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Archives pour 22 novembre, 2011

Do the right thing – Spike Lee – 1989

Do the right thing - Spike Lee - 1989 dans Spike Lee

In the heat of the night.   

   7.5   Ce jour-là, il fait terriblement chaud sur Brooklyn. A la manière de Vanishing Point, Do the right thing commence dans une salle de radio, le chroniqueur fait le show et envoie la musique. Une rue, quartier noir. Le film n’ira jamais ailleurs. Deux commerçants étrangers se font face : Une pizzeria tenue par des italo-américains, une épicerie tenue par des coréens. Semblent régner confiance et entraide, pourtant au milieu de cette chaleur torride s’accroît un désarroi et une violence raciale qui ne vont pas tarder à conduire au chaos.

     Spike Lee choisit dans un premier temps une légèreté de ton singulière, entre ambiance sitcom, esthétique clipesque et comédie musicale. Le film s’ouvre sur le morceau de Public Enemy, Fight the power, sur lequel danse une femme dans une atmosphère rouge néon, saccadée très eighties. Un clip. Puis il se poursuit de manière chorale, investissant la rue et ses habitations, sans vraiment élargir le champ. Le cinéaste s’intéresse à grand nombre de personnages singuliers comme cet homme ivre mort en permanence qui se fait appeler Le maire, cette vieille femme cloîtrée sur le rebord de sa fenêtre, ce gros garçon antipathique et ridicule qui promène sa chaîne hi-fi ou encore ce type attardé qui veut qu’on lui achète à tout prix une photo où figurent Malcom X aux côtés de Martin Luther King. C’est un film effervescent, plein de couleurs et de personnages hauts en couleur, de situations à la fois touchantes et grotesques, bref du Kusturica transposé à Brooklyn ! Et comme chez le cinéaste serbe, dans cette ambiance un peu folle (avec des trucs pas permis, comme ces plans monologués face caméra, ces inserts inutiles ou ces plongées/contre plongées assez immondes) naissent des idées de cinéma fulgurantes. La scène de la sortie d’eau en est le parfait exemple. Ou encore tous ces plans séquences inédits qui témoignent de cette fougue juvénile, qui permettent des variations et des élargissements de champ bluffants. Ou encore la séquence finale bien entendu, monument à elle toute seule, qui rappelle la rage du cinéma de Sidney Lumet, période Serpico/Dog day afternoon. Au-delà du simple parti pris esthétique qui à mon sens n’est pas non plus le point fort du film, le film dégage comme je le disais une vitalité exceptionnelle. Spike Lee, encore tout jeune, s’engage, il est sur tous les fronts, il est même l’un des acteurs principaux du film à savoir Mookie, ce jeune homme d’une vingtaine d’année, livreur de pizza chez Sal’s pizzeria. Il est aussi papa d’un petit garçon et il nous l’apprend bien plus tard. Le récit de Do the right thing s’orne de cette manière, sans pour autant changer de direction, mais il se renouvelle sans cesse.

     On peut considérer que le film se déroule le temps d’une journée, du matin au soir, Big love daddy sur radio FM 108 semble ouvrir et fermer le film comme s’il s’agissait d’un jour unique. Il fait très chaud, ce sont les premiers mots que l’on entend. Cette chaleur ne présage pas un film hot comme le générique pouvait offrir comme ambiguïté, mais un film qui va monter en tension jusqu’à l’implosion. Carnage final ahurissant. D’autant plus déstabilisant que ce personnage, campé par Spike Lee lui-même donc, jusqu’ici incarnation pacifiste face à cette rébellion embryonnaire, due essentiellement au fait qu’il travaille, tente de subvenir aux besoins de sa famille comme il peut, devient le fer de lance de ce carnage qui laissera un mort et un restaurant en flamme.

     Les deux dernières citations qui viennent clôturer le film agissent non pas comme discours moralisant mais comme réflexion sur les rapports entre les hommes. Au pacifisme évident de Martin Luther King répond l’engagement plus agressif de Malcom X. Deux noms que l’on aura entendus durant tout le film. Deux noms comme deux manières assez différentes d’aborder le racisme. Le fait que Spike Lee fasse glisser son personnage d’un exemple vers l’autre tend à réfléchir et douter de sa condition, coincé entre une certaine recherche du juste et de la cohabitation, tout en réagissant à sa propre souffrance. Il y a une fatalité à voir cette hypocrisie se transformer en règlement de compte général. Pourtant le film ne se termine pas vraiment là-dessus, il offre une dernière discussion entre Mookie et Sal, devant le restaurant en cendres. Le second contemple, abattu, les dégâts. Le premier vient chercher son salaire de la semaine. C’en est presque absurde. Et Spike Lee va jouer de cet absurde quand Sal donnera l’argent à son (ancien)employé. Ce ne sont plus vraiment deux personnages dans la raison qui s’affrontent mais deux gars dépassés, complètement dans le tord. L’un pour avoir eu des propos racistes affligeants, l’autre pour avoir déclenché l’émeute. Pourtant, à l’un qui a besoin de cet argent pour nourrir sa famille répond l’autre qui observe une construction de ses mains partie en fumée. Deux incompréhensions face à face. Le film ne se termine pas sur une réconciliation mais sur un espoir, certes suspendu, mais un espoir quand même, celui de la compréhension de l’autre.

