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Archives pour octobre 2015

Sense8 – Saison 1 – Netflix – 2015

Nomi2What’s going on ?

   9.0   Il s’est passé plein de trucs étranges avec cette série. Déjà, je l’ai lancé tout seul, comme un grand, alors qu’à priori les Wachowski et moi ça fait deux. Le pitch y était pour beaucoup. Puis je l’ai volontairement stoppé à mi-saison pour la reprendre aussitôt, cette fois accompagné. C’est la première fois que ça m’arrive. L’envie probablement de retrouver l’effervescence conjugale éprouvée fut un temps devant les six saisons de Lost. Je ne sais pas. J’aurais voulu tout regarder sans m’arrêter – d’autant que Sense8 est un peu faite pour être regarder ainsi – mais je tenais avant tout à la partager. Aussi parce qu’il fallait que j’impose ce déclic, cette initiative à ma partenaire tant ça ne lui disait rien, Cloud Atlas aidant. Et bien pas une seule fois je me suis dit que c’était une mauvaise idée, au contraire, cela m’a permis de réhabiliter d’une part complètement les trois premiers épisodes, absolument magnifiques, mais aussi d’apprécier davantage cette dynamique de l’entonnoir, avec ses lumineuses transitions. Enfin bref, je ne vais pas te faire un dessin, c’est le truc le plus excitant, lumineux, drôle, émouvant vu depuis un moment.

     Si comme moi tu as au départ peu d’atomes crochus avec le cinéma des Wachowski, il va falloir t’accrocher. Parce que franchement, ça vaut le coup. Il y a donc je le disais d’abord trois épisodes difficiles, mais cela dit pas désagréables, devant lesquels il est possible de rester sceptique. Dans le vertige, le mélange des genres, la kyrielle de personnages olé olé – Un acteur mexicain gai, une coréenne calée en kick-boxing, une hackeuse transsexuelle, une islandaise transportant un lourd trauma et d’autres. Un beau catalogue. Mais un catalogue qui prend justement une ampleur logique et dramatique à mesure que le récit central se met en place. C’est fort de café, mais bon, quand on a mangé Cloud Atlas, on est capable de tout encaisser. Justement, Cloud Atlas, parlons-en : Si le pitch semble similaire (une affaire de connexions spirituelles entre plusieurs personnages à travers le monde) Sense8 s’en échappe rapidement autant dans sa construction labyrinthique (des portes qui s’ouvrent sur d’autres, des sons qui en convoquent d’autres, des décors qui se superposent), ce que draine chaque personnage, d’important ou non (Fait rarissime en série, je les apprécie tous pareil ; Il n’y en a pas un que je cherche plus que l’autre) que dans la légèreté qui émane de l’ensemble tout en s’enfonçant dans une noirceur renversante assez inattendue.

     Très vite on se familiarise avec les lieux (Séoul, San Francisco, Londres puis Reykjavik, Nairobi, Mumbaï, Mexico, Berlin et Chicago) ainsi qu’avec le genre qui lui est approprié. De la comédie romantique on passe au thriller d’espionnage, un casse se superpose avec un mariage façon Bollywood. La familiarisation opère très rapidement parce que j’y trouve de l’intérêt somme toute partout, dans tout ce que je vois, dans toutes les connexions, aussi infimes soient-elles au départ (il faut lancer la machine, poser les conditions et faire en sorte que cette nouvelle naissance à huit soit imposante, éreintante, belle et douloureuse). On pourra toujours y voir naïveté et grandiloquence mais on retiendra surtout la générosité de l’ensemble, qui converge peu à peu vers un magma de rencontres et de fusions d’une puissance géniale qui n’a d’égal que l’épaisseur globale, où chaque personnage devient le vecteur de quelque chose de plus grand, une révolution hilarante (« Do I know you ? » demande Will à Lito dans ce dernier épisode qui lui répond « We had sex ! ») et bouleversante (sublime mixture orchestrale des naissances de l’épisode dix) façon huit pour tous à la Lady in the water assez jubilatoire. Peut-être me fallait-il un format série pour accepter, enfin, l’univers Wachowskien.

Leviathan – Lucien Castaing-Taylor & Véréna Paravel – 2013

12115808_10153633512417106_4380523952948892371_nAu cœur de la bête.

