La Reine Margot – Patrice Chéreau – 1994

LA REINE MARGOTDe bruit et du fureur.

   7.5   Je n’aime pas Chéreau ; J’ai sans cesse la désagréable impression qu’il est persuadé de se situer au-dessus de la mêlée, qui sait où il va, mais ne tente véritablement jamais. Je n’aime pas non plus Adjani, encore moins Auteuil, qui représentent à eux seuls ce qui me rebuter dans le jeu à la française, quelque chose d’à la fois grimaçant et accablant, qu’on retrouve aujourd’hui parfois chez Seydoux ou Cluzet. C’est une partie de l’Histoire de France (Les rois de la fin de la Renaissance) avec laquelle je me sens très éloigné. On redoute aussi la partition pieds-dans-le-plat de Goran Bregovic. Et le film dure 2h30. Que dire si ce n’est que j’abordais ça à reculons, en restant poli. Pourtant, passé la séquence de noces en ouverture (Qui intrigue autant qu’elle fait craindre le pire : L’outrance et le ridicule s’y côtoient) j’ai été happé de bout en bout, d’abord dans ces festivités déviantes où la foule crache son nombre dans le plan, puis dans ce dédale monstrueux de sueur et de sang, de violences agonisantes, de clash horrifiques (Le travail sonore est hallucinant) au sein de cette ignominie familiale qui pourrait être une sorte de Game of thrones avant l’heure (Rappelons que le mariage de Marguerite de Valois et Henri de Navarre, union Catholiques/Protestants aussitôt avortée, est surnommé Les Noces Vermeilles, en raison de sa proximité avec le massacre de la St Barthélémy) avec sa kyrielle de personnages impossibles, ces infâmes arrangements et complots, cette expédition de Flandres hors-champ, son obsession de maculer le plan de corps, ruelles sans fond, pièces de château glauques, portes débouchant sur l’horreur. La reine Margot est donc l’adaptation de Dumas et raconte notamment le massacre de la St Barthélémy avec une emprise tragique orchestrale. Virna Lisi est une incroyable Catherine de Médicis, monstre absolu à la figure de cire (La voir là en quasi sosie de Nosferatu aux côtés d’Adjani évoque forcément le remake merveilleux signé Herzog) mais tout le casting est au diapason, et gargantuesque, et éclectique, jugez vous-même : Adjani, Anglade, Argento, Auteuil, Blanc (Dominique), Brialy, Bruni Tedeschi, Colin, De Fougerolles, Douchet, Duclos, Greggory, Lisi, Perez, Salinger, Schroeder, Todeschini. J’en oublie, qu’importe, le plus important est que chacun ait un vrai rôle à jouer, une douleur à crier, un secret à masquer ; ça fait plaisir de voir la mégalomanie arrogante de Chéreau se transformer en une telle folie éphémère et sauvage qui n’a d’autre but que d’alimenter la fresque par un déluge rythmique hors norme et une plongée crépusculaire dans les méandres du Mal où la mort se livre partout, sur un amoncellement de corps tuméfiés envoyés dans des fausses communes ou sur le visage de Charles IX liquéfié de sueur et de larmes de sang par le poison.

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