School’s out for summer.
8.0 Avant l’été dernier je ne connaissais Linklater que de nom et encore. Depuis que j’ai vu cette merveille qu’est Boyhood et que je le sais auteur de la trilogie Before qui me fait de l’œil depuis un moment, je veux tout voir. Autant commencer par le début. Génération rebelle, dont on préfèrera le titre original plus classe et rock’n roll Dazed and confused, suit pendant la dernière journée de l’année scolaire, dans un lycée du Texas, une vingtaine de personnages (dont le temps accordé est assez bien réparti, ce qui rare dans un film d’une heure et demie) entre le traditionnel bizutage des plus jeunes par leurs séniors à coup de batte de cricket dans le cul chez les mecs et barbouillage ketchup/mayo chez les meufs, avant la grande soirée de fin d’année attendue, entre flirts, beuverie, fumette et connerie en tout genre. Le récit se déroule en 1976. Et c’est plutôt étrange de le voir après Kids, d’autant que les deux films sont sorti à deux ans d’intervalle, car bien qu’on ne soit pas dans le même Etat, l’époque représentée crée un décalage faramineux, dans l’approche fiévreuse de la quête du plaisir instantané. Au-delà de son aspect désinvolte, le film capte à merveille un certain état de cet âge bâtard, insouciant, cruel. Un chambre d’ado, la voiture, la salle de billard, un coin de forêt, le terrain de base-ball sont autant de petits théâtres où toutes ces entités fusionnent, ces générations décalés se collisionnent. Il y a notamment ce personnage fantomatique joué par notre future True détective, qui campe un ancien du bahut, dorénavant discret petit employé, qui revient pour semble-t-il raviver un peu de ces glorieux souvenirs. Il est de ceux qui ne veulent pas grandir, fier d’être plus âgé mais accablé de ne plus appartenir à aucun groupe quand Mike (Adam Goldberg) pourrait être le représentant parfait de ceux qui voudrait que cet âge soit déjà derrière. Mais le film n’est jamais dans la psychologie, il la refuse entièrement, au contraire de Hugues qui y glissait imperceptiblement dans The breakfast club, via la séquence de confidences générales. Au moyen de quelques saynètes parfois brèves, parfois plus étirées (en cela je trouve cela très proche de Boyhood dans sa conception) le film saisit une forme de malaise adolescent, les relais de générations, la proximité entre frangins. Pourtant le film sait aussi être très drôle, traversé par de petits détails savoureux, une écriture inspirée. Cette physionomie insaisissable qui le caractérise et l’empêche d’être coincé dans une posture didactique, lui permet de saisir au mieux des instants, des instincts, des postures au présent, souvent inconséquentes. C’est une sorte de croisement parfait entre American graffiti et Superbad. Et puis là aussi, autre coïncidence troublante avec le film de Clark, c’est une petite fabrique de futures stars (Ben Affleck, Milla Jovovich, Parker Posey ainsi que les deux suscités). Et la bande-son envoie du bois.