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Archives pour octobre 2017



St. Vincent – Theodore Melfi – 2014

28. St. Vincent - Theodore Melfi - 2014Feel-good movie, mode d’emploi.

   5.0   Un garçon de 12 ans, dont les parents viennent de divorcer, reste seul toute la journée. Il se lie alors d’amitié avec son voisin, un retraité décadent, hédoniste et misanthrope dont la vie ne tourne qu’autour de l’alcool, du jeu et des prostituées. En plus de répondre à tous les critères du basique feel good movie (et son sous-genre : Le vieil homme et l’enfant) St.Vincent se paie le luxe d’un casting haut de gamme, puisque si Bill Murray, en vieux bougon, Naomi Watts en pute enceinte et Melissa McCarthy en voisine de bonne composition et mère de famille larguée, endossent le gros de la présence à l’écran, ils sont agréablement accompagnés par Chris O’Dowd, en magnifique prof bigot, qui fait office de fil rouge désopilant. Agréable, voilà à quoi on peut réduire St.Vincent, dans un grand élan de mansuétude, parce que c’est mignon, hein, mais ça ne va pas plus loin. C’est du déjà-vu, les situations font gentiment sourire tant elles ne sont guère originales et les douceurs pop qui enveloppent tout ça achèvent de parfaire le tableau sundancien. Exemple frappant : Bill aime les courses de chevaux, il joue souvent mais perd systématiquement. Le jour où il emmène l’enfant (alors qu’ils se détestent encore) il va gagner. Il va ouvrir un compte pour le gosse mais plus tard, tandis qu’il est seul, il lui reprendra l’intégralité pour le perdre à nouveau au jeu. Et c’est comme ça tout le temps. On voit tout venir. Inutile donc de cacher qu’à la fin tout finit bien. Enfin, dans la bonne humeur. C’est mignon, quoi. Et Naomi Watts (qui prouvait déjà avant le retour de Twin Peaks qu’elle peut VRAIMENT tout jouer) toute peinturlurée, au langage de charretier avec l’accent russe, c’est inratable.

Bad bunny (Coelho Mau) – Carlos Conceição – 2017

30. Bad bunny - Coelho Mau - Carlos Conceição - 2017     3.5   Il y a une vraie ambition plastique dans ce moyen métrage de Carlos Conceição, jeune réalisateur dont on peut avoir croisé le nom puisqu’il s’occupait du son sur certains films de Joao Pedro Rodrigues. Bon, Bad Bunny c’est globalement chiant, car ça reste en surface de tout, ça se touche un peu quoi. Avant le film (sur Arte) il y avait une interview de l’auteur, c’était très intéressant, plus intéressant que le film car c’est un garçon passionnant, érudit, et qu’il est fan de Jacques Demy. La bonne nouvelle de Bad bunny c’est qu’on y retrouve la belle Julia Palha, qui irradiait John From, de Joao Nicolau.

Olé (John Coltrane, 1961)

John_Coltrane_-_Olé_ColtraneA trance supreme.

     Quand on évoque Coltrane, c’est souvent A love supreme qui revient dans les textes et conversations, à juste titre puisqu’il est l’album de jazz imparable, complexe et serein, très accessible bien qu’hyper avant-gardiste – J’y suis probablement moins sensible à cause de son côté « performeur » : ses imposants solos (piano sur Resolution, batterie sur Pursuance, contrebasse sur Psalm) et l’omniprésence du sax ténor. On le retrouve souvent parmi les listes des plus grands albums de tous les temps et c’est assez logique. On peut dire que c’est son chef d’œuvre, oui.

     Pourtant je lui préfère toujours un album qui le précède de trois années, Olé Coltrane, sans doute parce que j’aime son intensité, sa mélancolie hispanique, et qu’il m’émeut davantage, me plonge dans une transe comme je pourrais en retrouver plus tard dans le krautrock. Je ne suis pas très jazz, à priori, mais ici et principalement sur le titre Olé qui ouvre l’album, j’y suis entièrement réceptif, dix-huit minutes durant. J’imagine que la durée y tient une place primordiale : Il faut que ça s’étire pour que je m’y fonde, mais pas trop pour ne pas que je m’y ennuie.