   10.0   La citation de Job d’entrée permet de poser autant que d’évacuer un sous-texte mythologique. On entre dans un monstre et on en réchappera dans une heure et demie. Le reste tient du voyage. Avec et contre le Léviathan, mythe ou non. On n’avait jamais vu un truc pareil. C’est le sentiment premier qui domine pendant et au sortir de cet objet colossal, qui plus qu’un documentaire sur un chalutier lâché au cœur de l’océan tient d’une proposition singulière, nouvelle, sorte de poème visuel et sensoriel traversé par des fulgurances horrifiques hors du commun.

     Leviathan n’est que plongées. Au sein de cuves qui dégoulinent de sang, dans les remous accompagné par les mouettes, côtoyant là d’immenses et terrifiants cirées rouges plein de flotte, caressant les nuques et tatouages des pécheurs. On décèle quelques voix mais le magma sonore provoqué par les machines les rend inaudibles. Un moment nous suivons une mouette qui s’invite à bord pour chiper quelques restes, je ne sais par quel miracle (le film en compte tellement) nous nous réfugions dans les plumes de l’animal avant de le laisser regagner les airs. C’est un instant incroyable. Il y a vraiment de la magie dans ce film.

     Le procédé de fabrication est aussi génial que casse-gueule : Une vingtaine de petites caméras sont dispatchées dans le chalutier, accrochées aux pécheurs ou prises dans les filets, installées sur des câbles ou libérées dans les eaux d’une cuve entre les poissons mourants venant cogner l’objectif. Les images sont le résultat d’un montage fascinant, deux mois en mer au large des côtes de New Bedford uniquement saisies dans la nuit, bleutée ou charbonneuse.

     Nuit éternelle où se fait ici le ramassage et l’ouverture des coquillages qui devient quelque chose de très méthodique, effréné, robotique. Le cauchemar se poursuit. Et un bourdonnement chaotique reste en continu, envahissant la piste son, secoué parfois par des cris indistincts, stridences en tout genre, grondement de machines, échappées liquides. Souvent, le bateau parait immense, parfois, comme lors de ce curieux plan de plongée, il est minuscule.

     Et il y a deux des plus beaux accouplements de séquences monstrueuses vu depuis longtemps : Sur le pont du bateau, deux hommes encapuchonnés découpent la raie, séparant les ailes de l’os central de façon mécanique, avec crochet dans une main, machette dans l’autre. Puis nous échouons avec les rebuts sur un sol trempé et vacillant avant d’assister, pendu sur la coque, à une cascade de viscères déversées en continu dans l’océan.

     Il y a aussi cet instant où l’objectif est balloté devant la proue du chalutier, véritable monstre vert voguant à travers de gigantesques murs d’eau. On ne fait que plonger et ressortir jusqu’à ce fondu étrange où le plan s’aventure dans une douche de pécheur avant d’en sortir par des fonds marins sidérants (Où sommes-nous, bons sang ?) puis de se laisser embarquer par un immense filet de pêche, qui prend soudainement l’aspect d’un grand masque sorcier gobant les coquillages et les étoiles de mer.

     Et là un plan interminable dans une cabine de repos sur un pécheur en train de s’endormir et l’on se balance soudain, au gré du mouvement du ressac, au ralenti comme dans un rêve, avant de plonger dans un dernier voyage, abstrait, sans ciel, sans fond, puis dans les airs parmi les mouettes. Le dernier acte et ses multiples aléas vertigineux est un truc fou, absolument fou. On voudrait que ça dure une éternité. Au point d’être ému par ce dernier vol de mouettes, au loin, à peine visible, post générique. L’adieu du monstre. De terreur et d’extase.

     On ne s’en remet pas si facilement. A tel point que je m’y suis replongé le lendemain, aussi compulsivement que le film peut l’être, afin de l’apprécier autrement, de le sentir à nouveau, redécouvrir un peu encore de sa folie, de cet ahurissant magma qu’il contient et crache sans scrupule. Il m’aura finalement manqué qu’une seule chose pour le vivre à sa peine mesure : le grand écran. Je remercie Arte – Une fois de plus – pour cette diffusion providentielle mais je garderai éternellement le regret de ne pas avoir fait cette puissante rencontre en salle, je n’ose imaginer le choc cosmique que ça doit être.

Un moment d’égarement – Claude Berri – 1977

un-moment-d-egarement_69293_2Pères et filles.

