La vie des morts.
7.0 Le procédé est sensiblement le même que pour Ecrire, le film étant construit majoritairement de longs plans focalisés sur Marguerite Duras, qui cette fois, entreprend de raconter une émotion qu’elle ne parvient ni à comprendre ni à canaliser. En 1944, quelques jours avant la fin de la seconde guerre mondiale, un avion anglais est abattu par les allemands et se crash dans un arbre, à Vauville, non loin de Trouville. L’homme est veillé par les habitants et enterré dans la foulée dans un jardin aux côtés du cimetière local. Pendant six ans, un vieil homme est venu sur sa tombe puis plus rien. Cette histoire, Duras en a pris connaissance plus tard, lorsqu’elle est venue vivre dans le village. Très vite, cette mort l’a bouleversé. Elle n’a jamais vraiment su l’expliquer. Probablement que l’âge du jeune homme lui rappelait son petit frère, tué par des japonais pendant la guerre du Japon. Elle aurait voulu raconter cette histoire et la filmer mais c’est impossible. Parce qu’on ne peut pas filmer l’évènement. En en parlant, Duras pleure encore. Comme si cette mort condensait toutes les autres, toute la souffrance des hommes et le communisme du sang. Jacquot multiplie alors les plans des entourages : l’école communale, le cimetière, l’église, la tombe, l’arbre fou, l’arbre mort. C’est Jacquot qui filme mais c’est Duras qui le guide, comme à l’époque. Il est redevenu l’assistant, l’espace d’un temps, glissé dans l’histoire contée. La guerre s’est enfuie avec la mort de l’anglais. Elle fait partie du tombeau, au même titre que l’innocence qui avait condamné le jeune homme. Il n’y a rien à comprendre. C’est peut-être cela qui est le plus difficile à admettre.
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