Top 20 Albums 2015

     Riche année musicale une fois encore. Ecouté une petite centaine d’albums, en boucle (Beach House, Sufjan Stevens) ou en souffrance (Jarre, Moroder, Strasbourg) dont voici mes vingt préférés, au sein desquels se détachent assez clairement un winner, suivi de cinq merveilles ex-aequo. Ravi de sortir ces 20-là, c’est moi tout craché.

01.-beach-house-depression-cherry-1024x1024Beach House – Depression cherry

     On pourrait se contenter de n’y voir qu’un remake / prolongement du Treasure de Cocteau Twins. C’est vrai. On peut aussi être pris dans un tourbillon émotionnel tel qu’il en devient l’issue parfaite, sublime des deux précédents albums aussi étincelants et inégaux l’un que l’autre. Depression cherry est en effet à Beach House ce que Treasure était à Cocteau Twins : Son chef d’œuvre ultime. Une bombe mélancolique sans égal. Qui terrasse par chacune de ses tentatives, chacune de ses envolées. Bloom me touchait moins. Là j’ai l’impresison qu’ils renouent avec Tean dream, en plus beau, plus cohérent.

Africa Express presents… Terry Riley’s in C Mali

     Ou l’incontournable reprise du In C de Terry Riley, pièce minimaliste majeure de 1964. Africa Express, constitué d’une dizaine de musiciens maliens (joueurs de kora, soukou, flute, djembe, balafons…) nous embarque dans un morceau de quarante minutes, variant finement couleurs et tonalités, dans une danse en spirale comme échappée d’un film de Rouch, boucles infinies d’une beauté sidérale à faire danser les cadavres.

Julia Holter – Have you in my wilderness

     Dans la continuité magnifique de Loud City Song, Julia Holter parvient à l’instar de Beach House à propulser son génie en véritable art mémorial et contemplatif. Plus magnétique, plus pop, moins impénétrable et donc plus vulnérable que ses premières tentatives, la jeune californienne s’ouvre à une élégance émotive d’une splendeur sans nom, quelque part entre Nico et Dylan, clavecin à l’appui. C’est un phénomène. Une songwritrice au talent hallucinant.

Colin Stetson and Sarah Neufeld – Never Were The Way She Was

     C’est une histoire de saxo et de violon dans ce qu’ils ont de plus frêle et cinglant, dans ce qu’ils apportent de plus ténébreux à l’image de cette intro où si le premier semble s’extirper des eaux, l’autre le rejoint à ses côtés et lui imprime sa tonalité mélancolique ; ou plus loin dans ce merveilleux et crépusculaire morceau éponyme. Sans parler de In the vespers, tout droit sorti du Different Trains de Steve Reich. Et parfois, des voix résonnent ici et là, s’allient aux effluves de violons à peine audibles au sein d’un vacarme de cuivres déchirant.

Född död – Studie I närhet, längtan och besvikelse

     On peut grossièrement parlant situé ça dans un courant dark wave, quelque part entre du Tropic of Cancer sous synthé et du Cocteau Twins minimal. Album ensorcelant, qu’il soit ou non accompagné de la voix rocheuse de SARS, qui t’attire dans ses déserts scandinaves, te perd dans ses forêts enneigées et te laisse te noyer dans la nuit froide et lunaire. 33 minutes seulement suffisent aux synthés de Varg pour engloutir son auditeur dans des nappes cotonneuses dans lesquelles on aime se lover, malgré cette inquiétude tenace, chère à l’hypnose. Album hivernal ultime.

Sufjan Stevens – Carrie & Lowell

     Tout a été plus ou moins dit sur cette merveille, l’incontournable de l’année, classique avant l’heure. Moi qui me délectais de voir Sufjan Stevens investir le monde psyché qu’il avait bâti avec le superbe The age of Adz, le voilà qu’il arrive avec ce bijou d’une douceur inouï, traversé par la grâce. Fourth of july, morceau de l’année.

