Archives pour juin 2017



Love – Saison 2 – Netflix – 2017

11. Love - Saison 2 - Netflix - 2017Et si nous faisions un bout de chemin ensemble.

   7.5   Cette deuxième saison de Love reprend exactement là où s’était stoppé la première : Sur le parking d’une station essence. On y voyait Mickey et Gus se retrouver tout en ayant pleinement conscience de la fragilité de leurs retrouvailles. Et cette nouvelle saison ne va faire que ça : Raconter la construction et la déconstruction de ce couple, aussi bien dans la progression de ces douze épisodes que compose cette saison qu’au sein de chaque acte. Une variation infinie sur une même situation, en somme. Hormis deux épisodes plus légers et ludiques – d’autant plus étonnant qu’il s’agit des deux extrémités – Love aura crée un crescendo parfait consistant à éloigner chaque fois davantage notre couple vedette géographiquement, jusqu’à culminer dans un dixième épisode où leur correspondance n’opère plus que par Skype, rapport doux et bienveillant qui se solde vite par une énième altercation. C’est Nous ne vieillirons pas ensemble, à la sauce Apatow. Avec nettement plus d’espoir que dans le chef d’œuvre de Pialat, forcément. C’est très beau, dans la continuité de la première saison, peut-être même plus fort encore.

Mort d’un pourri – Georges Lautner – 1977

04. Mort d'un pourri - Georges Lautner - 1977A cause d’un assassinat ?

   5.0   Un polar qui démarre fort, avec Ronet, un député qui demande de l’aide à Delon, un ami PDG après avoir tué un collègue qui lui imposait de démissionner sous peine de révéler leurs affaires de corruption. Une histoire de parlementaires, pots de vin, chantage et meurtre. On croit en quelque chose de très simple mais le film vise les entrailles de la politique avec ses machinations, complots et règlements de compte et va dès lors, aligner les rebondissements et cadavres de plus en plus gros avec des idées de mise en scène pas toujours reluisante, voire parfois à la limite du frisson de la honte – La mort de Stéphane Audran, en caméra subjective, par exemple, qui ferait sourire ou se cacher n’importe quel fan de giallo. Delon et Lautner avaient déjà tourné ensemble dans le raté Seins de glace (1974). Mort d’un pourri se rêve en Parallax view à la française, sauf que d’une, Lautner n’est pas Pakula, deux, Delon est un acteur-producteur alors trop influent pour ne pas vampiriser le projet, qui semble avoir échoué dans les mains de Lautner comme ça aurait pu échoir chez un autre. Et le film s’en ressent, il manque de personnalité, de tentatives, trop occupé qu’il est à multiplier les situations lourdingues. Le double désir de faire renaître le polar et jouer sur la corde populaire (Un casting hallucinant : Delon, Ronet, Audran donc, mais aussi Darc, Bouise, Aumont, Guiomar et même Klaus Kinski et Ornella Muti. De quoi attirer les foules et parfaire son climat de fresque opératique) crée une étrange dynamique, tour à tour inspirée (Dans sa succession de fuites) et décevante (L’amplitude du roman de Jean Laborde et l’écriture d’Audiard semblent trop fortes pour la mise en scène). Mais c’est pas mal.

Versailles – Saison 2 – Canal+ – 2017

10. Versailles - Saison 2 - Canal+ - 2017Game of overbearing.

   3.0   Se la jouer Game of thrones mais ressembler à du Vampire diaries. La frontière est plus mince qu’on ne le pense en fin de compte. On avait laissé le bénéfice du doute à une première saison déjà approximative et démonstrative, car il y avait une dimension opératique qui fonctionnait avec cette consommation maladroite du pouvoir, cette étrange relation entre frères et l’impression que la série ne cessait de scander que le vrai danger du monarque ne se trouvait pas dehors mais au sein de ses propres murs. Rien de neuf mais le show parvenait à séduire via un déploiement grandiose voire émouvoir notamment au détour d’un season finale réussi avec cette omniprésence d’un parfum de mort. On prend les mêmes et on recommence dans une deuxième saison volontiers plus rythmée par une pelleté de rebondissements souvent grotesques et cliffangher tape à l’œil à gogo – Un empoisonnement en convoque un autre, ad nauseam – sauf qu’il n’y a plus de cœur (juste du fric), les personnages sont des pantins (Et la plupart des acteurs vraiment pas bons et/ou mal dirigés, toujours hyper affectés, dans l’illustration, tout en larmes et grimaces) et la construction est à mourir d’ennui. Au centre il y a par exemple le combat et la rencontre entre Louis et Guillaume d’Orange. Ça devrait marquer une rupture, relancer la dynamique mais c’est simplement chiant – Sans doute que le montage alterné (Puisqu’on revient sans cesse au château et son intrigue policière autour des empoisonnements) n’aide pas. Je suis dur car il y a quelques sursauts ci et là mais dans un ensemble de dix heures, c’est trop rare (Un peu à l’image de certains très beaux personnages qui ne sont pas creusés, comme la Palatine) ; C’est Les feux de l’amour dans la cour du roi, pour moi, avec suffisamment de violence (mais pas trop) et de cul (mais pas trop) pour appâter le chaland. C’est officiel, j’arrête les frais.

