Archives pour mars 2017



Charlot débute (His New Job) – Charles Chaplin – 1915

38Pirouettes et galipettes.

   3.0   Qui me permet de constater que sauf à de rares exceptions (Charlot rentre tard) les premiers essais courts de Chaplin m’ennuient poliment là où ceux de Keaton me fascinent. Quand l’un fait ce chef d’œuvre qu’est Sherlock Jr., l’autre fait His New Job. Chacun leur vision du cinéma, ok, mais je préfère très nettement la dimension poétique de Keaton aux répétitions farcesques de Charlot, car franchement là, 30 minutes de portes dans la gueule, mesquinerie d’audition et grimaces impossibles, c’est un peu long.

Charlot dans le parc (In the park) – Charles Chaplin – 1915

32Le vagabond nonchalant.

   4.0   Un parc, un couple, un pickpocket, une nourrice, le petit ami de la nourrice, un policier. Et Charlot au beau milieu, sans gêne, qui vole, qui se bagarre. Il s’agit du quatrième film de Chaplin pour les studios Essanay (pour lequel il en réalise une quinzaine) et le seul, avec Charlot à la plage, constitué que d’une seule bobine. Chaplin s’amuse beaucoup, enchaine les petits quiproquos, de voleurs volés, conflits croisés, drague lourdingue. Anecdotique mais attachant.

Charlot à la plage (By the sea) – Charles Chaplin – 1915

Charlot à la plageUn grain de sable dans la mécanique.

   4.5   C’est l’un des premiers courts de Charlot, mais comme il en pondait une quinzaine par an entre 1914 et 1917 ça ne veut pas dire grand-chose. Charlot à la plage se déroule donc sur une plage et s’appuie quasi uniquement sur un mono-gag avec un autre plagiste promeneur : Une affaire de chapeaux emmêlés qui déraille jusqu’à la baston, avant l’apparition d’une femme mariée. Pas grand-chose à signaler, c’est mignon sans plus.

Gibraltar – Julien Leclercq – 2013

16830772_10154446567572106_5388816643920507856_nInfiltré malgré lui.

   4.0   Encore un qui croit renouveler le genre, devenu moribond, du polar à la française. Chrysalis et L’assaut c’était horrible et c’était déjà lui. Gibraltar est un peu plus intéressant, déjà parce que le film se déroule à Gibraltar, endroit très cinégénique, même via la caméra de ce tâcheron de Leclercq, mais aussi parce qu’on y suit un pauvre type, qui tient une guinguette et qui pour palier à de gros problèmes financiers accepte de se retrouver agent de renseignement pour les douanes françaises, d’abord en livrant des informations puis en rencontrant de dangereux trafiquants de drogue. De renseignements en infiltrations, échanges et manipulations, le film se suit agréablement, à raison d’une réalisation extrêmement classique, jamais tape à l’œil non plus, mais on aurait rêvé d’un vrai cinéaste aux manettes, qui aurait écrit de super personnages et crée de la densité accompagnés de séquences mémorables. C’est comme pour La French de Jimenez (Qui était un peu mieux quand même) on sent que les mecs rêvent de Mann et Melville, mais ne leur arrivent pas à la cheville. Le film se base sur l’histoire vraie d’un français expatrié à Gibraltar, Marc Fiévet, qui avait raconté son histoire dans un livre en 2003. On a l’impression que c’est tout ce qui intéresse Leclercq : Raconter une histoire vraie – Comme pour sa purge, L’assaut. Il ne transcende rien et j’imagine (car je n’ai pas lu le bouquin) ne raconte rien de plus ou de différent que ce qui apparait dans la plume de Fiévet. Les acteurs, quant à eux, font le job, sans plus.