   7.5   C’est un film de son époque, post Valseuses, pré Max Pécas. Je grossis. Lanoux et Marielle, la quarantaine passée, jouent deux potes de toujours, en vacances sur la côte d’Azur avec leur fille respective, deux adolescentes de dix-sept ans. Il faut déjà dire comment Berri filme Saint-Tropez, parvenant à saisir sa vulgarité et son désoeuvrement sans jamais tomber dans la facilité paillettes et carte postale. Du coup c’est plus intérieur, intime. Ce n’est pas non plus La collectionneuse ni La piscine mais dans la respiration, quelque chose s’en approche. C’est d’abord une ambiance nichons à l’air, crème solaire entre potes, gitanes, chemises blanches et câlins pères/filles. On dort, on nage, on sieste, on danse. Mais c’est un drôle de moment, trop tôt et tard à la fois, où les deux potes n’ont pas conscience des bouleversements, parce que l’un est séparé depuis longtemps et que l’autre est en ménage libre (chacun part en vacances de son côté) qui bat de l’aile (coups de téléphone virulents). C’est léger même si les hommes ruminent leur solitude. C’est aérien même si les découcheries à répétition des filles les cloîtrent dans leurs angoisses. Et puis hop, dans un élan d’excitation confuse, l’un d’eux couche avec la fille de l’autre, laquelle tombe amoureuse de lui. Beau bordel. Lanoux et Marielle sont prodigieux. Déjà parce qu’ils parviennent sans mal à traduire à l’écran les années d’amitié partagées. Ensuite car occupant sans cesse le plan ils pourraient être tenté d’en exagérer mais non, ils tiennent la barque avec beaucoup de retenue et de tendresse et suffisamment intelligemment pour ne pas noyer les deux jeunes rôles féminins. Reste donc un récit bien casse-gueule, parfois gênant, sur l’évolution des moeurs, les maturités soudaines et la libération sexuelle mais traité avec une infinie subtilité.

Partie de campagne – Jean Renoir – 1936

2. Partie de Campagne – Jean Renoir - 1936La fille de l’eau.

   9.0   Renoir adapte Une partie de campagne, la nouvelle de Maupassant, dans ce qui constituera l’une de ses plus belles oeuvres, aussi inachevée soit-elle. Renoir jouera le patron de l’auberge dans laquelle attendent les deux canotiers, Rodolphe et Henri. Il est accompagné en cuisine de Marguerite Renoir, sa femme d’alors. Si la mention tient apparemment de l’anecdote, elle révèle beaucoup sur la dimension de liberté et d’audace qui plane en permanence sur le film. On tourne sur la rive du Loing, non loin de Marlotte au sud de la forêt de Fontainebleau où Jean Renoir vit depuis plus de dix ans. Une séquence de balançoire convoque, sans pour autant en répéter les motifs formels, un célèbre tableau de Renoir père. Si le naturalisme d’Auguste semble en effet proche de Partie de campagne, il y a suffisamment d’éléments cinématographiques pour que ça ne ressemble en rien à de l’art pictural. On est en terrain familier pourtant Renoir s’apprête à briser tout ce qu’il peut briser.

     La famille Dufour, petits bourgeois parisiens, viennent prendre l’air à la campagne. Si les hommes (père et gendre) n’ont d’intérêt que pour la pêche, les femmes (mère et fille) communient avec la nature, avant de se laisser séduire par deux dandys. Et le film adopte d’abord une sorte de montage parallèle, comme s’il tenait à nous familiariser avec nos quatre éléments centraux avant de les faire entrer en collision. Rodolphe et Henri se les partagent avant de les séduire, enfin disons que Rodolphe, nettement plus entreprenant qu’Henri, distribue les cartes. Mais plus tard, au moment de les embarquer sur leur yole respective, les attributions sont inversées comme si quelque chose de plus fort et désordonné qu’une banale excursion bucolique couvait.

     Ce sera finalement une journée d’été où Henriette rencontrera fugacement son premier et dernier amour, avant de se marier, comme promis, avec le pas fute-fute Anatole. D’un voyage pastoral enchanteur sous forme de poème élégiaque – questionner le sens de la vie, glisser sur la rivière, se courber sous les branches d’un arbre – le film s’ouvre sur le tragique où le temps a tout emporté, où le soleil s’est fondu en pluie. On raconte que le tournage fut interrompu pour cause d’intempéries. Et jamais repris – Mésentente de l’équipe, problème budgétaire puis arrivée de la guerre. C’est l’histoire d’un tournage qui raconte le récit. Ou l’inverse. Mais Renoir demeure assez loin d’une quelconque dimension théorique (autant qu’il n’entre pour ainsi dire pas dans la satire) ainsi Partie de campagne devient mélodrame somptueux, tout entier contenu dans un regard caméra bouleversant et une dérive du regard happé dans les méandres d’une météorologie hostile. Images vides et pleines à la fois, que l’on doit à Claude Renoir, chef op et neveu de Jean, qui frustré de n’avoir pu filmer les scènes manquantes faute de lumière, est allé capter cette curieuse et poignante circonstance automnale.