Top Mouk

mommy10     Voilà, je termine laborieusement ce tour du monde. Un seul coup de cœur, au final, et très inattendu, tant mieux. Et pas mal de déceptions, même dans les films aimés, malgré quelques belles trouvailles. Et un paquet de trucs très dispensables.

Ce qui me permet, et c’est plutôt d’actualité quelques jours après la fin du festival de Cannes, de dresser un top et de faire un palmarès :

1. Québec : Mommy, Xavier Dolan (2014)
2. Colombie : L’étreinte du serpent, Ciro Guerra (2015)
3. Argentine : Jauja, Lisandro Alonso (2015)
4. Corée du sud : Haewon et les hommes, Hong Sang-soo (2013)
5. Australie : Wolf creek, Greg McLean (2006)
6. Allemagne : Montag, Ulrich Köhler (2006)
7. Taiwan : Les chiens errants, Tsai Ming-liang (2014)
8. Portugal : John From, João Nicolau (2016)
9. Lituanie : Indigènes d’Eurasie, Sharunas Bartas (2010)
10. Japon : Saudade, Katsuya Tomita (2012)
11. Hongrie : White god, Kornél Mundruczó (2014)
12. Hong-Kong : The grandmaster, Wong Kar-wai (2013)
13. Italie : Reality, Matteo Garrone (2012)
14. Maroc : Rock the Casbah, Laïla Marrakchi (2013)
15. Iran : Une famille respectable, Massoud Bakhshi (2012)
16. Chili : La danza de la realidad, Alejandro Jodorowsky (2013)
17. Pays-bas : Tricked, Paul Verhoeven (2014)

Prix du scénario : White god.
Prix du jury : Jauja.
Prix d’interprétation féminine : Jeong Eun Chae dans Haewon et les hommes.
Prix d’interprétation masculine : John Jarratt dans Wolf creek.
Prix de la mise en scène : Les chiens errants.
Grand prix du jury : L’étreinte du serpent.
Palme : Mommy.

Tricked (Steekspel) – Paul Verhoeven – 2014

18. Tricked - Steekspel - Paul Verhoeven - 2014Tentative oubliée.

   2.0   Je croyais que Verhoeven n’avait rien fait entre Black Book (2006) et Elle (2016) à tord puisque le déroutant cinéaste hollandais s’est aventuré dans une expérience tout aussi déroutante, un projet Entertainment Experience basée sur le crowdsourcing consistant à balancer un embryon de scénar sur le web (suffisant pour poser les bases et les personnages récurrents) en laissant aux internautes le soin de poursuivre. Idée pour le moins casse-gueule puisque Verhoeven et son équipe vont recevoir des centaines de scénarii et vont démêler parmi ces milliers de pages parfois improbables des morceaux qui leur plairont. On passe sur la forme indigente digne d’un banal téléfilm érotique. On passe sur l’interprétation, mauvaise sans exception. Le vrai problème c’est le scénario justement, la construction approximative, le manque de liant, la faible durée de ces pauvres saynètes. C’est nul et ridicule, d’un bout à l’autre. Une vraie purge que Verhoeven a exploité sur une cinquantaine de minutes en l’accompagnant d’un documentaire sur la conception du projet – Nettement plus intéressant que le film, évidemment. On a du mal à croire qu’il allait faire cette merveille qu’est Elle dans la foulée ou presque. Mais peut-être fallait-il qu’il en passe par cette expérience foirée qui accouche d’un navet total, qui sait. Un mal pour un bien. Je croyais que Verhoeven n’avait rien fait entre Black Book (2006) et Elle (2016) et bien j’aurais mieux fait de continuer à y croire.

