Archives pour avril 2015

Godspeed You ! Black Emperor – Bataclan – 23/04/15

GODSPEED YOU! BLACK EMPERORAsunder, sweet.

     C’était l’un de mes doux rêves depuis plusieurs années, les ayant découvert sur le tard, durant leur longue traversée du désert : Me confronter à la musique de Godspeed en live. Post rock esthète qui embrasse à peu près tout ce qui m’excite, me transporte, m’émeut musicalement (des souvenirs d’écoutes ahuries dans le train se bousculent dans ma tête) et ce bien que leurs deux derniers albums, qui sont en réalité des reproductions studio de versions live (Behemoth ou Albanian) jouées lors des tournées assurées après leur reformation il y a quatre ans, ne soient pas à la hauteur de l’intense (3 albums et 1 Ep de légende) discographie offerte entre 1997 et 2002. Dix ans de disette et des bouleversements au sein du groupe, ça peut laisser des traces.

     Me voilà donc accompagné de Boris (Rien à voir avec le groupe de Drone métal, quoique) – mon partenaire éternel pro Godspeed – attendant que nos héros foulent les planches du Bataclan. Quelques bières et une première partie fort passionnante : Carla Bozulich : sorte de crossover entre du Swans et du Dead can dance, aux effluves godspidiennes. Entre rock dégénéré, folk hypnotique et drone carnassier (j’étais aux anges) nous affrontons un set d’une classe absolue, dans lequel s’immiscent d’ailleurs deux membres de Godspeed. Beau moment de lévitation. On reste un peu abasourdi par ce qu’on vient de voir et d’entendre, bel effet de surprise quoi qu’il en soit. Bières, phase trois, puis nous voilà reprenant nos places en pleine fosse, salle quasi comble, attendant nos petits canadiens d’amour.

     Quelques réglages instrumentaux et un gros drone d’attente en guise d’apéritif. Pourquoi pas. C’est raccord avec leur dernier album (que je n’aime pas beaucoup, mais passons). Ils sont huit et débarquent sur scène plus ou moins séparément, sans cérémonie, sans salutation, sans un mot, s’installent chacun à leur place, l’un caché derrière sa tignasse, l’autre tournant le dos à la salle, tous plongés dans leurs instrument. Je savais le groupe peu enclin à la démonstration scénique, mais à ce point autiste, tout de même, c’était violent. Les nappes habituelles bien volumineuses de Godspeed allaient vite infecter toute la salle et le traditionnel HOPE faisant son apparition progressive sur la toile où allaient se projeter un flot d’images en noir et blanc (péloche à l’esthétique proche des couv des albums du groupe : immeubles délabrés, montages de déchets, rails de chemin de fer, villes fantomatiques…) pendant toute la durée du set rappelait, non sans émotion, le credo du groupe, pour ne pas dire sa signature, depuis presque vingt ans. L’entrée sur Hope drone allait en effet donner de l’espoir et autant de craintes (une ouverture bien grasse, à l’image du dernier album) mais l’enchaînement sur Rockets fall on Rocket falls, le plus beau morceau de GY!BE à ce jour, issu de Yanqui UXO le plus bel album de GY!BE allait me foudroyer, évincer tous mes doutes, libérer mon euphorie. J’en avais les larmes aux yeux.

     Qu’importe la suite finalement, le voyage était lancé, sans escale. Regard voguant entre les projections doubles, immenses, hypnotiques et les huit avortons chacun dans leur bulle, je planais sans mesure. Ça aurait pu durer des heures. J’avais perdu toute notion de temps, comme je l’espérais secrètement, comme ils nous faisaient régulièrement perdre tout repère lors de nos innombrables soirées Bières/Godspeed. Ouai, Boris et moi réunis là pour un concert de Godspeed, j’ai encore du mal à y croire. Depuis le temps qu’on en parlait, nous les deux plus gros fans de GY!BE de la Terre. Oui je m’emballe. A siroter notre cerveza devant une prestation live de Rockets falls on rocket falls et à s’envoyer quelques sourires béats ci et là. Nom de dieu de bordel de merde. Ils auront joué un tiers de Yanqui UXO n’empêche, rien que de l’écrire j’en ai des frissons. Bon, je vois bien que je suis submergé par l’émotion donc je ne vais pas trop m’attarder. Je voulais juste dire que l’album suscité fait parti de mon top 5 all time. C’est un peu comme redécouvrir Shining en salle, en somme.