     La contrebasse d’abord, épaulé de la batterie (qui agit en véritable mantra sur l’intégralité du morceau), puis le sax de Coltrane, puis la flûte, la trompette, le piano. Tous les instruments ont un rôle fondamental, prennent le pouvoir ici avant de le refourguer là-bas. Je les aime tous, je n’ai pas de préférence de l’un sur l’autre, j’aime les entendre ensemble ou séparément, les voir apparaître puis disparaître. Je trouve ce morceau absolument parfait.

     Petite parenthèse : j’ai des morceaux et/ou albums préférés suivant les saisons, l’heure de la journée et le l’endroit dans lequel je me trouve. Par exemple, j’adore écouter Histoire de Melody Nelson au réveil, chez moi, un jour d’automne. Ou bien Moon Safari en été, en bagnole, vers midi. C’est comme ça. Je reviendrai sur ce délire fétichiste à mesure que ma liste s’épaissira. Toujours est-il qu’Olé de Coltrane c’est très particulier puisqu’il fait partie de ces morceaux que je peux écouter partout, à n’importe quelle heure de la journée, en été comme en hiver. Chaque fois c’est pareil, il s’affranchit de tout, m’extraie de l’espace et du temps.

En écoute ici :

https://www.youtube.com/watch?v=_Z5cRYd1Vr4

Le premier cri – Gilles de Maistre – 2007

27. Le premier cri - Gilles de Maistre - 2007Naître le même jour.

   3.5   Le film s’intéresse à une dizaine de naissances, toutes très différentes (en hôpital, dans l’eau, avec une sage-femme, sans accompagnement, par voie basse ou par césarienne) aux quatre coins du monde, en les imbriquant les unes dans les autres de façon à créer du rythme, à voyager aux antipodes du globe d’une minute à l’autre. Il n’y a pas de construction précise, aucune transition pensée, on sent que le monteur était en vacances, donc malheureusement c’est irregardable, ça donne plus la migraine qu’autre chose, d’autant que sont multipliés les plans de remplissage, ici le gros plan d’un visage suivi d’un autre sur une fleur, la terre, un pied de bébé, une éclipse solaire, une larme, l’océan, un rire.  Et cet accompagnement musical pour alourdir le monstre : Sirupeux rejeton de Glass dans l’effervescence des villes et des hôpitaux, caressant clin d’œil à Tiersen notamment dans les îles où la nature domine. Oui, cette rudesse dans le stéréotype m’a gêné tant on a le sentiment que les auteurs apportent un jugement sur certaines situations (Le gigantesque centre hospitalier du Vietnam) ou certains rites (La naissance dans le désert du Niger qui se déroule mal, malgré l’égorgement rituel d’une chèvre) bien que ça s’améliore largement ensuite. Bref, je ne vois pas ce que ça vaut de plus que ces émissions type Baby boom, mais il a peut-être donné naissance à ces émissions, je ne sais pas. En terme de cinéma, on préfèrera largement Genpin, le documentaire de Naomi Kawase.

Rita & Crocodile (Rita og Krokodille) – Siri Melchior – 2018

31. Rita & Crocodile - Rita og Krokodille - Siri Melchior - 2018La curiosité n’est pas qu’un vilain défaut.

     4.5  A l’origine une série danoise (Dans la veine de la petite taupe tchèque) de petits épisodes mettant en scène les aventures d’une petite fille et son meilleur ami, qui n’est autre qu’un crocodile : Ils vont aller au zoo, à la pêche, camper, tenter d’apprivoiser un hérisson, cueillir des myrtilles, faire de la luge etc. Bref, découvrir les richesses et petits plaisirs du monde. Le film, qui sortira en février 2018, colle huit de ces historiettes bout à bout et se déguste agréablement – pourvu qu’on ait entre trois et sept ans – de par son rythme, son dessin et la simplicité de ses situations qui offrent une alternative zen aux produits Disney. Vu en avp, avec mon fiston, cinq ans, qui était ravi de raconter toutes les aventures à sa maman en rentrant. On peut donc aimer Cars 3 et Rita & Crocodile, voilà.

Mad love in New York (Heaven knows what) – Benny & Joshua Safdie – 2016

32. Mad love in New York - Heaven knows what - Benny & Joshua Safdie - 2016Les dieux de la rue.

   7.0   Les frères Safdie sont surprenants. Après la révélation que constitua Lenny and the kids, tous les curseurs semblaient les déloger de la scène mumblecore pour les voir faire de l’indé plus classique, c’est en tout cas comme ça que moi, je le voyais. Premier élément troublant, la durée de leur absence sur long métrage depuis Lenny and the kids : Six ans. Ils ont émergé de nulle part puis ils ont disparu des radars. Et ils sont revenus avec ce nouveau cru new-yorkais, une histoire de jeunesse et de drogue, d’amour fou et d’addiction. De loin, ça ressemble à du Larry Clark. De près, c’est toujours du Safdie pur jus. Avec quelques dysfonctionnement, chemins de bifurque, et c’est tant mieux.