Les chiens errants (Jiāo Yóu) – Tsai Ming-liang – 2014

SONY DSCLes réprouvés de Taipei.

   6.0   Les films de Tsaï sont toujours délicats à apprivoiser, il faut s’y jeter à corps perdus, en accepter leur extrême lenteur (Parfois jusqu’à l’autisme, dans Le voyage en Occident) et l’étrange construction, notamment d’une scène sur l’autre, son obsession pour l’adage Une situation/un plan, ainsi que l’originalité et la puissance de chacun de ses cadrages. Soit ça me tient poliment (Puisque c’est toujours au minimum super beau) à distance comme dans I don’t want to sleep alone, soit c’est absolument génial, hypnotique à l’image du sublimissime Goodbye dragon inn. Possible aussi que ça soit une affaire d’humeur, en fait.

     C’est quoiqu’il en soit un langage cinématographique qu’on n’a pas l’habitude de rencontrer donc il vaut mieux être très disponible au moment de le recevoir, vouloir planer comme devant un Weerasethakul, s’abandonner aux infimes variations de plans comme devant ceux de Benning, se lover dans son lyrisme si singulier et lancinant qu’on peut trouver aussi chez un Béla Tarr par exemple, donc forcément, là, dans ma nouvelle période couches/biberons, Les chiens errants a fait l’effet d’un somnifère parfait. Je l’ai lancé un soir entre deux cycles de réveil bébé et j’ai dû tenir quoi, cinq plans – Quinze minutes donc. Bref, ce n’était pas le moment. Ou alors c’était justement trop le moment, je ne sais pas.

     J’ai ressayé le surlendemain vers une heure plus décente et un sommeil moins capricieux. C’était mieux. C’est dans la variation d’échelle de ses plans au sein de séquences à priori identiques que le film m’a d’abord le plus troublé. Je pense évidemment à cet instant où le père arbore sa pancarte publicitaire à un carrefour venteux, vêtu d’un ciré jaune. Le plan choisi est chaque fois différent et je ne comprends pas ce qu’il raconte d’autre si ce n’est qu’il appuie le gag cruel du vent violent et du chant du désespoir jusqu’à ce qu’on y voit la morve couler. Il me semble que Tsaï était fort plus subtil dans Visage, tout en étant moins sage.

     Une fois de plus avec le cinéma du taiwanais ce qui fascine ce sont ces lieux que les personnages traversent, autant de no man’s land improbables que Tsaï parvient à mettre en scène avec une lumière, une profondeur de champ et une durée qu’il affectionne. Ce ne sont pas seulement des lieux bizarres, défroqués, leur captation est au-delà de toute complaisance, ils figurent un voyage dans les limbes de la précarité où chaque source lumineuse révèle une magnificence cachée, où chaque mouvement aussi bref soit-il parfois déplace notre regard, car chacun de ces plans est une merveille de chorégraphie minutieuse, tranchante, hallucinée et sidérante dans son refus de la gigantesque parabole.

     Il faut voir cet étrange et interminable plan où une femme (après avoir traversé des tunnels de ruines dans ce qui semble faire office de vieil immeuble calciné) se recueille devant une fresque murale, représentant un curieux et apaisant paysage montagnard, avant de s’accroupir pour pisser. Chez Tsaï il y a toujours mille trucs à regarder d’un plan sur l’autre et les échos entre ses films sont nombreux. Lorsque le père foule un chemin circulaire avec sa pancarte sur le dos, j’ai immédiatement repensé au plan final de Visage. Quant à la peinture, elle rappelle aussi beaucoup le cinéma mourant qui habite Goodbye dragon inn.

     Il y a d’étranges reflets partout, des idées à foison. Reste que ça me passionne et m’émeut assez peu, malheureusement ou de façon sporadique. J’aime beaucoup la scène du chou, par exemple, qui pourrait être une version plus mystérieuse du ballon de Tom Hanks dans Cast away. Un Wilson dans un container de Taipei en gros. Chou avec lequel les enfants dorment puis un soir où ils ont disparu, le père y projette toute sa tristesse, l’étouffe sous un oreiller, avant de le trucider de ses ongles et de ses dents. De le dévorer puis de le pleurer. Avant l’avant dernier, c’est le plan le plus long du film : Dix minutes, puissantes, au sein desquelles Lee Kang-sheng (acteur fétiche de Tsaï Ming-Liang) explose par sa brutalité et sa fragilité.