LAND – Anoxia

     Sorte de cousin éloigné de Shifted, Lawrence English et Tzolk’in, une fusion qui aurait mal tourné, un mélange nocif, à la fois caverneux et tribal, tout en percus improbables, apparitions métalliques et constructions labyrinthiques. Le doublé Metamorphosis / Seconds m’a complètement retourné par son génie rythmique et suffocant. Quant au triplé Transition / Anoxia / End zone, avec ses cloches folles, et ses cymbales abandonnées, c’est probablement la plus belle « fermeture de disque » de l’année.

Jim O’Rourke – Simple songs

     On retrouve le O’Rourke pop et traditionnel, chanteur compositeur, celui de Eureka et Insignifiance. Classique ? Oui, ce qui ne veut pas dire simpliste. C’est au contraire un grand disque dense et complexe, un folk en apesanteur, pour planer dans les cordes entre deux disques d’ambient hardcore. C’est un album parfait, d’une élégance précieuse. Et des merveilles comme All your love, j’en écouterais bien tous les jours franchement.

Jasmine Guffond – Yellow Bell

     Ecoute au casque impérative comme peuvent l’être celles de Thomas Köner ou Tim Hecker, le seul moyen pour en apprécier toutes les fines textures, les strates invisibles, les inquiétants crépitements, les soubresauts microscopiques.

Alva Noto – Xerrox Vol.3

     Même en guettant chaque nouveau bébé de Alva Noto, il est parfois délicat d’être au rendez-vous tant le bonhomme est prolifique, seul comme en collaboration. Si prolifique qu’une sortie moins enthousiasmante n’alarme pas puisque l’on se persuade que le prochain, forcément imminent, sera meilleur. Ce volume 3, en plus d’être le plus beau des Xerrox, s’achemine vers une des plus belles réussites de l’allemand tout court. Certains morceaux dont le sublimissime Isola (Titre aérien de l’année ?) semble être le chef de file sont touchés par la grâce. Un album magnifique donc. Une heure de pure lévitation.

Oren Ambarchi & Jim O’Rourke – Behold

     Disque d’ambient d’une richesse folle, captant l’univers des deux larrons entre fins krautrock de fond et mélodies masquées. Une seule pièce de 42min coupée en deux morceaux qui s’opposent et se complètent. C’est comme si chaque mouvement tentait de s’élever de son côté mais n’y parvenait pas ensemble, créant ainsi une symphonie en attente, hypnotique. Le second morceau en reprend la trame mais les traits fusionnent cette fois, catapultant les discrètes évolutions vers des cimes plus franches et un rythme qui te colle à la peau. Du pur Ambarchi, du pur O’Rourke. Si on aime les deux c’est banco.

Liberez – All tense now lax

     L’ouverture caresse, chatouille, berce. Puis Grateful family débarque avec ses sabots chaussés d’une cadence rugueuse à faire pâlir les plus indus d’entre nous. Album distordu tout en textures violentes, viscérales, traversé par des saillies ambivalentes, des accalmies suspectes, des crescendos flippants (le titre éponyme), des rythmiques carnassières (Grease the axles), des danses suffocantes (How much for your brother) ou des brèches que l’on enfonce avant d’en sortir meurtris. Un goût de lait puis de sang. C’est Coil qui rencontre Swans. C’est donc assez monstrueux.

WSR – Stainless

     Certes ce n’est qu’un 4 titres. Pourtant, j’ai du mal à voir plus créatif et complexe en matière d’électro que cette petite bombe d’à peine vingt minutes, cultivant un espace sonore assez inédit, entre une ouverture modern classical carré, parfaite ouvrant bientôt sur des morphismes rugueux croisant le violoncelle, puis sur la véritable météorite à rythme que constitue No horizon jusque dans ce drone final libérateur aux stridences inouïes. Petit mais grand.

Orso Jessenska – Effacer la mer

     « J’ai plongé dans mes rêves d’émotions oubliées, mais ne reste que cendres et la beauté qui tremble, pourquoi courir après » Une fusion improbable et sublime entre Dominique A et Bertrand Belin imprime ce disque fraternel, lumineux, apaisant. Une voix mise à nu, susurrée, caressée d’un écrin musical tout aussi rêveur, entre guitares discrètes, pianos hypnotiques et ambiances jazz ouatées. Un album tremblant, qui convoque les éléments pour émettre son chant d’espoir et solaire. « Evidemment, l’ombre descend et nous avons perdu du temps, évidemment, l’ombre descend et nous avons perdu du sang ».

