8.0 Mon dieu. Je ne pensais pas que Fassbinder serait allé jusque-là dans la violence sourde. On est formellement dans la continuité de Petra Von Kant mais sans le huis clos total. On est surtout dans la continuité thématique d’Effi Briest (le mariage prison) film trop terne et trop écrit à mes yeux, sorte de Madame Bovary clinique et distancié (Fassbinder dira lui-même qu’Effi Briest est un film à lire). Martha est un film au contraire très ouvert, parfois solaire même (Rome!), proche des essais romanesques hollywoodiens. Pourtant c’est un gros film d’horreur domestique. Le malaise s’installe progressivement par la mise en scène, au détour de plans vertigineux (la rencontre entre Martha et Helmut en est le sommet) et d’une atmosphère insolite entre sadisme, masochisme et vampirisation. Représentation ultime de la vierge dépossédée (elle voit son père mourir sous ses yeux et dans le même élan se retrouve attirée par un dominateur dans une ronde déjà tragique) le film devient ensuite un portrait conjugal fait de soumission et d’humiliation consenties, où règne un climat quasi fantastique, pour ne pas dire cauchemardesque, renforcé par la récurrence de motifs terrifiants, de variations de rythme étonnants et d’une suggestion horrifique que je n’avais encore pas vu poussé à ce point d’abstraction (calé sur la personnalité de Martha qui voit en Helmut un père de substitution, et en sa condition d’adulte bourgeoise la continuité normée de sa vie de petite fille). Tout cela est bien entendu hyper nuancé (le film jouant aussi habilement sur le caractère paranoïaque) et très ambigu (Martha ne connait pas le rejet) mais on sent que Fassbinder veut faire un film d’épouvante sur l’éducation à l’oppression (pour le citer). Terrifiant.
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Martha – Rainer Werner Fassbinder – 1973
Publié 12 septembre 2014 dans Rainer Werner Fassbinder 0 CommentairesLaisser un commentaire
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