     Comme pour leur précédent, ce film est exploité en Europe sous un titre sans rapport avec le choix original. Tout tient en ces mots : La folie, l’amour, New York. Ça résume assez bien le programme à quelques détails près : Il est aussi beaucoup question de drogue, des trottoirs, des junkies, de la mort. Car s’il s’agit d’une histoire vraie – Puisque les Safdie ont casté une jeune SDF, Arielle Holmes, pour un de leur projet (Un truc dans le milieu des diamantaires, avec Vincent Gallo, qui ne verra malheureusement jamais le jour), qui leur a raconté par écrit son histoire ; ils ont décidé d’en faire un film et de lui offrir son propre rôle – il est peut-être autant question d’un amour insolite et destructeur entre deux réprouvés de la grande pomme accrocs à l’héroïne que d’un virage cinématographique vers les terres de la fiction (Arielle devient d’ailleurs Harley à l’écran) ou qui du moins s’extraie du petit voyage autobiographique des frangins qui nous guidait jusqu’alors.

     C’est un film très difficile, qui n’hésite pas à filmer ce macrocosme microscopique avec crudité, alternant de grands moments de malaise avec des apaisements divins, à capter ce climat de manque, de détresse, tout en bagarres pathétiques – Dont celle, magnifiquement ridicule, entre Ilya et Mike, sur le talus enneigé d’un  parc, entre les feuilles mortes – et tentatives de suicide ad nauseam. Jamais les Safdie, pourtant, ne visent le naturalisme. Il y a toujours dans leur cinéma quelque chose, un élément naissant, une fulgurance soudaine qui brise la tendance immersive pour en proposer une autre, alternative. D’un téléphone portable balancé éclot un feu d’artifice. En y réfléchissant, peut-être que cette image – Qu’on aurait fait publicitaire ailleurs – concentre tout le magma romantique et nihiliste du film.

     Ainsi, d’emblée le film s’ouvre sur un  défi de se donner la mort et se poursuit jusque dans un hôpital. Aux cris, larmes, insultes et bruits de la ville qui accompagnent le chantage amoureux, répond une chorégraphie électronique incroyable (Le puissant Phaedra, de Tangerine dream) unissant les corps d’Harley avec ces patients inconnus et ces infirmières mystère. Au passage, la musique d’Isao Tomita, reprenant nombreuses des mélodies de Debussy (Sur son album Snowflakes are dancing) est régulièrement utilisé ici et offre au film un flottement enfantin surprenant. Ce qui est très beau chez les Safdie et qui peut d’ailleurs être contre-productif c’est de constater combien le réel est masqué sous la fiction, qu’il n’est pas utilisé pour propulser la plus-value documentaire du film.

     On apprend donc qu’Arielle Holmes était sous méthadone pendant le tournage et qu’il y avait le risque qu’elle replonge ; On apprend aussi que le garçon (incroyable) qui joue Mike était en cavale et s’est fait arrêter quelques heures après la dernière scène qu’il avait à tourner. Il a pris un an. Et plus distinctement, le générique nous apprend la mort d’Ilya, le vrai dealer de l’Upper West Side, campé ici par la gueule bien cassée de Caleb Landry Jones, qu’on a récemment croisé dans Twin Peaks, the return. Tout chez les Safdie tend à déstabiliser, sans pour autant perdre la chair de leur récit, la beauté d’une rencontre, la douleur d’une retrouvaille. La valeur de plan change constamment, entre la longue focale et le cinéma-filature. Quoi de plus normal que de les voir aujourd’hui investir le cinéma de genre.

The black balloon – Ben & Joshua Safdie – 2012

23. The black balloon - Ben & Joshua Safdie - 2012Le voyage du ballon noir.

   3.0   Film concept un peu lourdingue qui me rappelle l’égarement d’Hou Hsiao Hsien avec son ballon rouge, dans lequel un ballon rescapé d’un bouquet envolé, vadrouille dans les rues, débarque dans des discussions, surprend des âmes solitaires, avant d’aller délivrer certains de ses compatriotes prisonniers d’une camionnette. Prétexte pour filmer la vie new yorkaise, une fois de plus, mais on ne reconnait pas vraiment l’urgence et la fougue du cinéma des frères Safdie. Aucun intérêt donc.

