The We and the I.
7.0 Il s’agissait de mon treizième rendez-vous avec l’univers du cinéaste coréen. Treize films, que du bon. Si j’ai manqué quelques uns de ses plus récents – Sunhi, Haewon et les hommes, Matins calmes à Séoul – car il faut dire que Hong n’a jamais été si prolifique, je m’y sens bien, en famille. C’est un cinéma que l’on reconnaît entre mille, tout en subtiles variations d’un film à l’autre. Celui-ci fait le lien parfait avec le précédent, Hill of freedom, en choisissant cette fois une ambiance hivernale. La construction, elle, a plus à voir avec La vierge mise à nu par ses prétendants, non loin d’Une sale histoire, de Jean Eustache : Deux parties de durée similaire, identiques dans leur approche, subissant d’infimes modifications, mais suffisamment significatives pour tout changer. Les répétitions coutumières habitent cette fois le cœur du film, coupé en deux morceaux, qui sont des miroirs déformés suivant les changements qui résident au sein de chacune. C’est comme si HSS avait voulu écrire une histoire de deux manières différentes. Il s’agit dans les deux cas d’une rencontre entre un homme et une femme, lui est un cinéaste (rien d’étonnant si l’on est familier du cinéma de HSS) tandis qu’elle tient un atelier de peinture. Dans la première partie, chacun porte son masque, les échanges sont brefs et désordonnés, jusque dans ce pathétique et stérile repas alcoolisé (On a rarement autant picolé dans un film de Hong Sangsoo, vraiment) qui ne débouche sur rien de probant sinon une vérité cachée qui annihile tout embryon de romance. Dans la seconde, le jeu de séduction est plus franc, donc plus rêche au premier abord. Ham critique les peintures pastel de Heejeong qu’il avait encensé une heure plus tôt ; Il admirait sa créativité tandis qu’elle manque dorénavant d’audace à ses yeux. C’est paradoxalement cette mise à nu des sentiments qui va leur permettre de s’ouvrir honnêtement l’un à l’autre. Si la première partie n’est donc pas facile à apprivoiser justement parce qu’elle manque d’envergure, cocasse et dramatique, lui campé dans une gentillesse lassante, elle dans une douceur effacée, la seconde rachète absolument toute cette apathie et pas seulement qu’au niveau du récit. En effet, le cinéaste change de nombreuses choses, se sépare de quelques scènes, en étire d’autres et plonge l’intégralité de son récit autour de cette relation, quand il ornait la première de séquences plus anodines (L’ouverture à la patinoire, la fermeture à la conférence). Une fois de plus chez Hong, la rencontre opère dans un laps de temps trop court. Ham est arrivé un jour trop tôt pour la présentation de son film, il se repose dans la cour d’un temple et voit apparaître littéralement (Heejeong surgit au détour d’un plan panoramique) la jeune femme, lui parle, l’invite à boire un café. Ses films sont souvent des petites choses en apparence, qui finissent systématiquement par devenir grandes.
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