     Un moment donné, après un set de 40 minutes sans interruption, représentant la totalité du tout dernier album (plus drone qu’auparavant et surtout sans aucun field recording) Asunder, Sweet And Other Distress, nos huit compères s’en vont, là aussi sans cérémonie. Une longue nappe sonore demeure néanmoins. Fini, pas fini ? Les lumières se rallument, certains quittent la salle, la plupart se lance dans un tonnerre d’applaudissements. Dix minutes. Les musiciens reviennent pourtant, discrètement, presque clandestinement, chacun à leur place. Pour jouer dix minutes. Pour nous offrir Moya. L’une de leurs plus belles pièces. J’ai cru mourir tellement c’était beau.

     Salutations et remerciements brefs, modestes, mais avec beaucoup de chaleur dans le regard et standing ovation hallucinante dans la foulée. Ok, ce ne sont pas des généreux de la scène, mais je crois que c’est cette discrétion, cette humilité qui me touchent beaucoup. Un fin sourire ici, un délicat geste de la main là. Ça fait partie de Godspeed. Les images qui les accompagnaient aussi. Sorte de ciné concert sans égal, en gros. Inutile d’évoquer mon état au sortir de la salle. J’étais plutôt bien. Conquis. Plongé dans une douce liquéfaction.

Fenêtre sur cour (Rear window) – Alfred Hitchcock – 1955

35.12Une femme disparaît.

   10.0   Trois rideaux s’ouvrent vers le haut et le cadre qu’ils découvrent sera celui du film deux heures durant. L’occasion pour Hitchcock de triturer tout ce qu’il peut. En effet, nous ne quitterons pas l’infime espace que constitue T2 donnant sur la cour commune d’un quartier résidentiel. Le film n’aura pourtant jamais l’air d’être une pièce de théâtre. Introduction simple et géniale, ce n’est pas un dialogue futile et/ou attendu qui nous explique la situation du personnage, mais la mise en scène, purement, en un plan parcourant l’appartement, l’homme endormi, plâtré, une table avec un appareil photo cassé, une pile de magazines à côté, des photos de voitures accidentés encadrées. Jimmy Stewart n’est pas encore le voyeur qu’il sera bientôt mais ces instantanés révèlent beaucoup sur ce personnage, ce qu’il est, ce qu’il fait, ses obsessions.

     Il est le miroir du spectateur. Attentif, voyeur, en quête. Il y aura pourtant du passage dans cet appartement, mais chaque fois le regard se laisse gagner par l’extérieur, cet écran géant, cinéma grandeur nature, dans lequel Hitchcock projette le miroir de l’Amérique toute entière. Sombre tableau qui pourrait être vu comme la projection des désirs et des craintes du personnage joué par Stewart, électron libre ne voulant pas s’engager. Ce qu’il voit en face de lui c’est une somme de récits, de comportements, l’étendue des strates conjugales, ses possibilités, au travers d’une femme seule trinquant avec un partenaire imaginaire, un homme seul réfugié dans le piano et les diverses soirées qu’il donne régulièrement à son domicile ; Cette jeune sportive qui reçoit les hommes comme on ouvre son courrier, ce couple vieillissant mal, cet autre couple vieillissant bien mais en trouvant refuge la nuit sur leur balcon. Ou bien ces jeunes mariés, dans la consommation la plus absolue et autiste de leur amour.

     Fenêtre sur cour est un grand sur les relations de couple, en somme. Enfin disons que le catalogue qui nourrit l’écran et/ou les pensées du personnage est une représentation du monde duquel l’amour (le mariage) est le dénominateur commun. Cela m’avait échappé la première fois. Sans doute et c’est là tout le pessimisme hitchcockien parce qu’il est saisi du point de vue de celui qui le refuse, préférant l’observer, le disséquer, s’y projeter ou s’y frayer son propre intérêt, à la manière d’un cinéaste trouvant en son personnage un alter égo.

     Il est passionnant de constater combien la fenêtre de l’appartement de Stewart donne à voir une multitude d’autres fenêtres qui sont autant d’écran renfermant chacun sa petite histoire. C’est donc une folle affaire de voyeurs et de gens qui aiment se montrer. Le film marque d’ailleurs discrètement un certain crescendo thématique dans la mesure où à l’œil nu de Stewart succède d’abord les jumelles puis la longue focale, de même qu’à son obsession solitaire se développe une véritable table d’observation collective. Le film enchaine les plans ahurissants avec une science de la découpe qui tient du génie pur. Cette espèce de faux split screen (deux fenêtres séparées par une gouttière) sur ce couple en crise c’est absolument génial. Voire aussi ces nombreux hors champs systématiquement matérialisés par des murs, des rideaux, des volets. Cet équilibre entre les plans de jour et ceux de nuit. Quelque chose de continu et de tellement continu en apparence qu’il est en indéchiffrable dans sa temporalité.