La chute de Londres (London has fallen) – Babak Najafi – 2016

32     2.0   Vu en dilettante, en mangeant des cochonneries puis en jouant au Bohnanza, ce qui est amplement suffisant pour vous dire que je trouve ça à chier. J’aimais pourtant bien l’idée du film sur une attaque terroriste ciblant les pontes politiques rassemblés un jour de funérailles, une version bien burnée, popcorn se déroulant en bord de Tamise. Mais Londres n’est qu’un décor comme un autre : Une prise de vue aérienne ici et là et basta. Rarement vu plus américano-centré que cette daube, drôle contre son gré, parcourue d’effets immondes et de course-poursuites illisibles. L’auteur avait réalisé des épisodes de la série Banshee, comme quoi filer un film (Car oui c’est un pur produit mercantile) à un réalisateur de série a rarement été une bonne idée. Un point cela dit pour le sous-texte gay-friendly contre sa volonté là aussi, mais bon, quand ça pue à ce point la testostérone j’ai l’impression de ne plus voir que ça. Toutefois, j’essaierai bien White House Down, ça ne peut pas être pire.

Le désordre et la nuit – Gilles Grangier – 1958

16665752_10154429319352106_2514682031059926706_oLes amants traqués.

   6.0   J’ai souvent pensé que le problème des films avec Jean Gabin c’était Jean Gabin lui-même. Je n’avais probablement pas vu les bons films ou davantage ceux dans lesquels sa tendance à cabotiner m’exaspère. Ici c’est sans doute moins Gabin le problème que Michel Audiard qui de par son écriture de dialogue habituelle vient contaminer autant le récit, l’ambiance moite de cet étrange polar que la fragile complexité des personnages. Je pense que le film est beaucoup trop écrit et pas assez mis en scène, pourtant Grangier parvient parfois à faire passer des choses dans la boite de nuit, les appartements, les rues de Paris, quelque chose de très crépusculaire et désordonné qui trouve ses acmés dans sa construction indéterminée, qui peut faire succéder le visage en sueur d’un batteur de jazz noir à celui d’une jeune chanteuse droguée jusqu’à l’os, ou faire disparaître l’attendue noirceur mafieuse pour faire éclore la corruption bourgeoise et pharmaceutique, mais surtout zapper son enquête au profit d’une folle passion amoureuse. Si l’on compare ça aux films de Duvivier de la même époque, ça reste assez inégal dans l’ensemble, mais c’est une chouette découverte.

L’homme qui rit – Jean-Pierre Améris – 2012

16722531_10154429319502106_915443862069877260_oHugo qui pleure.

   2.5   Pas lu le livre de Victor Hugo, mais le pauvre, il doit se retourner dans sa tombe tant cette énième adaptation ressemble à un mix Jeunet/Burton auxquels on aurait ajouté du Gilliam/Boutonnat. Ça donne envie, hein ? Pas un plan qui ne soit pas lourd de sens, indigeste. Pas une séquence qui sortirait d’un lot commun. C’est laid de la première à la dernière scène. Les acteurs en font des tonnes, sans exception. Allez, je sauve in-extrémis la relation entre Gwynplaine et Dea car il y a un truc qu’elle dégage, lumineux et diaphane, qui me plait beaucoup, même si elle non plus n’y va pas avec le dos de la cuillère pour jouer l’aveugle. Décidemment, Jean-Pierre Améris (dont j’avais aimé Les émotifs anonymes et trouvé lourdingue Une famille à louer) dans son versant archi populaire, est un auteur difficile à identifier. 

Atlanta – Saison 1 – FX – 2016

04. Atlanta - Saison 1 - FX - 2016Am I black enough for you ?

   6.5   Atlanta conte l’histoire d’Earn, trentenaire, ancien DJ au chômage, père d’une petite fille,  plus ou moins séparé de sa petite amie chez qui il squatte, oublié par ses parents. Lorsqu’il apprend qu’un cousin obtient la popularité grâce à l’un de ses titres de rap balancé sur le net, il lui propose de devenir son manager. Parce qu’en un sens, malgré les désillusions éternelles, le rêve américain, lui, existera toujours.

