profanés, de vieux abattoirs, de tout et de rien, et tentent de rejoindre la maison de famille abandonnée de deux d’entre eux, un garçon en chaise roulante et sa sœur, accompagnée. On est dans les grands espaces désertiques texans, à l’ambiance singulière que la chaleur vient alourdir. Ils prendront alors un type en stop. Mauvaise pioche ! Le type est un cinglé, fasciné par les couteaux, il n’hésite pas à se taillader la main devant eux, puis à leur demander s’ils peuvent le déposer chez lui. Voyant le groupe refuser sa demande, il décide de faire une entaille au bras du garçon handicapé puis de se tirer du minibus en y laissant un peu de son sang sur les portières. Plus tard, le groupe enfin à destination, s’éparpillera en forêt de façon à trouver de l’essence, un point d’eau ou simplement à passer du bon temps. Lorsque l’un d’eux, un peu trop curieux, fait irruption chez un autochtone, dans une maison d’apparence abandonnée, il tombe nez à nez avec un fou masqué, une masse dans une main, une tronçonneuse dans l’autre, qui le massacre sans pitié. C’est le début du carnage.
Là où Massacre à la tronçonneuse m’a surpris c’est dans ce parti pris de faire un survival avec seulement cinq victimes – le film dit se baser sur une histoire vraie, juste pour en jeter d’entrée. Je m’attendais à quelque chose de beaucoup plus large, avec un tueur en ville, façon Halloween. Il y a donc ces cinq citoyens américains auxquels on ajoute cette espèce d’auto-stoppeur fou qui se révèle être le frère de LeatherFace, l’homme à la tronçonneuse. Puis il y a aussi un autre homme, celui de la station essence (sans essence) au début du film, qui semble aussi être l’un des frères. On fera aussi la connaissance du grand-père, limite zombie. Si quatre personnages sont très vite massacrés – j’étais choqué par la brièveté des exécutions – une fille résiste et c’est avec elle que le film devient survival génial, entre course effrénée dans les bois et scènes de tortures délirantes. Déjà en tant qu’horreur pure on n’avait en effet pas fait mieux. Rappelons que l’on est en 1974. La dernière demi-heure du film est un truc de malade ! Mais surtout, Massacre à la tronçonneuse a un atout des plus dément : c’est son ambiance sonore, souvent abstraite, des sons stridents sortis de nulle part, des crissements, des cris, des grognements. On n’est pas loin d’un trip psychédélique à la fin dans la maison, avec ces couleurs vives, l’œil puis les lèvres de la jeune femme qui n’en finit plus de crier, les hôtes complètement barjes, qui n’en finissent plus de se marrer. C’est hyper malsain. Le film se termine sans épilogue, rien, dans l’action, une fille qui rit, le visage maculé de sang, un homme qui crie, comme un enfant qu’on prive de son jouet, tronçonneuse levée vers le ciel jaunâtre d’une aube salvatrice excepté pour lui.