Aurora – Cristi Puiu – 2012

Article_89_photo_0Ritournelle macabre.

   8.5   Aurora constituait le maillon manquant dans ma découverte de cette nouvelle vague roumaine émergée il y a une petite dizaine d’année avec notamment 12h08 à l’est de Bucarest (Corneliu Porumboiu), La mort de Dante Lazarescu (du même Cristi Puiu, déjà) et 4 mois, 3 semaines et 2 jours (De Cristian Mungiu, palme d’or à Cannes). Un courant qui s’est depuis d’ailleurs quelque peu essoufflé.

     A mes yeux, Aurora répond aux sublimes Mardi après noël et Policier adjectif, dans le fond comme dans la forme, même s’il me touche un peu moins, la faute essentiellement à un parti pris plus rêche et plus osé. C’était l’autopsie d’un couple en crise dans l’un, le quotidien d’un homme exerçant son métier dans l’autre, c’est ici l’errance d’un type dont on ne connaît rien, si ce n’est qu’il trimballe, outre une démarche chancelante et un regard d’une noirceur terrible, un fusil de chasse et s’apprête à s’en servir.

     C’est un peu le film ultime du courant, son point de rupture comme pouvait l’être Jeanne Dielman dans le cinéma de Chantal Akerman, avant qu’elle ne se jette dans News from home. Aurora c’est donc trois heures de dissection méthodique des actions d’un homme (Joué par le réalisateur lui-même) qui erre dans Bucarest, étudie sa traversée, hésite, se cache, se reprend tout en ayant en tête un objectif bien précis. A moins qu’il ne se soit levé un matin avec ça. Rien n’est précisé. On avance à tâtons à ses côtés. On ne sait d’abord pas pourquoi on le suit lui. Puis on croit qu’il s’en va vers son suicide. Avant de comprendre qu’il est en croisade meurtrière.

     On obtiendra peu de réponses ou alors il faudra se les construire. Cette abolition totale des repères crée une sensation de vertige ahurissante, sitôt que l’on accepte le voyage. J’ai beaucoup pensé à un film de Haneke, 71 fragments d’une chronologie du hasard. C’est une somme de gestes et rien d’autre. Une plongée terrifiante dans un cerveau (qui n’est autre que celui d’une société) malade. Troublant et fort.

Fear the walking dead – Saison 1 – AMC – 2015

30Dawn of the dead.

   5.0   C’est pas mal. La bonne idée étant d’avoir situé le récit au moment des premières transformations de manière à se détacher de la série mère qui s’ouvrait d’emblée dans une ambiance apocalyptique. L’heure n’est pas encore à l’acceptation, la résignation et la conscience de l’ampleur cauchemardesque à venir. Les malades sont d’abord des cas isolés. Les quarantaines sont de sortie. Le fait de connaître les éléments du futur nous place dans une situation complice, un peu trop rassurante. Si les personnages étaient suffisamment bien écrits et nuancés et leurs histoires denses et travaillées cela suffirait à maintenir une angoisse latente mais ce n’est pas le cas. Beaucoup ont souvent critiqué la série d’origine sur ce point, mais que faut-il penser ici ? C’est d’une platitude folle, désincarnée. Les virages censés être puissants ne le sont pas – Ce final mal fichu par exemple. Allez je sauve cet instant sidérant où l’on aperçoit chez les voisins le père de famille dévorer tout le monde. La séquence est lointaine, pas très claire et tant mieux, mais l’idée suffit dans son désordre à être terrifiante. Cette première saison ressemble donc beaucoup à l’inégale première saison de The Walking dead. Six épisodes je pense que c’est peu pour un genre, qui demande à investir le cadre, le temps, la période, en l’occurrence ici celle de calme avant la tempête. Tout va trop vite. On se retrouve en fin de saison dans une situation finalement similaire à l’ouverture de The walking dead : Mutisme gouvernemental, armée désertée, grandes villes envahies par les zombies. Pour une série qui se gausse d’être le spin off pré walkers j’ai bien peur qu’on ne retombe très vite dans un schéma plus attendu. Plus attendu parce que je ne vois pas trop ce qu’on peut produire en marge de la série de base, dans une temporalité proche, tant il me semble difficile de multiplier les moyens de survie dans un monde de morts vivants, à mon humble avis. Bref, je ne vois pas trop ce que la suite peut nous proposer autre qu’un The walking dead 2.0 mais je ne demande qu’à être surpris. Quinze épisodes dans la saison suivante paraît-il. Y a de la matière apparemment, c’est bien.

