Publié 19 juillet 2014
dans * 730 et Alfred Hitchcock
Les nouveaux monstres.
9.0 En revoyant Les oiseaux aujourd’hui on se dit inévitablement que c’est le père d’un certain cinéma catastrophe, apocalyptique, autant dans sa mécanique et ses motifs que dans sa construction. Et peut-être aussi parce qu’il est plus facile aujourd’hui d’effectuer un parallèle terroriste quand on a souvent évoqué dans les diverses analyses autour du film cette évidente parabole de la Genèse. Les oiseaux chez Hitchcock ont cette particularité d’attaquer progressivement, d’abord en tant qu’élément isolé (la séquence de la barque) puis en meute voire en espèces mélangées. Le cinéma nous habituera très vite aux créatures les plus terrifiantes, souvent en environnement humide (Requin, piranhas, orque) ou fantasmatique (Gremlins, Godzilla, Kong). Hitchcock choisit simple, il choisit l’oiseau, un animal de notre quotidien, un élément du décor. Et il choisit un lien sécurisé, en apparence tout du moins. Et le film se déroule intégralement de jour bien qu’il semble lentement glissé vers la pénombre jusqu’à ce magnifique plan post-apocalyptique final. Le tout sans musique. Zéro musique. La seule musique du film sont les cris intempestifs des volatiles, durant leurs périodes d’attaque. Le film démarrait d’ailleurs dans ce même bruit mais sans encore la présence d’un danger concret, dans une oisellerie. Comme Psychose, trois ans plus tôt, dénudait d’entrée le corps de Janet Leigh, douce prémisse de la future séquence de douche. Le film démarre pourtant presque façon Love story légère, sur la rencontre d’un homme et une femme. C’est l’orgueil du jeu qui guide cette rencontre, avec laquelle le film s’ouvre. Elle fait semblant d’être l’employée du magasin, lui feint de la prendre pour l’employée qu’elle prétend être. Les oiseaux au centre – des oiseaux d’amour – les inséparables deviennent l’instrument de cette rencontre. C’est comme si cet anodin péché allait être la cible d’une répression improbable. C’est d’ailleurs ce qui guide le film, l’improbable. Il faut en effet être solide pour accepter tous les soubresauts du scénario pré première attaque, qui voit Tippi Hedren s’échouer sur l’île d’une ville paumée en périphérie de San Francisco (ressemblant davantage à un village écossais) pour offrir des oiseaux à la fille de l’homme en question. Avant d’accepter de la voir louer une barque qu’elle accoste seule puis rame de ses talons hauts et tailleur court. On serait presque tenté de croire qu’elle est déjà habitée par les oiseaux tueurs. A la manière des profanateurs de sépultures. Elle est guidée par une force invisible vers le danger. A l’image de la séquence d’évacuation de l’école. C’est une sorte d’instrument de la rébellion et donc forcément liée (la radio le confirme un moment donné) à faire de la ville l’épicentre d’une épidémie planétaire. Autre chef d’œuvre inépuisable du Maître, hallucinant film apocalyptique, mise en scène à tomber par terre de la première à la dernière seconde, tout en blocs de séquences très étirées avec cette sensation de garder longtemps dans les oreilles après visionnages ces bruits stridents des oiseaux. Le blu-ray est à se faire dessus, vraiment, j’ai flippé ma race comme lors de la première fois. Le dernier plan est une baffe à lui tout seul.
Publié 19 juillet 2014
dans Claude Sautet
Les sentiments.
6.0 J’aime assez. C’est un bon Sautet, mineur mais bon. J’ai toujours un problème avec Auteuil bien qu’il campe ici un personnage fascinant, luthier dépourvu de sentiments. Le film suit sa rencontre avec la compagne violoniste de son meilleur ami dont on croit qu’ils s’amourachent mutuellement. Le chant contre le silence. La passion contre le marbre. C’est déstabilisant et finalement complètement sombre. Le plus désespéré des films de Sautet je pense. Même s’il lui manque tout de même quelque chose, enfin disons qu’il est loin d’égaler ses chefs d’œuvre.
Publié 19 juillet 2014
dans Pedro Almodovar
Y a t-il un film dans l’avion ?
1.0 Epouvantable. Je m’y attendais mais à ce point, peut-être pas. Je me rends compte que Almodovar m’emmerde prodigieusement qu’il fasse ça ou le précédent. Je n’ai même plus envie de revoir certains de ses anciens films que j’appréciais, ça ne m’intéresse vraiment plus du tout. Voilà, c’est probablement la dernière fois que j’écris sur son cinéma.
Publié 19 juillet 2014
dans Emir Kusturica
Bête sans être méchant.
3.0 C’est fou car j’ai regardé ça pour Kusturica, pas pour Maradona. J’ai aimé (et j’aime toujours un peu, j’imagine) certains films du Serbe, comme Underground ou Le temps des gitans. Je portais au pinacle ce dernier, fut un temps. Et à l’arrivée je ne déteste pas pour Maradona, et non pour Kusturica. En effet je trouve ça cinématographiquement indigent mais le personnage au centre me fascine, moins footballeur qu’activiste d’ailleurs. Il est dingue, drôle, bête, les deux vont bien ensemble, c’est cohérent. Et les deux font vraiment n’importe quoi à l’heure actuelle. Presque sans intérêt donc. Mais ça vaut le coup de voir autant de bêtise réunie, franchement.
