8.0 Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois.
Game of thrones, saison 1
J’étais très curieux de me pencher sur la grosse vitrine HBO de ces dernières années et pourtant ce n’est sur le papier vraiment pas mon truc. Mais ô surprise : grosse calotte ! Je trouve ça prodigieux d’un bout à l’autre, passionnant, superbement écrit, soigné sur tous les points, personnages, lumière, étirement des scènes, enchainements dramaturgiques. Et dans le même temps je ne comprends pas grand-chose, en terme de géographie je suis perdu et il m’est impossible de retenir les noms. Parfois même, je me fais chier mais je n’ai jamais autant aimé me faire chier devant une série, tout simplement parce que au-delà de quelques séquences ennuyantes (bavardes) et bien je suis fasciné par l’audace formelle qui les traversent, cette impression qu’on ne cherche jamais à me prendre par la main, à jouer la facilité. Dire qu’il y a une bataille mais ne pas la montrer (mais j’imagine que c’est un problème de fric) par exemple. Ou supprimer des éléments quand on ne l’attend pas (l’épisode 1.09 m’a scié). On ne sait jamais où elle va nous emmener, les 2 derniers épisodes sont à ce titre très représentatifs, aussi bien concernant les destins de Ned Stark, Drogo, Joffrey ou Arya et j’en passe. C’est ahurissant d’intelligence (les dialogues, quel caviar !) et de surprises et le tout sans en faire des caisses : pas d’effets superflus, une musique fondue dans l’ensemble, une subtilité d’interprétation. Et puis c’est beau. Complexe dans le fond mais simple et limpide dans sa construction. Et puis quelle scène finale, avec Daenerys ! C’était attendu et je le craignais un peu mais moi qui ne suis habituellement pas trop friand de ce côté fantaisiste et bien j’ai trouvé ça sublime, magnifiquement amené, tout en douceur et poésie. En fait, il faudrait pour bien faire que je la revoie entièrement. Je ne pense pas en avoir le courage et puis j’ai surtout envie d’enchainer sur la 2 là tout de suite mais c’est d’une telle richesse et d’une telle profondeur que ça mérite bien de s’y attarder plus longuement. Je serais Tolkien je l’aurais mauvaise qu’on ait fait un truc si chiant et pantouflard de l’adaptation de son œuvre comparé à ce qui est fait ici de celle de Martin. Je n’ai lu ni l’un ni l’autre et ne les lierais jamais mais je voulais apporter ma petite contribution de mauvaise foi.
Game of thrones, saison 2
Quelle série exemplaire ! Je suis accroc comme jamais, de plus en plus dans la mesure où je suis de moins en moins perdu tout en étant constamment surpris et fasciné. Quel plaisir de voir des séquences durer, durer sans que l’on ne ressente cette durée comme un fardeau ou une quête de performance… Je ne me suis pas attardé plus que ça dans la mesure où j’ai directement enchainé sur la saison suivante.
Game of thrones, saison 3
Belle saison, transitoire (entre deux grandes batailles en gros) qui révèle des personnages jusque-là dans l’ombre ou inconnus. Tout d’abord Brienne de Torth et Jamie Lannister, voyage à deux aussi beau qu’improbable avec deux aboutissants de marque : l’arène à l’ours puis le bain commun (l’une de mes séquences préférés de la saison). Stannis et Melisandre, avec quelques moments et images fortes même si ce n’est pas la storyline la plus palpitante. Et plus tard Arya et le Limier, j’adore ce qu’ils traversent tous les deux (climax de leur relation atteint lors la saison 4 principalement). Assez peu d’affinités avec ce qui se passe au-delà du mur, excepté peut-être cette fois ci un peu plus avec Jon Snow et la petite sauvageonne, j’aime beaucoup les séquences qu’ils ont en commun. Concernant Daenerys j’aime bien mais je trouve ça un peu mou du genou quand même, depuis Drogo finalement l’Est est assez peu passionnant. Mais forcément tout cela est dû aux moments passés à Port-Réal où la série n’a jamais été aussi remuante, en fin de compte il aura fallu attendre qu’elles se concentrent principalement sur les Lannister pour les rendre plus terrifiants mais plus beaux encore (Tyrion toujours aussi phare mais Tywin qui prend une ampleur magnifique et que dire de cette méga maxi tête à claques ultime que campe Joffrey qui n’a d’égal que l’œil du mal de sa mère). Pourtant, cette saison 3 trouve son climax ultime ailleurs. Aux Twins. Les fameuses noces pourpres. Je n’en dis pas plus mais c’est bien entendu le truc le plus dingue qu’aura fait la série, fameux épisode 3.09 que je n’oublierais pas de sitôt, autant dans sa construction, son déroulement (cette tension qui s’installe progressivement) et la violence extrême qui la boucle. C’est tellement puissant que le 10 passe un poil trop crème derrière, même si j’aime beaucoup la séquence finale à Yunkaï, probablement le point d’orgue de la révolution parfaite de la mère des dragons (la suite sera plus nuancée).
