L’étranger.
6.0 1918 en Allemagne. Anna se rend chaque sur la tombe de son bien-aimé, mort au front. Elle croise bientôt un homme qui vient lui aussi pleurer sur la tombe et y déposer des fleurs, fait sa connaissance et apprend d’une part qu’il est français et qu’il était un ami de son Frantz. Il y a deux films en un. La première partie est déstabilisante car autant la douceur d’approche et de compréhension entre l’étranger et la belle-famille en deuil d’Anna est très belle, autant il y a un curieux suspense, un peu gênant puisqu’un peu roublard, sur son identité. Comme le film est vu du point de vue de la jeune femme, ça passe. On pense d’abord qu’Adrien (Le jeune français, Pierre Niney, donc) a tué Frantz et qu’il vient, rongé par les remords, pour s’en excuser. Avant de croire qu’il était son amant. Ça aurait fait un beau film d’ailleurs, de voir ce garçon français, tomber amoureux de la petite amie de son amant allemand. C’eut été plus casse-gueule c’est sûr. On y croit d’autant plus que d’étranges flash-back en couleur (qui n’en sont finalement pas) tentent de nous tromper. La deuxième partie, une fois le pot aux roses dévoilée perd en mystères ce qu’elle gagne en quête romantique et spirituelle. Anna (Paula Beer, révélation, j’espère qu’elle aura son César) devient le personnage mobile et fort là où elle était figée et chétive. Si le film manque d’émotion et d’ambition formelle et romanesque, il ne rate pas grand-chose surtout dans sa manière de brosser le (double) mensonge – La thématique qui parcoure quasi toute l’œuvre du cinéaste – comme vecteur de vie, d’émancipation, d’apaisement voire de résurrection puisque Adrien incarne un peu malgré lui, auprès des parents de Frantz, le fils d’adoption avant qu’il ne serve de simple tremplin pour l’élan nouveau de la jeune femme. Que le film s’en serve en tant que discours pacifiste le rend plus beau encore. Un poil trop rigoureux dans sa plasticité, avare dans son intensité et binaire dans ses enchaînements couleurs / noir et blanc pour prétendre égaler les meilleurs Ozon, mais dans le haut de son panier, déjà bien garni (C’est son seizième long métrage) quoi qu’il en soit.