Publié 17 juillet 2014
dans Tarsem Singh
Splash.
3.0 Passé l’introduction désolante sur l’allegretto de la septième de Beethoven, en forme de gros clip filtrée noir et blanc, le récit se resserre alors sur une petite fille dans un hôpital qui rencontre un cascadeur alité qui va lui raconter sa mésaventure amoureuse au moyen d’un conte adapté avec des héros tous plus fantaisistes les uns que les autres. Inutile de préciser que le film sera quasi entièrement pourvu d’images tirées de l’imagination de la demoiselle plongée dans le récit de son hôte, interrompu régulièrement par les soubresauts du réel. Un réel qui se mélange évidemment au rêve. Présenté ainsi, on croirait un croisement entre Johnny s’en va-t’en guerre, L’esprit de la ruche et Le labyrinthe de Pan. Pourquoi pas après tout ?
Alors je me suis laissé prendre au jeu une demi-heure (tout en restant très lointain) puis j’ai progressivement décroché. La faute à une ambition formelle tellement affichée (suresthétisation à l’excès) et revendiquée (On sait que le film fut tourné dans 18 pays différents) qu’elle oblitère tout rapprochement intime identificateur. Je ne me suis jamais senti impliqué car je trouvais ça moche en fait, oui, moche, voilà tout. Trop cadré. Trop maîtrisé. Trop. Criard, bariolé, démesuré, outrancier, on pourrait sortir la panoplie lexicale. C’est très Jodorowski dans l’âme (pas mon truc, personnellement) tendance Laurent Boutonnat parfois (sans provocation aucune).
Je n’ai vu qu’un défilé de cartes postales si jolies, rondes, stylisées que j’étouffe. J’étouffe comme chez Del Toro ou Bayona, Dali ou Miró. A forte dose je trouve cela hermétique. Mais je comprends qu’on le porte au pinacle, que ça puisse être un beau voyage, il y a une générosité et une audace assez originale. C’est un peu fou, un peu naïf (c’est tout à son honneur) mais c’est surtout un gros mélodrame, ce qui aurait pu me plaire, mais d’un point de vue esthétique et formelle c’est porte close pour moi. Quant à cette symphonie qui tourne en boucle, je trouve le choix plus convenu, communément utilisé au cinéma. On l’entendait même dans le dernier Godard où il en faisait une sorte de boucle infinie, sans cesse remise en question, stoppée, reprise, triturée, là il se passait un truc, une vraie obsession.
Publié 17 juillet 2014
dans George A. Romero
7.0 Mortel ! J’ai trouvé ça complètement dingue. En fait tout est dans la mise en scène. Ou comment faire en sorte de raconter la folie de l’esprit par la mise en scène. C’est un film qui respire la parano et la mutation, mais comme tout est invisible, alors que d’habitude non, puisque souvent chez Romero ce sont des morts-vivants, et bien ça offre quelque chose d’assez insolite que la mise en scène s’accapare dans un montage quasi épileptique en naviguant d’une mise à mort à l’autre. Terrifiant à souhait.
Publié 17 juillet 2014
dans Djamshed Usmonov
Film du milieu.
4.0 Petit thriller conjugal comme il s’en faisait à la pelle outre atlantique dans les années 90. Probablement que le réalisateur en a mangé pas mal. Le problème c’est qu’il est un peu perdu. Entre l’attirance du réel, du drame quotidien et celui de la fiction, du twist. C’est un film assez chiant en fait. Il y a pourtant quelques belles idées mais elles ne sont jamais relayées par le dynamisme propre au genre et son humilité. C’est au contraire un film continuellement dans la pose. Mais je suis content car on y voit Thibault Vinçon, dans un moindre rôle certes, mais c’est dingue comme je peux le reconnaître rien qu’à son intonation de voix, sa première apparition intervient par téléphone et je l’ai reconnu dès ses premiers mots. Du coup ça me donne envie de revoir Les amitiés maléfiques et Memory Lane. A part ça Gourmet fait du Gourmet et Seydoux du Seydoux. RAS donc.
Le sang des innocents.
6.5 Je suis content de l’avoir revu. On va dire que c’est un gros traumatisme d’enfance. J’avais dû le voir trop jeune, j’en avais fait des cauchemars, pleuré, vomi, je pense que j’avais souffert de devoir associer la fiction au réel. J’étais trop jeune pour effectuer le parallèle tout du moins. Enfin du coup j’avais des souvenirs de violences hyper esthétisées (corps maculés de sang dans un église bien mis en lumière, femme brûlée au lance-flamme au ralenti, sa fille déchiquetée par les balles etc…) mais en fait pas du tout. Il y a bien ces séquences, elles sont gravées dans ma mémoire depuis lors, mais je les avais déformées. En fait, le film est assez sobre sur ce point. Pas de ralenti. Pas d’excès à vouloir montrer. Son seul vrai problème c’est sa musique. Mais le reste est assez bien fait dans la mesure où il distortionne complètement la temporalité, je n’avais aucun souvenir de ça. Du coup on peut le voir comme un gros cauchemar à l’intérieur d’une réalité voire y voir le fantasme vengeur. Sinon, le personnage joué par Noiret m’a beaucoup fait pensé à celui du docteur Larcher dans Un village français. Dévoué mais tu sens que ça peut aussi très vite dérailler. Noiret est excellent d’ailleurs. Je m’attendais à ce qu’il cabotine mais en fait non.