     C’est un immense film sur la curiosité des hommes en tant que moteur obsessionnel. L’issue importe finalement assez peu. C’est le voyage immobile et monde à la fois, qui installe et nous convie au vertige. Un quartier étrange, suspect. Un truc de passionné. Un plateau avec un verre de lait, un sandwich et un appareil photo. Un plateau et un écran. Ou un écran de cinéma. Qu’importe, c’est une fenêtre sur un ailleurs.

Elégie de la traversée (Elegyia dorogi) – Aleksandr Sokurov – 2001

48Nostalgie de la lumière.

   8.0   Sokurov raconte ce voyage nocturne à la première personne, entre la Russie et l’Europe, entre St Pétersbourg et Rotterdam, tente de nouer quelques liants entre ces deux pôles, quelque attraction, les compare, les rapproche, s’y perd dans leurs méandres, s’abandonne dans leur énergie. C’est un mélange de rêve et de souvenir, de méditation et de mémoire. Plastiquement, le film est dément. L’image flotte, ondule comme si elle était soumise à une source de chaleur menaçante. Ouatée comme un rêve. Je me demande si ce n’est pas l’objet le plus expérimental du cinéaste russe, dans son approche formelle autant que dans sa mise en abyme. C’est à la fois très simple (des mots chuchotés sur des images triturées) et vertigineux. Disons que l’on peut apprécier cela de différentes manières. En tant que poème imagé ou en tant que voyage dystopique ; Ou comme une douce caresse des formes et des matières ; Ou simplement c’est une réflexion sur le mouvement, le mouvement dans l’art. Les forces invisibles, la disparition. Des routes, des forêts, la mer, la lune, des frontières. Ici un arbre sans feuillage affrontant l’hiver avec ses fruits jaunes. Là ce très beau passage sur la route qui rappelle, différemment, le travail sur les lumières de Tati dans Playtime. Il y a aussi cette drôle de rencontre, avec un homme de passage. Un personnage au hasard, symbole étrange du tumulte des Hommes, entre la force créatrice et la haine. C’est dans la peinture que Sokurov finit par se mouvoir et se réfugier, entre Bruegel et Van Gogh, La tour de Babel et Allée des peupliers puis dans Place Sainte-Marie de Peter Saenredam. Une collision entre le réel et sa représentation. Collision rêvée, collision temporelle. C’est un voyage tour à tour enivrant, envoutant, inquiétant, extatique, accompagné d’un arrangement électronique de Mochkov reprenant des fragments d’œuvres de Chopin, Mahler ou Tchaïkovski. On navigue dans le sublime. Je me rends compte que j’aime le Sokurov du déplacement sans fin, sans issue, en lévitation, à l’image de cet homme marchant en attendant la mort de sa mère (Mère et fils) ou de cette traversée sensuelle de l’Ermitage (L’arche russe). Dès qu’il se fige ou s’enlise, j’ai tendance à vite perdre pied.

Mauvais sang – Leos Carax – 1986

mauvais-sang-1986-01-gModern love.

   6.5   C’est le deuxième film de Leos Carax, dans la continuité de Boy meets girl, mais en couleur, cette fois. Carax en déjà grand romantique, punk poète, brise absolument tout ce qu’il peut briser, autant dans l’attente d’un autre ovni aussi bien que dans celle que l’on peut espérer d’un auteur eighties. Il n’y aura pas deux auteurs comme Carax. Il n’y aura pas non plus deux films comme Mauvais sang. Ce récit éclaté où la bifurcation surgit de toute part, où le moindre élément de scénario est mis en chantier autrement que par le scénario lui-même. C’est un pur film de mise en scène, de jeune fougueux quasi épileptique, qui tente, détruit et tente à nouveau. C’est un film impossible à raconter, à résumer, à conseiller. Autant qu’il est difficile d’approcher Passion ou Sauve qui peut (la vie). On pourrait seulement d’ailleurs le rapprocher de cette veine godardienne 80’s, c’est pourquoi je pense que c’est le Carax qui me touche le moins, tant il me perd dans ses éclats, non dans son émotion. En gros, je trouve que sa forme indéchiffrable domine outrageusement son romantisme échevelé. Carax trouvera l’équilibre parfait dans le film suivant, dans lequel il ne se cache plus derrière ce flux incessant, mixture formelle éreintante, mais où il s’abandonne littéralement à son récit, à ses deux personnages, aussi fous encore soient-ils. Mauvais sang est un manifeste de romantique moderne, un beau geste qui me sidère autant qu’il finit par me laisser sur la touche.

