Louise Wimmer – Cyril Mennegun – 2012

50.2Le dernier combat.

   6.5   Louise Wimmer est le portrait d’une combattante, post cinéma des Dardenne. Louise Wimmer comme Rosetta ou Lorna. Le film mise beaucoup sur l’interprétation. A ce titre Corinne Masiero est stupéfiante. Elle est le corps du film. Et la mise en scène accentue cette présence corporelle si bien qu’elle masque le récit. Le passé de Louise n’est que zones d’ombres et si petit à petit il se découvre, rien n’est évident non plus. Cette séparation d’avec son mari, cette fierté (ou cette honte ?) qui la pousse au secret même face à sa fille, ces nombreuses dettes dont elle est affublée, tout n’est qu’illustration d’une carapace solide, dont on imagine à aucun moment qu’elle s’apprête à rompre alors que pour un autre c’eut été le cas. La réussite majeure du film est qu’il évite les plus gros écueils : Il ne croule jamais sur une quelconque surcharge théorique et symbolique. L’emploi musical du Sinnerman de Nina Simone en est la plus fidèle représentation. Le morceau fait partie intégrante du récit, il est à l’intérieur, jamais utilisé comme une possible rampe de lancement ou le thème répétitif de la survie ou encore celui du cercle sans fin. Il est un peu tout ça. Dans la voiture de Louise l’autoradio est cassé, enfin il semble cassé, elle n’a apparemment pas le choix d’écouter ou non la musique. A première vue on peut imaginer qu’il lui sauve la mise, qu’il est le coup de fouet. Mais pas du tout, ce morceau l’énerve. Exploit : Sinnerman arrive à agacer. Il faudra se débarrasser de ce poids et une nouvelle fois cette étape n’apparaît pas comme un tournant fondamental. Louise se met à danser, dans une transe compulsive, puis stoppe définitivement le morceau en jetant l’autoradio. L’image pourrait être énorme mais Cyril Mennegun arrive systématiquement à s’en sortir, à privilégier le récit au symbole. L’autre force c’est la présence de la sexualité. Le statut de Louise ne la prive jamais de cet abandon sexuel qu’elle semble s’offrir systématiquement avec le même homme. Elle ne dégage aucune sensualité, jusqu’à être la propre artisane de ce corps d’apparence repoussoir, puisqu’elle refuse toute aide, tout cadeau de l’extérieur. Elle couche avec cet homme (dont on ne saura jamais rien, le film préférant rester rivé sur Louise et non sur les autres auxquelles elle refuse la parole) mais ne profite pas de cela pour dormir sous un toit ce qui ne l’empêche pas de déclarer à l’assistante sociale habiter chez un ami qui l’héberge. Tout n’est pas forcément bien dessiné autour (le gérant de l’hôtel (trop chargé), le comparatif entre la première assistante sociale (sorcière sans âme) et la seconde (divine providence)) mais le film évite malgré tout les facilités, et ces maigres facilités, si elles existent, apportent un contrepoint au récit, visant à atteindre une certaine angoisse. La peur qu’elle perde son travail, que sa voiture rende l’âme, qu’elle ne trouve pas d’appartement. Le film dure quatre-vingt minutes, pas une de plus et heureusement tant il devient oppressant, épuisant. Mais à l’image de cette danse dont je me souviendrais longtemps on a plus vite fait de lâcher prise intégralement (acceptation de la fin, que rien ne rentrera jamais plus dans l’ordre) tandis que Louise sait y mettre un terme définitif. La fin paraît détachée de tout, lorgnant presque vers l’utopie, mais une fois encore Cyril Mennegun ne tombe pas dans le happy-end grossier, ni pédagogique, cette renaissance semble être le fruit providentiel d’un retour miracle comme ça aurait pu être l’inverse et on se prend à penser que le film ne raconte pas long temporellement, qu’il se situe dans cet état de retour/non-retour dont seul un miracle peut en être l’épilogue. C’est la même fin que dans le dernier film des frères Dardenne, Le gamin au vélo. On y croit sans y croire, ça n’a plus d’importance, c’est au-delà du réel. C’est donc à la fois très anxiogène autant que c’est un beau manifeste de survie. Reste qu’on en revient toujours au personnage, le film n’existe pas sans elle : ce corps imposant, ce physique de fer, le film est le portrait de la crise mais aussi celui d’une force de la nature parmi les laissés pour compte.

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