La nuit du carrefour – Jean Renoir – 1932

sans-titreExtérieur, nuit.

   4.5   Renoir adapte Simenon, il s’agit d’ailleurs de la première apparition de Maigret au cinéma, avant Préjean, Simon, Gabin, entre autre. Le rôle est pour Pierre Renoir, le frère de Jean. La famille, quoi. Mais bon, qu’a bien pu attirer le cinéaste là-dedans ? Ça semble tellement loin de son style, de son éthique de cinéma. Qu’importe, toute la mise en place et notamment la mise en scène de ce fameux carrefour est excellente. Renoir y installe une super ambiance de crissements de pneus, de klaxon, de coups de freins, il en fait un lieu très mystérieux, dangereux et largement cinégénique. Il se perd ensuite dans un récit confus jusqu’à sa résolution. On raconte que des bobines du film ont disparus, on raconte aussi que Renoir était bourré sur le tournage du matin au soir. Il en résulte un truc assez informe, dont on se lasse assez vite, regardable mais jamais véritablement passionnant. Passé relativement inaperçu lors de sa sortie, entre La chienne et Boudu sauvé des eaux, le film ne doit sa réévaluation, quelques décennies plus tard, à des aficionados aguerris, notamment lorsque Godard en parle comme du plus grand film policier français. Mouai.

Chotard & Cie – Jean Renoir – 1933

chotard-cie-largePetit théâtre.

   5.0   Un Renoir mineur qui pointe son nez juste après Boudu sauvé des eaux et pourrait être vu comme l’incantation un peu pâle d’un artiste se moquant de la médiocrité bourgeoise – avec toute la grâce/magie Renoirienne, cela va de soi – en l’occurrence un épicier excessivement porté sur le labeur et la réussite financière. C’est un film un peu tiède pur ne pas être anecdotique même si la ferveur avec laquelle il emballe tout cela, permet de contrer l’ennui. Certains rôles sont extrêmes et surjoués. Et ce petit jeu de joutes verbales entre le boutiquier (et son cabotinage marseillais insupportable) angoissé et le poète lunaire (qui est donc finalement son gendre) finit par lasser. Reste quelques idées de réalisation éminemment Renoiriennes à l’image de cette ouverture/fermeture en miroir, en un plan-séquence majestueux ainsi que le point de bascule à mi film (le prix Goncourt) qui intervient autant comme rupture dans l’intrigue que dans la mise en scène. C’est un petit théâtre calibré, boulevardier, pittoresque, qui peine souvent à s’extirper de son modèle : Une pièce, de Roger Ferdinand. Il y a néanmoins certaines séquences annonciatrices du cinéma de Renoir à venir, à l’image de celle du bal travesti.

Les griffes du cauchemar (A Nightmare On Elm Street 3, Dream warriors) – Chuck Russell – 1987

04.-les-griffes-du-cauchemar-a-nightmare-on-elm-street-3-dream-warriors-chuck-russell-1987-1024x576Unconscious dreamscape.

   5.0   Si le précédent volet tenait entièrement à se libérer de l’oeuvre originelle, en évacuant Freddy des rêves pour le plonger vite dans le réel, cet opus, signé Chuck Russell (qui va sortir dans la foulée le chouette The blob) pourrait être la suite directe du film de Wes Craven. Rien d’étonnant en ce sens que ce dernier fait cette fois partie du projet, au niveau du scénario.

     On retrouve donc Nancy, quelques années après les faits de Elm street, devenue conseillère psy, débarquant dans un HP au sein duquel plusieurs adolescents sont en proies à des cauchemars terribles et se suicident en masse. Le fait est que le choix du lieu crée un dispositif particulier. Tout d’abord il y a deux mondes : L’établissement médical et Elm street – notamment la maison de Nancy, que l’on retrouve dans les rêves de Christine (Jeune Patricia Arquette). Ensuite, plus intéressant, le film enferme encore davantage les ados dans leurs cauchemars, jusqu’à accentuer leur solitude et futur sommeil en chambre d’isolement, par exemple.