Godspeed You ! Black Emperor – Asunder, sweet

     Comme le précédent, c’est une reproduction de morceaux joués live, certes moins intense que leurs débuts fracassants mais ça vaut largement le détour. D’autant que cette fois il y a comme un semblant de virage : Une entrée volontiers dans le drone, débarrassé intégralement des habituels field recordings. J’ai d’abord beaucoup rejeté ce nouvel album, puis je suis allé voir leur concert au Bataclan. Du coup, il a fini par s’imposer, me faire léviter dans ses nuages gras du volume, ses crescendos fantaisistes, ses poussées violentes gorgées d’ivresse. Je suis secrètement persuadé que l’enchainement Asunder, sweet et Piss crowns are trebled est ce qu’ils ont offert de mieux depuis longtemps.

Sidony Box & Gianluca Petrella – Here comes a new challenger

     Si je connais le nantais depuis l’album au chien rose, Pink paradise, que j’aime beaucoup, son comparse tromboniste m’était lui inconnu jusqu’à cette collaboration éclatante. Il y a une construction étonnante dans leur musique, qui peut s’ouvrir dans le calme avant de libérer son atmosphère free jazz qui cogne. Certains ilots de mélodie apparaissent parfois au détour d’une écoute plus attentive que la précédente, l’univers se déploie sans cesse, les couleurs se mélangent. Un album live, cette fois, plus jazz mais plus pop encore doté de deux longs titres foisonnants desquels on entrevoit les rives d’un jazz nouveau, infini, indomptable et ça fait du bien.

Jose Gonzalez – Vestiges & Claws

     Un album d’une élégance folle qui m’aura accompagné toute l’année. Bonbon, passe-partout, classe intégrale. Solaire et pluvieux. C’est de la belle ouvrage comme on dit. A consommer sans modération.

Moon Duo – Shadow of the sun

     Très bel album, dans une mouvance Tame Impala / MGMT (Wilding rappelle beaucoup l’ouverture de Congratulations) assez stimulante, qui n’aurait quoiqu’il en soit pas vraiment sa place ici (inférieur à ses modèles, je pense) s’il n’était doté d’un des plus beau morceaux écoutés (en boucle) cette année, j’ai nommé : In a cloud, sorte de titre tombé du ciel, leur Siberian breaks.

Blanck Mass – Dumb Flesh

     Avec une ouverture pareille « Loam » quasi digne de celle qui ouvrait Street Horrrsing, ce nouvel opus d’une moitié de Fuck Buttons m’avait déjà dans sa poche, en quatre minutes. A l’image de Slow Focus, l’album est relativement inégal, pas suffisamment inspiré pour provoquer le béat de Tarot Sport, mais bordel, tout de même. Quel pied ! Certes moins de boucles enivrantes à faire décoller et nappes de synthés jusqu’à épuisement. Bref, c’est moins sauvage mais toujours aussi torturé si on s’y penche. Les débuts de morceaux laissent parfois circonspects puis déraillent d’un coup à l’image de Cruel sport ou de Detritus, ultime pièce au démarrage bien trash. Dead format flirte avec une électro hype mais nettement plus tarabiscotée ; No lite on se croirait dans une version club d’un film de Carpenter ; Atrophies évoque de loin nos Zombie Zombie d’amour ; Lung réactive un peu de Boards of Canada. Bref, ça n’invente rien mais c’est un chouette album de puriste.

Beach House – Thank your lucky stars

     Un album en ouverture de top et l’autre qui le ferme. L’année Beach House. Je n’attendais pourtant pas grand-chose de celui-ci arrivant quasi dans la foulée de l’autre avec la dure tâche de ne pas faire parenthèse, de ne pas se faire écraser. Surprise d’autant plus grande puisque c’est un superbe album, assez proche de Tean dream, une friandise donc, mais une délicieuse, offrant des miracles comme One thing ou Somewhere tonight. Avant, c’était « Chouette, du Beach House » maintenant c’est « Nom de dieu, Beach House » Mes chouchous.

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