Game of thrones, saison 4
Voilà, j’ai rattrapé le wagon. Je suis un peu triste. Doublement triste qui plus est puisque j’ai démarré le premier épisode de la saison 1 il y a un mois, la veille du lancement du mondial. Et je termine le dernier épisode en date, le 4.10 le lendemain de la finale. J’ai le cœur meurtri. J’aurais vibré un mois sur une histoire de royaumes se disputant un trône et sur une compète de ballon rond. Il faut sortir de cette bulle maintenant. Simplement quelques mots sur cette quatrième saison : C’est sans doute à mes yeux la plus belle, maitrisée, la mieux construite, la plus étonnante sur la durée, la plus osée sans doute aussi. Je pense que c’est ma préférée. S’il fallait piocher deux moments (TRES TRES) forts dedans, je choisirais la deuxième partie de l’épisode 4.02, probablement ce que la série a offert de plus contradictoire. Une suite aux noces pourpres, en somme. Une séquence de 25min à Port-Réal (aucun Cut Mur ou Dragons, non, juste des noces de roi, c’est tout) absolument grandiose, malaisante (l’humiliation avec les nains, mon dieu) jouissive, tout y passe. Je ne vais pas m’en remettre. Ensuite, beaucoup doivent mettre en avant le 9e comme toujours mais disons que ce n’est pas ce que je préfère ces épisodes de batailles même si je dois reconnaître que celui-ci a vraiment de la gueule (réalisé par Neil Marshall, encore, après celui de La Néra dans la saison 2, qui était bien mais nettement plus cheap, cette fois on sort l’artillerie !) et qu’hormis certaines prouesses jouissives (un plan-séquence panoramique faramineux, made in HBO) l’épisode brille surtout dans sa mécanique et son parti pris de centrer 1h sur le Mur, sur un rythme effréné. A priori ça ne m’excite pas trop sur le papier et ça ne me bouleverse d’ailleurs pas vraiment au final, mais gageons que le résultat envoie du bois. Non, pour moi (je mets de côté l’épisode 10, fin absolument parfaite, dans ce qu’elle ferme et ouvre comme boucles, avec l’émotion dont elle est chargée de part et d’autres, les surprises qu’elle engage, sa manière de redéfinir tous les enjeux) la grosse grosse baffe c’est le 4.08. (The viper and the mountain) soit celui plus ou moins centré sur ce duel judiciaire car ce nouveau personnage, le prince de Dorme Oberyn Martell, est devenu rapidement mon personnage préféré avec Tyrion. Il apporte cette touche méditerranéenne nouvelle, cet aura orgueilleuse très ibérique que je trouve bienvenue. Et puis le mec pourrait s’appeler Vengeance quoi. Le combat en plus d’être un haut fait m’a mis dans tous mes états. J’ai beaucoup, énormément, intensément souffert mais je n’en dis pas plus. J’en ai des frissons rien qu’en y repensant. Magnifique saison donc, d’une grande richesse (tout ce qui touche aussi bien Sansa aux Eyries qu’Arya et Clegane sur la route est superbement traités). Toujours peu d’affinités avec le reste même si je commence à beaucoup aimer Jon Snow, enfin. La série perd un peu de son charme de l’autre côté, à Meereen, où tout est un peu trop vite amené, de façon un peu programmatique jusqu’aux doutes de Daenerys face à Jorah et face à ses dragons adultes. Mais j’imagine que la saison 5 lui redonnera bientôt un peu de peps à cet Est d’autant qu’on a découvert Braavos, que j’ai hâte de connaître davantage.