     Pourtant, Les griffes du cauchemar, par le retour de Nancy, va jouer la carte du film de super héros, un peu. C’est en effet en s’y mettant tous ensembles que les jeunes patients suicidaires vont tenter de combattre Freddy, en arborant une version héroïque d’eux-mêmes dans un monde, certes en l’occurrence plus dangereux mais beaucoup plus libre. La liberté c’est en somme le maître mot instauré par Chuck Russell. A noter par ailleurs, les apparitions savoureuses de Larry Fishburne et Craig Wasson – à qui l’on a offert une scène ouvertement dédiée à Body double.

     Ce troisième opus est plus jouissif, plus foutraque aussi – Pour le pire comme le meilleur (Une fin too much) – dont on retiendra certaines séquences comme les plus belles et délirantes de la saga, à l’image de l’infirmière ou de la télévision. Le film est un cocktail d’effets spéciaux assez brillants, dès l’instant que nous nous trouvons dans la zone de rêve / de Freddy et un agréable récit à tiroirs, agrémentant l’après A nightmare on Elm street autant qu’il continue de construire les origines glauques du tueur du monde de Morphée.

True detective – Saison 2 – HBO – 2015

12118854_10153216402077106_4800106924534309099_nThe war was lost…

   7.0   Comment passer après une merveille pareille ? La saison une de True detective fut un tel raz de marée public et critique, tout le monde ou presque la gratifiant de louanges, remarquant qu’elle fera inévitablement date dans l’univers sériel, qu’on ne pouvait que craindre une suite, d’autant qu’anthologie oblige, ce n’en était pas vraiment une. On change le lieu, on change les personnages, les acteurs. Table rase absolue. Il fallait l’admettre et cela prend du temps.

     J’étais le premier à me plaindre. Tout simplement parce que ce temps de réadaptation est aussi celui que cette saison choisit pour balancer un récit confus, pas super stimulant et à priori pas forcément original. De menus soubresauts ci et là parviennent à nous tenir en haleine mais ça ne prend pas vraiment : On se fiche de chacun des personnages, on se fiche de l’intrigue et on se perd dans le soleil aride californien. Rust & Marty nous manquent, le mystère du Yellow king et la moiteur de la Louisiane aussi. Bref, c’est pas gagné. Le deuil se poursuit.

     Pourtant, un truc se passe. On oublie nos premières amours et on accepte de faire une nouvelle rencontre. Nic Pizzolato fait de même : nombreux indices montrent qu’il doit lui aussi se défaire d’une telle emprise, d’un bébé qu’on a d’emblée érigé en perfection, afin de raconter autre chose, autrement. C’est d’abord son Los Angeles qui fascine. Ses immenses routes qui se croisent, son industrialisation cauchemardesque, ses bars vides, les chansons de Lera Lynn et cette ambiance sordide, sans cohésion, aussi bien chez les flics que chez les truands.

     Il y a quelque chose de poisseux qui s’avère bientôt hypnotique, provenant autant du climat que de ce qui caractérise chaque personnage, qui transporte ses propres cadavres. On doute toujours mais on y est entré. Il faut Colin Farell, Rachel McAdams, Taylor Kitch et Vince Vaughn. Trois flics au rebus, aussi bien d’un point de vue intime que professionnel et un bad guy, bientôt trahi. Quatre beaux personnages s’enfonçant dans le néant, qui pourraient prendre la tangente mais préfèrent faire le ménage.

     J’ai lu des trucs peu reluisants à l’égard de cette deuxième saison, des choses complètement disproportionnées : Naufrage, ridicule, incohérent, vide. Je ne comprends pas trop. Si ce sont les mots de ceux qui ne sont pas allé jusqu’au bout des huit épisodes, j’imagine qu’ils sont le résultat de leur ennui et de leur frustration. Quelque part, je partage cela tant je trouve le début raté. Peu aimable. Mais si l’on s’accroche un peu, il me semble que son pouvoir de fascination, son magnétisme et son intensité dramatique finissent par l’emporter. Et puis parvenir à boucler cette storyline avec autant d’élégance, franchement chapeau. Et puis la mise en scène est top, quoi.

     Bref, les trois derniers épisodes effacent les déceptions offertes par les cinq premiers. En une scène, parfois seulement un dialogue ou ailleurs une fusillade. Ça a finalement vraiment de la gueule. Et même si on regrette un démarrage laborieux ou tout du moins peu accrocheur, on se souvient finalement, au sortir d’un épisode final (d’1h26) terrassant, que la série a simplement choisi de faire autrement, d’adopter une construction autre, des ellipses différentes, une respiration nouvelle. Si bien qu’elle a réussi le plus dur : Nous faire oublier qu’elle passait après la saison une.

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silencio


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