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La dernière maison sur la gauche (The Last House on the Left) – Wes Craven – 1972

dernieremaison_pic4Les bourreaux meurent aussi.

   7.5   Hormis les teenage horrific movie léchés que sont les Scream, Wes Craven aura fait des films sales – Et celui-ci est sans nul doute l’un de ses plus sales. Sa mort me pousse à revenir sinon creuser davantage sa filmographie (dans mon souvenir régulièrement parsemée de nanars pas vraiment affriolants) pour voir si ce que j’avance tient toujours. Il y a en tout cas quelque chose de bien craspec là-dedans, cela même si c’est continuellement détourné par la musique, la contemplation, l’humour absurde et la frénésie de la construction.

     C’est d’abord un montage parallèle qui surprend ici où l’on suit les futures victimes d’un côté, les meurtriers de l’autre – vers un climax d’abomination rarement atteint. Puis le film choisit, vers ses trois quarts, de ne s’intéresser qu’aux bourreaux, les deux victimes ayant trépassées, un peu à la manière du Psychose d’Hitchcock. Son gros délire (un peu à côté de la plaque mais finalement assez représentatif de ce que le film traduit) c’est le parallèle concernant les recherches de police, avec ces deux policiers crétins.

     Ce parti pris (ou cet anti parti pris) est déjà le marqueur d’un cinéma qui abandonnera son radicalisme du film d’horreur primaire qu’il semble pourtant suivre dans les débuts de La dernière maison sur la gauche et poursuivre un peu maladroitement dans La colline a des yeux pour s’orienter vers un cinéma plus mainstream et séducteur. L’absence héroïque et la faculté à brouiller les pistes fait déjà partie de son cinéma – qu’il détournera de la manière la plus jubilatoire qui soit dans sa fameuse saga. En fait, c’est Massacre à la tronçonneuse qui rencontre Laurel & Hardy.

     Ce que j’aime chez Craven c’est qu’à chaque fois il évoque l’Amérique, c’est politiquement sous-jacent, comme Roméro. Chez ce dernier tout se joue dans les rapports de dominations sociétales. Quand l’extérieur s’embrase c’est l’intérieur qui se disloque. Chez Craven, quelque soit sa source, la violence est extrême, insoutenable, amorale. Roméro est un moraliste (non moralisateur) et ces histoires de zombies des paraboles de la société contemporaine. Craven serait celui qui s’en nourrit mais ne s’en servirait qu’à des fins ludiques, grand-guignolesques. Un cinéma cancre.

     La mise en scène, assez informe ici, épouse toute variation d’angles de vues, entre plans d’ensemble et inserts, accueillantes ou horrifiques, longues plages de silence sur un étang, macros sur les feuilles d’un érable avant que ne surgissent les blessures provoquées par la lame d’un couteau, un corps que l’on dénude avant de s’en servir en tant que jouets ou la course effrénée d’une victime qui n’a aucun pouvoir face à cette forêt de la peur – idée magistralement reprise par James Watkins dans Eden Lake.

     Outre son extrême violence (d’un côté comme bientôt de l’autre) et son hallucinante plage sonore, faite de musiques volontiers inadéquates et de stridences en tout genre le film est aussi le portrait d’une jeunesse inconsciente, qui vit à sa manière la guerre du Vietnam sur son sol, où l’information est légion, entre la télévision et la radio, poussant l’attrait pour le crime et les sévices au point de créer un amalgame absurde entre le meurtre et l’héroïsme. Quelque part, oui, c’est un beau film sur la guerre du Vietnam.

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