L’absence de la mère.
6.5 J’attendais quasi autant de Trier que de Muntean après leurs premiers films étincelants. Et je suis allé voir leur nouveau bébé le même soir. J’ai préféré le Trier même si là aussi je ne pense pas que ça me marquera outre mesure. Reste qu’il a une vraie personnalité et je trouve ses partis pris assez puissants : La construction dispatchée d’une part, ainsi que sa façon de scruter la famille, éclatée et en deuil. Voire certains détachements un peu fous comme la scène de mon photogramme, j’aime bien qu’elle s’ouvre sur un plan de pom pom grils dans le ciel bleu. Ou plus simplement toute la discussion dans la chambre avec la lecture (qui m’a rappelé l’ouverture de Oslo 31 août). Il y a du Van Sant chez Trier. Plus arty mais quand même. La scène du pipi, par exemple, c’est un peu ma limite. Je trouve toute cette scène géniale dans sa construction mais je trouve dommage qu’il filme le pipi. C’est pas grand chose mais ça me gêne car je sais ce qu’il regarde, je n’ai pas besoin de ce plan. Après je pense surtout que c’est un plan de coupe pour ne pas demander à l’acteur de le jouer directement car ça doit être super dur à jouer. Du coup on a direct ses discrètes larmes dans la foulée et c’est très bien c’est vrai. Mais ce n’est pas grand-chose hein c’est juste que ça illustre assez ce qui peut parfois me gêner dans le cinéma de Trier, un peu comme pouvait me gêner le plan fixe final en recul discret, un peu trop calculé, de Anders dans Oslo.
Après je crois que le film peut se passer de mille choses aussi. J’aime moins ce qu’il capte des adultes. Notamment Hupert. J’aurais aimé que le film ne cesse d’en parler sans qu’on la voie, ou bien seulement dans les moments les plus anodins comme celui sublime où elle et son fils se regardent dans le miroir. Tout se joue chez les jeunes à mes yeux, aussi bien chez le personnage de Jesse Eisenberg qui appréhende difficilement sa récente paternité que le jeune Devin Druid (qui jouait Louie jeune dans la Série Louie) plongé en pleine dépression adolescente. Tous deux sont géniaux. Vraiment un pur film de fantôme complètement fantomatique, qui ne réussit pas tout mais tente autre chose : Tout éclater sans forcément tout ré imbriquer (Coucou Inarritu). Et je suis archi fan de l’ouverture. A ce moment-là je me suis dis que Trier allait mieux que pour Oslo. Puis ensuite ça ne parle plus que de suicide donc ça ne va pas si bien.
Je suis toujours très curieux de voir où le cinéma de Joachim Trier va atterrir. Il y a un climat tragique et désespéré dans son cinéma qui est toujours percé par des purs moments de grâce assez sublimes. J’aime beaucoup que son cinéma ne soit pas unilatéral en fait. Dans Oslo, Anders traînait son mal être chez des connaissances qui traînaient le leur, même ceux qui avait une famille, des enfants. C’est pareil ici. Le personnage joué par Eisenberg m’a beaucoup ému, sans doute aussi parce qu’il est plus proche de moi que ne peut l’être son petit frère. Et puis j’adore ce thème du retour, des deux mondes. Sitot qu’il retrouve celui de son enfance chez son père et ce bien que tout ait changé, sa sérénité et son bonheur forcés disparaissent. Le retour vers l’ex c’est quelque chose que le film traite divinement bien je trouve. C’est attendu mais surprenant car ce sont les conséquences de deux impasses : du deuil et de la peur de grandir.
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