     Si le film choisit une certaine légèreté comique, accentuée par des effets de mise en scène hyper cheap, il n’en demeure pas moins qu’en filigrane, le racisme quotidien est présent dans chaque plan, presque chaque parole et la cohabitation ethnique – que le cinéaste tente de construire en démolissant les stéréotypes et en s’intéressant un minimum à chacun – tient comme un funambule. Ce sont des photos d’acteurs italo-américains célèbres encadrées à l’intérieur du restaurant qui vont mettre le feu aux poudres, l’un des clients ne comprenant pas qu’il n’y ait aucune personne de couleur alors que la clientèle est entièrement noire. A moins que ce ne soit la faute au fils de Sal, raciste parce que « ses amis » de chez lui se moquent du lieu où il travaille. Ou encore ce garçon irrespectueux qui se promène avec le son de son poste radio à fond. C’est un effet boule de neige. Spike Lee révèle la part de racisme qu’il y a en chacun. Et montre que mêmes les plus tolérants (en l’occurrence Sal et Mookie) peuvent être les plus dangereux lorsque ça éclate. Do the right thing est un bien curieux objet, dans lequel sommeille puis éclate une rage assez dingue.

The Artist – Michel Hazanavicius – 2011

The Artist - Michel Hazanavicius - 2011 dans Cesar du meilleur film 791804_the-artist-300x199     5.5   La réussite est totale ! J’ai pourtant cru un temps que ça finirait mal cette histoire. Lorsque Georges Valentin (Jean Dujardin) est sauvée de justesse du suicide par la belle Peggy (Bérénice Béjo) qui lui avoue avoir une idée lumineuse en réponse à ce mal-être qui le ronge selon lequel les spectateurs, désormais accoutumés aux voix, ne veulent pas l’entendre. L’idée c’est la comédie musicale. Et le film se terminera là-dessus, sur ce happy-end alors qu’il aurait pu opter pour un penchant régressif, nostalgie du muet autant qu’il aurait pu être un simple pastiche fun mais l’heure est plutôt à la cohabitation artistique des genres et des évolutions. Le muet est has-been, la faute au parlant. Le muet musical fait alors son apparition. L’idée ingénieuse est double puisque le parlant intervient par deux fois seulement dans le film. Lors d’un rêve dans un premier temps, cauchemar de la star qui matérialise ses obsessions et ses craintes, dans lequel il s’invente muet au milieu d’un monde sonore. Puis plus tard, dans la scène de fin, où précédé par le son des claquettes de nos deux danseurs, les mots de l’équipe technique en tournage retentissent, avec cette caméra qui s’éloigne de la scène (muette) et du plateau afin d’enrober ce vaste espace d’échange (parlant) qui se conclue par un traditionnel « Silence ! Moteur ! Action ! ». Le film ne sonne pas tant comme un rappel nostalgique d’un âge d’or révolu que comme la conscience d’une page qui se tourne, d’un monde qui change, évolue et c’est tant mieux, mais que se replonger dans le patrimoine a quelque chose de savoureux. The Artist pourrait donc être le film qui réconcilie les époques, le film d’Aujourd’hui qui donne envie de se replonger dans ceux d’Hier. C’est sa seule véritable ambition. Le reste, comme je le disais, est amplement réussi, aucun doute là-dessus mais il ne faut pas oublier que le film se contente d’être un pastiche, le voir comme tel, ne pas espérer davantage. Sans pour autant le submerger, les références inondent l’écran. Georges Valentin, star déchue, fait inévitablement écho à Sunset boulevard. L’évolution cinématographique dans une période charnière qui voit le parlant reléguer le muet c’était le cœur de Chantons sous la pluie. Quant au personnage de Dujardin, avec ces tentatives de burlesque Chaplinesque, on ne peut s’empêcher de penser aux Feux de la rampe, surtout que l’idée du vieillissement est aussi évoquée ici « les jeunes prennent la place des vieux » dira Peggy à la presse sans savoir que la star du muet l’écoute. Il ne faut pas oublier de signaler le bel emprunt au score de Vertigo et dire que la musique dans The Artist est de manière générale assez géniale. Pour le reste, car « ce film performance » mise aussi beaucoup sur son interprétation : Dujardin est impeccable, qui en aurait douté ? Bérénice Béjo est sublime, sex appeal de l’année haut la main. Quant à Uggy, aucune récompense du meilleur chien ne peut lui échapper, il est fabuleux.


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