“We are like the dreamer who dreams and then lives inside the dream”
7.5 Super délicat de parler du retour de Twin Peaks. Je tiens d’abord à dire que je ne suis pas un fervent connaisseur, à la base. Je l’ai découverte sur le tard, il y a une dizaine d’années, j’avais adoré y retrouver l’ambiance lynchienne qui m’avais tant dérouté dans Blue Velvet, Lost Highway et bien entendu Mulholland Drive. Univers qui ne ressemble à aucun autre alors qu’il a pourtant ses référents – On sait combien Lynch est attaché à Sunset boulevard, Vertigo ou Persona – et ses nombreux héritiers. Twin Peaks avait tout, sans doute, de la série OVNI dans le paysage sériel – Là aussi, difficile d’en juger personnellement puisque je ne connais aucune autre série de l’époque. J’ai quoiqu’il en soit le souvenir diffus de quelque chose d’inégal (Surtout la deuxième longue saison) et confus dans son déroulement mais superbe sitôt qu’on l’aborde du point de vue de la multitude de personnages (doux et/ou dingues) qui l’habitent. Si j’ai pas mal oublié les détails de l’enquête et comment le récit glisse de la découverte du corps de Laura Palmer aux plongées de Cooper dans la Loge, j’ai une idée assez précise de qui sont Dale, Audrey, Leland, Bobby, James ou Norma. Leurs voix, visages, façon de marcher, de parler, tout ceci est assez précis dans mon esprit. Le film quant à lui (découvert dans la foulée de ma découverte de la série) je ne m’en souviens pas suffisamment. Un peu comme pour Inland Empire, ça a été une grosse baffe sur l’instant, un choc immédiat, complètement fou et perturbant, mais que ma mémoire imprime plus difficilement qu’un classique plus absolu comme Mulholland Drive. A l’instar de la série, ces films (IE, TP, ni même BV et LH) je ne les ai jamais revu. Comment donc aborder The Return de Twin Peaks en partant de cet attachement un poil bancal ? Evidemment, le mieux aurait été de tout revoir, mais d’une le temps manque, de deux je n’en n’avais pas l’envie. J’ai donc choisi de la recevoir ainsi avec le peu de bagage mémoriel que m’avaient laissé les deux premières. En tentant, qui plus est, de regarder un épisode par semaine, comme ils nous étaient proposés. Riche idée tant l’expérience s’avère aussi stimulante sur 1h qu’elle pourrait être indigeste sitôt abordée en binge-watching. C’est tout le paradoxe : A la fois on n’a jamais vu une série comme celle-là, et même jamais vu une saison comme ce retour de Twin Peaks, et à la fois elle s’apprécie moins comme les séries d’aujourd’hui (Tout voir d’une traite) que comme celles d’antan. Voilà pourquoi, déjà, je ne pourrai jamais la considérer comme un film (Le genre de truc qui ne me dérange parfois absolument pas : Carlos, Mildred Pierce, La maison des bois, Le décalogue…) ce même si Lynch lui-même n’a cessé de dire qu’il s’agissait pour lui d’un film de 18h. Et puis plus simplement : Elle respire comme une Série, point. Ça ne se discute pas. Soderbergh a beau réaliser l’intégralité des épisodes de The Knick, c’est une série, ça respire comme tel, c’est ainsi. Bref, dans ce magma (le mot n’est vraiment pas de trop, là) sidérant on pourra toujours retenir les fermetures musicales, toutes plus élégantes les unes que les autres (mention spéciale à Au revoir Simone et Chromatics) et magnifiquement déroutantes quand elles débarquent autrement : Je ne me suis pas remis de la machine infernale crachée par Nine Inch Nails. Tuerie dans la tuerie puisque l’épisode 8 au sein duquel elle explose sans crier gare, au milieu d’une avalanche de séquences toutes plus hallucinantes les unes que les autres, restera le truc le plus dingue vu cette année, depuis dix ans, depuis toujours. La séquence de la pause pipi, She’s gone away, le champignon nucléaire, la bête chelou. Un choc tellurique. Qu’on avait déjà plus ou moins rencontré dans un épisode 3 ô combien déconcertant « Helloooooo » avant de culminer dans un épisode 14 grandiose, chelou, drôle, délirant, flippant, émouvant. Si cette saison m’aura semblé plus bancale que pour d’autres, je dois reconnaître qu’elle aura aussi libéré des espaces sensitifs qu’on ne voit jamais dans le medium. J’ai lu de supers papiers à propos du retour de Twin Peaks, enthousiastes, passionnés, unanimes. Je vous invite à les lire aussi. Et ça permet de voir combien c’est une œuvre inclassable. Depuis, Harry Dean Stanton nous a quitté. Comme avant lui Miguel Ferrer (Albert) ou Catherine E. Coulson (La femme à la bûche) ou David Bowie (Philip Jeffries). Ça donne à la série un amer parfum de mort autant que ça la rend étrangement éternelle, comme Laura Palmer. C’est très beau.
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