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Archives pour 15 février, 2017

Bang Gang – Eva Husson – 2016

31La grande illusion.

   6.5   Bien qu’on puisse le rapprocher du cinéma de Larry Clark, Bang Gang trouve vite son identité, son rythme. Il y a un vrai regard 2016 sur une jeunesse qui ne trouve pas sa place, rêve d’amour et se libère dans un trip orgiaque, vain, éphémère.

     On est sur la côte Atlantique, dans un bled qui n’est ni précisé par le texte ni par la mise en scène – On reconnaît tout de même Biarritz un moment donné. C’est ici, c’est ailleurs, partout et nulle part. A l’image de cette curieuse affaire, (tirée d’une histoire) vraie sans l’être, allégorique et avortée à peine lancée.

     Un petit groupe d’ados de seize ans profitent de la baraque/piscine des vieux de l’un d’eux pour faire la fête, fumer des pétards et baiser. Ils créent ce qu’ils appelleront les Bang Gang, sorte d’actions sans vérités visant la partouze géante, filmée et balancée en ligne. Le smartphone devient le prolongement de leurs désirs et plaisirs, l’ultime instrument de fantasme avec le porno, il est aussi cet écran qui leur adjoint une identité schizophrène.

     La mise en scène d’Eva Husson est audacieuse, sensuelle et crue, pleine d’allés et venus entre spleen et sexe. Elle ne semble régie par aucune règle, pas même celle du film solaire, tant on semble hors saison, à la fois proche d’un automne à la Simon Werner que d’un été à la Kids. Une voix off s’extirpe puis est oubliée, un point de vue est délaissé pour un autre, des amitiés se croisent. La grande réussite est probablement d’avoir su créer de fortes personnalités tout en y injectant une interchangeabilité forte, celle d’une adolescence faussement groupée, pas vraiment en duo non plus.

     Et si géographiquement le film est très flou, il libère des espaces temporels incongrus ; une réalité quasi parallèle, aux relents fantastiques. Car autour de cette bande d’ados le monde semble se dissoudre dans un chaos de catastrophes ferroviaires. Il y avait déjà cette idée dans le joli 17 filles qui accompagnait ses grossesses d’un curieux univers de crise de pêche.

     Bang Gang est un film sans colonne vertébrale, plein de trous que le film ne suffira pas à remplir, des sentiments incompréhensibles. Ici des parents sont absents, là un gamin s’occupe de son père paraplégique. Certains préfèrent mater les jeux olympiques à la téloche plutôt que rejoindre leur amoureuse, embarquer les hamsters de leur classe plutôt que de les laisser seuls en cage tout le week-end.

     Il n’y a pas que des bonnes idées, il y a notamment une bonne dose de complaisance parfois dans la mise en scène atmosphérique, sa crudité pas trop trash, c’est aussi très évanescent pour marquer vraiment, mais le film est habité par une belles troupe de jeunes comédiens (dont l’acteur qui joue David dans Nocturama, l’actrice qui joue Kimberly dans la saison 5 d’Engrenages) qui ne ressemblent en rien aux comédiens français qu’on a l’habitude de croiser dans d’autres teen movie.

     C’est un film libre et dispersé, qui m’a finalement beaucoup fait penser au Bling Ring de Sofia Coppola. Très chorégraphié, très dansant aussi, il me semble que le film réussit parce qu’il ne cherche aucunement à choquer. Même l’issue, qui a tout pour être glauque et punitive, est très douce, marque une page qui se tourne pour en ouvrir une autre. Bonne surprise. Et réalisatrice à suivre.

Those for Whom It’s Always Complicated – Eva Husson – 2013

30     4.0   Un couple se trouve puis s’éloigne et s’en va se perdre dans la vallée de la mort pour se retrouver. Une femme viendra se greffer au voyage conjugal, et pas n’importe laquelle puisqu’il s’agit de son ex-femme à lui. Comédie assez anecdotique mais qui révèle déjà une ambition esthétique intéressante car singulière, dans sa façon de filmer l’espace (le désert) comme un refuge abstrait, au danger impalpable, ainsi qu’une sensualité très chorégraphiée (alternant avec équilibre plans longs et brefs, courtes et longues focales) entre danse, fou-rire, chansonnette, silence et malaise. Annonce bien Bang Gang même si encore trop guidée par l’imagerie Sundance.

200X1 – Eva Husson – 2004

42     2.3   Court métrage de 6min construit sous forme de souvenirs-flashs, cinq en tout, de la vie quotidienne d’un homme, seul, avec sa femme ou ses enfants, un matin avant qu’il s’en aille travailler. Chaque « tableau » est suivi d’une pensée sur fond noir. Un message de fin viendra rendre hommage à ces deux cents personnes qui se sont jetées des tours du World Trade Center ce 11 septembre 2001 et aux dix secondes de chute durant lesquelles chacun aura pu penser et se souvenir. Sans grand intérêt, 200X1 n’est qu’un clip-hommage qui tente de mettre des images banales sur un futur hors champ, tragiquement extraordinaire, qu’on a pu lire ci et là dans nombreuses colonnes de brèves.


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