La fille de l’eau.
5.5 Si l’on retrouve le ton et le charme du cinéma tendre de Betbeder, avec ses correspondances savoureuses, ses ruptures de rythme, ses changements de cap, son humour qui le caractérise, ses partis pris formels, je dois avouer être relativement déçu par ce nouveau bébé. Non pas qu’il se fourvoie ni abandonne cette singularité qui lui est propre mais il me semble qu’il manque une homogénéité, une émotion, une grâce, il me semble aussi que l’on cherche Damien Chapelle plus que les autres. Pas sûr que cela soit dû à la présence d’André Wilms (dont le personnage est le gros n’importe quoi du film ; Le clip de Cosmo c’est d’un goût…Proche de celui que nous avait offert Tellier dans son moins bon album, My god is blue, Cqfd) mais j’ai ressenti la même distance que je peux ressentir devant les films de Kaurismaki. Il y a pourtant ici et là des choses qui me plaisent beaucoup, comme ces trois fragments de présentations de personnages que le film offre un peu à la manière de ces confidences face caméra qui rythmaient son Deux automnes, trois hivers ; Et cette impression que ce sont les personnages qui créent du récit. J’aime aussi le double niveau de récit qui se joue entre ce que vit Antoine (Cantona) et ce qu’il écrit. La récurrence de l’heure Pi. L’île de Groix. La citation de La jetée. La danse finale, aussi, avec sa magnifique chorégraphie de naufragés, sous néons bleus. La musique de Sébastien Tellier (qui accompagne tout le film) qui se love tellement bien dans l’univers de Betbeder. Quant à Vimala Pons, elle a beau faire du Vimala Pons puissance dix (Rêveuse, à contre-temps, l’absence à la fois dans le corps et dans les yeux) elle le fait à merveille. Pourtant et contrairement à celui que le film semble suivre (Siméon, Pierre Rochefort) c’est bien Oscar qui devient cette respiration géniale et insoluble, sorte de Tati qui parle ou de Pierre Richard qui pense. Toutes les séquences autour de son somnambulisme sont géniales ; Et puis j’aime sa rencontre avec Canto. Sa façon de se mettre le pommeau de douche dans la tronche. De craindre de se voir se jeter par la fenêtre. J’ai sensiblement le même coup de foudre pour lui que pour Thomas Scimeca dans Inupiluk. Je crains de garder cela en priorité, de Marie et les naufragés. On verra.