     Si je suis moins enthousiaste que l’avis général je trouve que c’est une série tout à fait pertinente, sur la condition afro-américaine dans l’Amérique pré Donald Trump, plus poussée qu’un Moonlight par exemple tant ça ne vise pas seulement à aborder son espace sous le seul angle de la sexualité. On a là quelque chose de plus instinctif que le film de Barry Jenkins, qui me parait un peu trop exister pour caresser le bourgeois blanc. Ici l’approche est plus complexe, on nage davantage dans le registre du « Comment fait-on pour exister aujourd’hui, dans une ville comme Atlanta, quand on est noir et qu’on n’a pas une thune ? » en appuyant principalement sur la notion de racisme ordinaire. Il me semble que là-dessus, aussi bien via ses trois personnages phares, que par son couple de parents, la série raconte quelque chose de fondamental, toujours à la lisière du comique et de l’absurde sans jamais renier sa noirceur profonde.

     Les épisodes sont un peu inégaux, mais l’ensemble trouve une dynamique propre oscillant merveilleusement entre le rire et le malaise, avec des idées assez géniales (La voiture invisible !) à de nombreuses reprises – Et du point de vue de la mise en scène, absolument rien à dire, c’est remarquable. Il y a une vraie attention aux lieux que l’on filme. Aux gens aussi. Je vais être plus sceptique quand les épisodes s’enfoncent complètement dans l’absurde à l’image de celui du faux talk-show entrecoupé de fausses coupures pub. Il manque une vraie homogénéité qui mettrait chaque épisode en relation. Heureusement, le dernier effacerait presque toutes les réserves tant il est parfait, puissant, sorte de voyage hypnotique aux crochets de Earn cherchant sa veste, dans la boite de nuit où il s’est murgé la veille avant de contacter l’Uber qui l’a ramené, entrant bientôt en collision avec une violence aussi brutale que banalisée (Qui fait écho à l’homme tabassé au commissariat en début de saison) avant de se resserrer sur ce couple de parents magnifique mais séparé, puis sur lui, seul, s’allongeant dans son garde-meubles.

     Comme je ne connais pas Community, Atlanta m’aura permis de faire la rencontre de Donald Glover qui m’était quasi inconnu (Une apparition dans Girls, une autre dans Seul sur Mars) le garçon étant principalement connu sur la scène rap sous le pseudonyme  Childish Gambino. Prototype du mec cool, autant qu’Earn, le personnage qu’il s’est octroyé, est immédiatement attachant. Je pense que c’est un grand mélancolique, rien d’étonnant en ce sens à le voir ancrer son bébé sériel à Atlanta, la ville de son enfance. Glover est parti dans l’idée de créer dix épisodes sans compromis, jusqu’à revendiquer préférer voir son show annulé plutôt que de ne pas le raconter ainsi. De cette vision un brin sarcastique, l’auteur parvient justement à trouver sa voie, son public et la critique (Jusqu’à être sacré aux récents golden globes) en restant lui-même, en ne se fourvoyant à aucun moment.

Moonlight – Barry Jenkins – 2017

31. Moonlight - Barry Jenkins - 2017Portrait d’un garçon de Miami.

   6.0   Ou la palme du film au démarrage insupportable et au final bouleversant. Il y a trois parties, trois époques de la vie de Chiron, afro-américain introverti installé à Miami. Le début fait peur avec cette caméra qui tournoie gratuitement autour de Juan qui sera une figure importante dans l’évolution du garçon. Puis l’objectif bouge dans tous les sens quand des gosses le poursuivent avant qu’il ne se réfugie dans un immeuble désaffecté où il rencontrera le dealer, qui deviendra une sorte d’ange gardien. La deuxième partie est plus posée mais il faut passer outre des systématismes vraiment lourds, par exemple, juste après la scène pivot entre Chiron et Kevin sur la plage, le premier va se faire tabasser par le second sous les ordres d’un chef de bande malveillant. Il y a déjà de belles idées mais le film est trop empesé, à l’image de la mère, défoncée au crack qui utilise son fils pour se procurer sa dose – Et l’actrice en fait des tonnes. Il y a aussi la disparition de Juan qui permet au film de changer d’angle, de montrer Chiron seul contre tous et les prémisses de son émancipation sexuelles et violentes.