Le procès – Orson Welles – 1962

critique-le-proces-welles27   3.0   Je n’aime pas du tout. Afin de modérer un peu : Je trouve les dix dernières minutes absolument stupéfiantes. C’est tout. Et sinon, l’adagio d’Albinoni en boucle, sérieusement ? Pas que je tienne Welles dans mon cœur, mais je l’ai déjà trouvé beaucoup plus inspiré. Ah et fait rarissime me concernant : Je me faisais tellement chier que j’ai balancé la version française à la moitié du film, juste parce que je voulais entendre Romy Schneider parler en français – gros fantasme personnel. A part ça je trouve que c’est un film qui vaut surtout pour ses prouesses techniques. Une matière sans âme. Très peu pour moi.

La French – Cédric Jimenez – 2014

0008572_gal_008_medL’instinct de mort.

   5.5   Et bien c’est pas mal ça. Au départ on craint un croisement infect entre Marchal et Arcady mais finalement pas du tout. On pourrait davantage le comparer à un Romanzo Criminale. Il y a un truc, une ambiance, ça ne va pas me laisser une grande trace mais j’y ai cru et n’ai pas vu passer les 2h15. Les acteurs sont bons. Même Lellouche. Le seul truc problématique c’est que l’on sent trop l’influence de Heat, enfin à ce stade ce n’est plus seulement de l’influence et le film est malheureusement très loin de la dimension cathartique qui traverse le film de Mann autant qu’il est loin de la teneur physique et abstraite que constitue le chef d’oeuvre de Friedkin sur La French connection. Mais je le répète c’est vraiment pas mal, sobre, soigné.

Les nuits fauves – Cyril Collard – 1992

nuits-fauves-1992-07-gAvant de partir.  

   5.5   Crainte de la revision, énième épisode. J’aime assez Les nuits fauves même si moins qu’à l’époque où il m’avait bien marqué et même si je trouve que c’est un film qui fut clairement surestimé. Collard veut tout mettre dedans (de son bouquin sans doute) du coup ça devient un truc un peu informe, mais dans le mauvais sens du terme, quelque chose qui ne respire absolument pas. Malgré tout, il y a une forme d’abandon à la pellicule que je trouve plutôt beau, sorte de testament d’un gars qui voulait par tous les moyens exprimer sa souffrance avant de partir et même si cela, fait dans l’urgence, semble hyper maladroit.

Les seigneurs – Olivier Dahan – 2012

9891348651074Humour low cost.

   0.0   L’un des trucs les plus ridicules, vulgaires, laids, indigents vus depuis longtemps. Sorte de Jamel Comedy Football Club où chacun tente à son tour de sortir son petit spectacle mais où la caméra du gros naze Olivier Dahan n’arrive même pas à tirer un petit quelque chose que ses guests pourraient réussir sur une scène. J’étais vraiment gêné, beaucoup plus qu’agacé. Un frisson de la honte en permanence. Ce n’est même pas du niveau Max Pécas, qui était un cinéma fauché, pas racoleur, pas insupportable non plus. Tout l’inverse de cette immondice où tout est moche et tombe à plat.

Copains pour toujours (Grown Ups) – Dennis Dugan – 2010

Copains pour toujours (Grown Ups) - Dennis Dugan - 2010 dans Dennis Dugan 21012508_20130614102835422   3.1   C’est pas terrible malheureusement. Je ne suis pas spécialement fan de Rien que pour vos cheveux mais il y avait un truc, une identité, une folie. Là quelques bons gags surnagent ci et là mais la plupart du temps la vanne sent le réchauffé ou tombe à plat. Et le film n’a strictement aucune autre ambition. Restent quelques numéros séduisants mais bon…

Mega shark vs Crocosaurus – Christopher Ray – 2011

Mega_Shark_vs_Crocosaurus   0.5   C’était le premier film de la grande soirée shark nanars proposées par NRJ12 ! Je me délectais par avance pourtant c’était abominable dans tous les sens du terme puisque même pas drôle surtout qu’on ne voit quasiment rien, grosse déception donc. Du coup j’ai dormi entièrement devant le suivant, Shark week, malheureusement, qui m’avait tout l’air d’un nanar ultime lui.

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silencio


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