Publié 28 novembre 2016
dans David Simon, Séries et The Wire
Au-delà des règles.
9.0 J’ai mis le temps avant de me décider à poursuivre (Presque un an) c’est qu’à mon avis j’ai reçu la saison précédente comme électron presque libre, certes dans la continuité de la première mais sans véritable appel à être succédée. C’était une parenthèse Docks et famille Sobotka, parasitée par quelques séquences quartiers et prisons qu’avec le recul je trouve un peu foutraque dans son ensemble. En fait, la vraie suite de la saison Une c’est la Trois. Puisqu’on y retrouve notre équipe sur écoute dans le West Side ainsi que le duo Stringer Bell (plus businessman que jamais) & Avon Barksdale (qui sort de taule), les guerres de territoires, les aléas de la rue, les luttes entre polices. Plus encore qu’avant, la série est tentaculaire à souhait, ouvre des parcelles d’enquêtes superposées à d’autres (L’interférence de l’arme d’officier que Bunk doit retrouver, l’inutile travail de fond de Jimmy pour débusquer les dessous du suicide/assassinat de D’Angelo Barksdale, vu dans la saison précédente), approfondit les hiérarchies et l’histoire des corners (Avec Marlo, Omar, Cutty essentiellement), se penche sur de grands personnages en apparence secondaires : Tommy Carcetti, l’outsider politique (Qu’on pourrait rapprocher de Nick Wasicsko dans la dernière création série de David Simon, Show me a hero) ainsi que le Major Colvin, qui tente son va-tout juste avant la retraite et Cutty, l’ancien homme de main de Barksdale partagé entre le retour dans le milieu et sa réinsertion. Tous trois sont plus que de simples sidekicks. Surtout, cette saison devient brillamment politique (Dans sa bataille pour le leadership municipal, les interactions entre institutions, la création du quartier secret Hamsterdam, véritable junkie town pour contrer la hausse du crime). Saison hors norme donc, pleine comme un œuf, avec des montées inoubliables autant qu’elles sont discrètes. Parmi d’autres : La scène de la terrasse entre Avon & Bell, les deux enfants du ghetto plongés en pleine impasse tragique du fait de leur opposition dans leur vision du gangstérisme ; Avec, forcément, ce qui suit dans l’immeuble en construction. Marqué aussi par l’épisode qui s’ouvre sur la bavure de Prez, la discussion entre Burk et Omar. Le duo Kima / McNulty. Le duo en friche Bubbs / Weeks. Avec cette saison The Wire gagne en amplitude et en complexité. Et The Wire, plus c’est dense et complexe plus c’est passionnant. L’ouverture sur la destruction des tours de Baltimore Ouest annonçait déjà tout : Les lieux sont les mêmes mais tout va changer. Bref, une saison 3 comme la saison 1, mais qui ne lui ressemble finalement pas tant que ça. Chef d’œuvre absolu.
Publié 28 novembre 2016
dans * 730 et Carol Reed
Holy Lime.
9.0 Découvert, enfin, ce classique absolu dans des conditions pas vraiment optimales puisqu’il était tard, j’étais crevé mais je me suis accroché car je trouvais ça génial, mais je me suis endormi bêtement aux deux/tiers, juste après la mort du concierge. Le boulet. Du coup je n’ai pas vu la scène emblématique pivot du sourire d’Orson Welles, mais plus débile encore, lorsque je me suis réveillé à dix minutes de la fin, j’ai regardé, pensant ne pas avoir loupé grand-chose et évidemment je n’ai rien compris. Enfin j’ai compris que j’avais dû manquer un tournant important. Bref, je l’ai revu le lendemain en entier, dans de biens meilleures dispositions et c’était fabuleux. J’appréhende toujours de me lancer dans la découverte de ces films hyper côtés mais là je suis tombé sur un truc qui mérite absolument sa réputation, qui annonce à la fois la grande période hitchcockienne, les labyrinthes parano polanskiens et les grands récits politiques du Nouvel Hollywood type Pakula ou Schlesinger. Le tout dans une photo noir & blanc ahurissante et une construction brillamment orchestrée, avec l’atout Vienne, personnage à part entière. Et j’aime beaucoup tout le côté absurde de la situation initiale : Holly Martins débarque à Vienne pour revoir Harry Lime, un ami qui dit lui avoir trouvé un job mais il apprend à son arrivée que son ami est mort et qu’on est sur le point de lui célébrer ses funérailles. Situation qui s’envenime à l’extrême dès l’instant que le personnage décide de mener sa petite enquête, tel un parfait inconnu, dans un Vienne d’après-guerre divisée en quatre secteurs d’Occupation alliés. Il doit répéter systématiquement son nom à tout le monde (La maîtresse du défunt l’appelant même Harry au lieu d’Holly à plusieurs reprises) et trouver des interprètes pour se faire comprendre en allemand et en russe. La boucle absurde se ferme (presque) sur ce plan (identique au premier) de cette femme revenant des obsèques de son homme, pour la seconde fois. Il y a une douce cruauté, qui est à l’image du personnage de Lime (Un trafiquant de Pénicilline) et permet au film de trouver une dimension singulière où les personnages semblent parfois réversibles, sympathiques et dangereux et où chaque rue renferme sa part d’ombre. La séquence de la grande roue, pour ne citer qu’elle, est un modèle du genre, à la fois posée et extrêmement tendue. A part ça, on ne parle jamais des menus DVD mais celui-ci est sublime, l’un des plus beaux que j’ai pu voir, il annonce tout le film tout en en préservant le mystère et graphiquement c’est une merveille. Comme le film. Bref, claque en deux temps, mais grosse claque quand même. Hâte de me payer le blu ray.