     Constitué de trois parties, Moonlight est donc habité de deux énormes ellipses (De presque dix ans chacune) et au sein de chaque partie, les deux personnages centraux sont joués par trois acteurs différents. Parti pris casse-gueule qui se révèle idéal dans la mesure où l’on a bien l’impression d’avoir affaire aux mêmes personnages, à Chiron comme à Kevin – Même si ce dernier est quand même assez peu creusé quand on y réfléchit. Et toute la dernière partie du film, la partie adulte donc, va faire pencher le film du bon côté. D’une part en limitant les espaces traversés : Principalement un restaurant, une voiture, une maison – On ne voit toujours pas grand-chose de Miami mais il y a un vrai sens à cela enfin, le cadre resserrant sur les corps, ce qui se trame dans ce qui est tu – Parfaitement mis en chantier lors de la très belle scène sur la plage, dans le deuxième chapitre. D’autre part en jouant minutieusement sur ce qui lui faisait un peu défaut jusqu’ici : La construction d’un dialogue, la gestion des silences, l’environnement musical, les petites choses qui construisent la situation, le plan. La plus belle séquence est évidemment celle du lieu de retrouvaille entre Chiron & Kevin, ce restaurant (Tenu par le second, ravi de retrouver André Holland, qui jouait dans The Knick), tant Barry Jenkins construit sur la durée et rend palpable l’excitation et la gêne mutuelles qui accompagnent cette retrouvaille. J’aime à penser que Jenkins a voulu faire son film en partant de cette séquence : La discussion adulte entre deux anciens amants du ghetto, alors qu’ils sont devenu cuistot et gangster. C’est sûr on ne voit pas ça souvent. Alors certes on l’a déjà traité au cinéma, suffit de repenser au très beau film d’Ang Lee : Brockeback Mountain. Mais rarement on avait touché à ce point (le temps d’une scène, incroyablement étirée) au désir plus fort que tout le reste.

     Bref, ça partait mal, mais j’ai aimé, en définitive. La fin est vraiment puissante – Malgré le dernier plan Sundance style. Problème est que le film ne vieillit pas super bien dans mon esprit. Disons qu’entre le moment où j’ai vu le film (positif puisque ému par la troisième partie), celui où j’ai écrit ces lignes et maintenant, le film s’est un peu effondré. En fait je trouve que ça ne dit pas grand-chose sur ce que c’est d’être afro-américain aux USA aujourd’hui, contrairement par exemple à une série comme Atlanta (Sur laquelle je vais avoir d’autres réserves mais là n’est pas le sujet) ou tout simplement contrairement à ce que Brockeback Mountain racontait d’être cow-boy dans le Wyoming dans les années 60. Et puis le film est beaucoup trop prisonnier de son schéma narratif hyper fabriqué, où chaque partie doit déboucher sur une révélation importante, qui va te faire avaler les deux grosses ellipses et la Fin. Il s’agit d’abord de faire de réaliser à Chiron qu’il peut être homosexuel, via la discussion avec Juan. Il s’agit ensuite d’en faire un nouveau personnage qui va choisir de se forger une carapace (la prison) pour affronter ceux qui se moquent de son homosexualité. Avant de finir sur Chiron admettant enfin qu’il est amoureux de son ami d’enfance. Ça fait un peu trop dissertation en trois parties cette affaire. C’est très scolaire en fait. Mais c’est pas mal.

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silencio


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