“Whatever you do… don’t fall asleep.”
7.5 “One, two, Freddy’s coming for you. / Three, four, better lock your door. / Five, six, grab your crucifix. / Seven, eight, gonna stay up late. / Nine, ten, never sleep again.”
C’est la comptine (pas vraiment) enfantine qui accompagne le film à plusieurs reprises. Assez représentatif du climat global. Bref. Purée ce que ça fait du bien ! Alors Ok, les mauvaises langues diront qu’il m’en fallait peu après la montagne de nanars encaissés post La colline a des yeux. C’est vrai. N’empêche, j’avais oublié à quel point c’est excellent.
Déjà, c’est un super film sur la jeunesse de son époque. Un peu à l’image de ce que sera Scream douze ans plus tard. Et puis le postulat est absolument génial. Craven a créé un monstre devenu véritable icone : Brûlé, ganté, grossier (Les croque-mitaines sont souvent mutiques) et armés de lames de couteau à la place des doigts. La particularité de cet ancien tueur d’enfants est d’attaquer ses proies dans leur sommeil. Son mobile, se venger de ses bourreaux vingt ans après avoir subi leur lynchage pyromane, en s’attaquant à leurs progénitures.
Dans un prologue / générique efficace, la résurrection de Freddy prend vie à l’intérieur d’une chaufferie, dans un trip qui rappelle quelque peu les ouvertures de giallo, ambiance morbide, cheap et caméra subjective à l’appui. A l’image des expérimentations les plus folles de Dario Argento, la première partie de Nightmare on Elm street est ce que Craven aura offert de plus fou depuis La dernière maison sur la gauche. Haut la main.
Le film s’ouvre sur le rêve d’une fille, Tina, dans lequel elle se fait poursuivre et trucider par un type à la tronche cramée. Elle se réveille de ce rêve un peu trop réel, avec une partie de sa chemise de nuit déchirée en quatre endroits. Le lendemain soir, ses amis acceptent de passer la nuit à ses côtés, tant elle est effrayée. Evidemment, il y a déjà deux mondes : Les parents, relativement absents et/ou portant leur propre croix (j’y reviens) et les enfants, laissés pour compte. Scream, ce sera pareil.
Chacun de ses amis réalise finalement, mais sans le faire partager ouvertement, qu’il a fait un rêve similaire pour ne pas dire identique au sien. Le soir même, le petit ami d’ordinaire pas invité, débarque, la tension retombe, ça baise à tout va mais dans la foulée de leur endormissement, la jeune femme est attaquée une seconde fois. Ce rêve qui lui sera cette fois fatal est découpé en deux parties. Nous entrons d’abord à ses côtés avant de le quitter au moment de la mise à mort.
Nous sommes alors les yeux de son petit ami, terrifié et impuissant face à la violence abstraite qui s’inscrit sous ses yeux. Tina est saignée puis ballottée de haut en bas, sur les murs et le plafond, avant de tomber raide morte sur le lit conjugal d’occasion qui n’est autre que celui des parents. Difficile de faire plus auto référencé dans l’ouverture de Scream (La mort de Casey Baker dans la demeure parentale) d’autant que dans le désormais culte appel téléphonique qui ouvrait le film, on apprenait que le film d’horreur préféré du tueur n’était autre que ce Nightmare on Elm street.
Le film est alors forcé de changer d’héroïne principale. On suivra maintenant Nancy, la meilleure amie de Tina pendant tout le reste du film. Mais comment se débarrasser d’un type qui nous attaque dans notre sommeil ? Dilemme. Nancy va d’abord tenter de ne plus dormir. Jusqu’à prendre des cachets. Mais elle finit tout de même par piquer du nez dans son bain, dans une séquence incroyable, devenue culte. Puis on la fera entrer en observation dans un institut psychiatrique spécialisé dans les troubles du sommeil où l’on examinera la force de son rêve, qui révélera une puissance unique, duquel elle rapportera in extremis le chapeau de Freddy. Avant de se décider à agir et tenter de ramener le psychopathe dans la réalité en espérant se faire réveiller par son petit ami (joué par un Johnny Depp qui débute, et plutôt bien d’ailleurs ; On se rappellera de sa mort : Lit/Aspiration/Geyser de sang) pile au bon moment, juste avant de se faire trucider. C’est presque un Inception horrifique vingt-cinq ans plus tôt. Je pense à tout ce moment où Nancy regarde sa montre, à l’intérieur de son rêve et espère ne pas en revenir bredouille à l’instant où son réveil sonnera.
Les griffes de la nuit est surtout en filigrane un riche portrait de famille disloquée, avec un père flic toujours absent et une mère alcoolique. Il y a quelque chose d’assez fort là-dedans, dans la représentation familiale de l’époque Reaganienne. Bon et au delà de sa dimension psychanalytique, sur laquelle on pourrait s’étirer des heures, il faut surtout signaler combien le film fonctionne en tant que film de genre, quasi prototype, cela même si ses effets ont vieilli et si son final s’avère un peu trop abracadabrant. Quoiqu’il en soit, je reste assez client de la toute fin, parait-il qu’elle a été rajoutée par la production pour orienter vers les suites mais je l’aime bien. Je ne situe plus les frontières entre le rêve et la réalité, ça me plait.