« Mars will come to fear my botany powers »
6.5 Je pense qu’il faut vraiment prendre ça comme une comédie dans l’espace ; une mission de sauvetage amusante, un peu ringarde, avec bouffées d’héroïsme et charme rétro que cela engendre. A ce niveau l’exercice est vraiment réussi. C’est un défilé de rebondissements où chaque problème s’ouvre sur un autre, chaque solution aussi éphémère qu’illusoire appelle la suivante, jusqu’à trouver la bonne combinaison dans cette infinité de paliers improbables à franchir et terminer le voyage par un happy-end programmé.
Comment ne pas mourir de faim en restant seul sur Mars ? On fait pousser des patates dans son propre caca. Comment ne pas abandonner après l’explosion de ses récoltes ? Une bâche fera l’affaire. Comment se faire comprendre avec des captations circulaires insuffisantes pour utiliser l’alphabet ? Système hexadécimal. Comment gagner du temps pour retourner sur Mars ? On utilise la force gravitationnelle. Comment se propulser à la bonne vitesse dans l’espace ? Une explosion de Sas et hop. Comment réduire de trois-quarts le poids d’une navette spatiale ? On remplace son nez par une bâche, encore elle. Ça fait un peu nanar de luxe raconté ainsi mais je le répète, le film n’a pas plus d’ambition que de se faire son propre Il était une fois l’Espace, version pop corn.
Le film n’est pas ouvertement construit ainsi mais il reprend les codes des films catastrophes de la vieille école. Et il le fait bien. On ne voit pas le temps passé. Il est limpide malgré le magma de jargon scientifique et physique qu’il nous assène – puisqu’il sait le rendre concret – et malgré le montage parallèle rébarbatif NASA/MARS qu’on doit ingurgiter en permanence. Rien n’est pesant, tout passe tranquille. Il utilise sa matière comique sans trop de lourdeur, autant dans la coolitude affichée de Matt Damon (Le mec est seul sur une autre planète pendant des mois, mais ça va ; il vanne, s’auto-vanne, c’est cool) que dans les interactions diverses entre chaque entités qui permettent de faire avancer le récit. Tout est utile. Chaque scène appelle la suivante.
C’est propre, c’est beau, c’est du divertissement haut de gamme un peu égocentrique mais pas trop (les chinois, alliés d’occasion, partagent la gloire), qui refuse de se prendre au sérieux en balançant régulièrement de la disco bien grasse qui fait toutefois partie du récit puisqu’il s’agit du seul héritage musical récupéré du commandant Lewis (Jessica Chastain) par Watney (Matt Damon, donc). Climax tordant lors du générique final, je ne révèle rien. Mais je préviens, il faut régulièrement se coltiner du Abba, du Donna Summer. Oui, il faut être solide. Mais ça fait partie du jeu.
A part ça c’est aussi un défilé de stars sur le retour ou non qu’il faudrait énoncer mais l’envie me manque. Je salue surtout le vent de fraîcheur qui traverse le film. Très peu spectaculaire mais toujours stimulant dans sa robinsonnade en pantoufle. Un cinéaste plus sérieux que Scott en aurait fait un truc brûlant et poussiéreux, lui choisit douceur et volupté. Un cinéma décontracte, utopique, solidaire, avec zéro méchant, toujours positif malgré la pelleté d’obstacles à contourner. Feel good movie à la gratuité requinquante. Futur « film du dimanche soir » idéal, en somme.