     C’est Le plan de bascule du film. C’est celui qui accouchera sur une évasion nocturne, un soir de tempête. Le temps de ce plan, l’eau s’écoule hors champ. Les éléments s’écharnent, les sentiments se chevauchent, la folie est palpable. Et la tempête, ensuite, fait rage. On sait combien l’eau est un élément récurrent chez Tsaï, on se souvient de cette interminable inondation d’appartement dans Visage. Il y a là aussi une histoire de maison (le conte de la femme qui accueille les enfants) qui aurait été inondée mais aurait préservé ses larmes. Les chiens errants se resserre alors. Il était un peu dispersé, esthétiquement et narrativement. Il se fait intérieur, quasi exclusivement.

     Il y a vers la toute fin du film ce plan complètement dilaté où la femme et l’homme se retrouvent tous deux dans la grande pièce à contempler l’immense peinture – On sait ce qu’ils regardent mais il faut attendre quinze minutes pour que le contre-champ nous soit offert. Lui, noyé dans l’alcool (Un verre à la main, il titube à moitié) elle immobile, dans ses larmes, se tiennent là, happé par ce mur qui semble tout leur dire de la vie, de leur vie. A leurs cotés, le train passe à plusieurs reprises, dans le fin fond du champ. On l’entend très distinctement mais on distingue aussi un fin trait lumineux. Le plan s’étire à l’infini. Jusqu’à cette étreinte furtive. Avant que dans un ultime plan d’ensemble, les deux corps se désunissent pour l’éternité, devant cette fresque d’un autre temps, apaisante et brutale. Rien que pour cette fin, le film laisse une trace.

White god (Fehér isten) – Kornél Mundruczó – 2014

15. White god - Fehér isten - Kornél Mundruczó - 2014Revanche canine.

   5.0   A faire écho de par son sujet puis son titre à deux films monstres que sont Birds, d’Hitchcock et White dog, de Fuller, j’attendais beaucoup de ce film hongrois – Peut-être bien celui qui me faisait le plus de l’œil dans cette liste de rattrapage – malgré le total rejet éprouvé devant Delta, autre film de Kornél Mundruczó, sorti il y a huit ans.

     Si le film fonctionne (et surprend) plutôt habilement dans sa partie centrale dévouée à l’évolution du chien, qui échoue aux mains d’Hommes plus malveillants les uns que les autres, tout ce que l’auteur brode autour, aussi bien dans son introduction (Je ne parle même pas de la toute première inutile scène, putassière, qu’on retrouvera, on le sait, une heure plus tard dans une ambiance plus appropriée), son éreintant montage parallèle avec l’adolescente, puis dans son final horrifico-métaphysico-politique un brin complaisant, est assez peu inspiré et brise le semblant d’unité fragile qui pointe parfois au détour des « dialogues » entre chiens ou de cette création abstraite de la meute ou tout simplement de plans vertigineux comme ceux débusqués dans cet étrange terrain vague au reflets infinis dans les flaques d’eau, ceinturé par des bâtiments en ruines.

     Et puis il faut bien dire que la pseudo parabole politique « Le mal engendre le mal » est assez lourde dans ses intentions tant chaque séquence semble appuyer l’idée. Si globalement j’ai retrouvé l’univers balourd de l’auteur de Delta, j’y ai toutefois trouvé des choses intéressantes, notamment visuellement car le film est assez beau, à l’image de ses impressionnants lâchés canins. Et je reconnais avoir été séduit par son étrange construction, s’ouvrant comme un truc social plombé entre Kes, de Ken Loach et Le temps du loup, d’Haneke, avant de virer vers un conte Disney façon L’incroyable voyage pas pour les enfants (Portrait d’un chien, victime de vileté humaine et moteur de la rébellion) pour s’acheminer dans la fable apocalyptique. Après, on pourra toujours vanter les performances des chiens dressés, personnellement ça me gêne, je n’aime pas ça et préfère laisser le débile du Figaro dire que cette meute de vrais chiens c’est toujours mieux que les oiseaux en carton d’Hitchcock.

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