John’s gone – Ben & Joshua Safdie – 2010

22. John's gone - Ben & Joshua Safdie - 2010Sous les petites affaires, le chagrin.

   6.0   John’s gone représente parfaitement ce que les frères Safdie sont capables de pondre sur le registre court, en jouant sur l’imprévisibilité des rencontres. Le vendeur de rouleaux de printemps, les jeunes dénicheurs de vieilleries et même cette jeune femme, avec laquelle le film s’ouvre (C’est-à-dire qu’on peut penser qu’il s’agit de la petite amie du personnage principal, campé par Ben, as always) qui était en fait une relation d’un soir, sont autant de situations fragiles mais ouvertes sur une infinité de possibles. La cerise ici c’est évidemment le surgissement d’un background dans une soudaine crise de larmes. Les Safdie n’avaient pas encore travaillés ce type de situation et l’essai est transformé haut la main, tant il surprend autant qu’il se révèle d’une pudeur extraordinaire. C’est un moment déchirant, vraiment, alors que John et « ses amis » sont en train de mater un match de boxe à la télévision. Des surgissements il y en aura d’autres dans ce film : Le voisin malveillant lorsque John traite les cafards de l’immeuble ; Un arnaqueur au couteau ; Le singe. Ça dure vingt minutes et il y a des idées aux quatre des coins des plans, situations, interactions.

Maiz (Murcof, 2002)

R-83599-1450453584-9200_jpegLe désert ocre.

     Voici un morceau plus récent, de ceux que je ne me lasserai jamais.  Une déflagration glitch à tendance minimal techno, à ranger quelque part entre Autechre, Matmos et Boards of Canada, le rythme y est indécemment soutenu, chaleureux, les incursions digitales distillées à la perfection, l’arrivée incognito du violoncelle à tomber par terre. Murcof aka Fernando Corona est mexicain, seul aux commandes de Martes, ce premier album merveilleux, il réitèrera ensuite sa mécanique mais me touchera nettement moins. Là j’aime vraiment ce qu’il dégage comme atmosphère, vivante et aride, argileuse et lunaire, et Maiz est le miracle dans le miracle : Cette façon qu’a le morceau de se construire son rythme, de s’incarner en captant la matière à sa disposition, chaque grondement, vibration, écho sourd ou bruits de bugs informatiques. Là on touche vraiment à ce que j’aime infiniment dans le genre.

En écoute ici :

https://www.youtube.com/watch?v=H9DBeVN-CS4

Week-end à Zuydcoote – Henri Verneuil – 1964

25. Week-end à Zuydcoote - Henri Verneuil - 1964Seuls (sur le sable).

   6.0   Intéressant de tomber là-dessus quelques jours après la découverte du Dunkerque, de Christopher Nolan, puisque le Verneuil lui aussi se déroule dans la poche dunkerquoise en pleine opération dynamo en mai/juin 1940. Et lui aussi est tourné directement sur les plages et la reconstitution est saisissante. On arrête pour la comparaison, quand Nolan jonglait avec les lieux et le temps, Verneuil reste sur cette plage et alentour, à hauteur de soldats français. Belmondo voudrait sortir de la poche et embarquer pour l’Angleterre, sans doute motivé par les affiches publicitaires « Passez-voir Zuydcoote le temps d’un week-end » placardées sur les vitrines des commerces évacués. Mais il n’y parviendra pas. Il fera le yoyo entre sa bande de copains, regroupés sur un dune à boire des cafés ou des whisky aux côtés d’une camionnette aménagée en bar, et le village un peu plus loin (Mais nous n’aurons aucune notion de la distance qu’il parcoure, comme s’il s’agissait de deux mondes distincts, comme si les dunes faisaient office de portail de téléportation) où il fera la rencontre d’une jeune française qui refuse de quitter la maison familiale malgré les récurrents bombardements qui la menacent. Verneuil alterne minutieusement ces instants d’attente, faits de petites camaraderies et de glissements doux, et ces rushs bombardiers qui se répètent à l’infini, toujours de la même manière, en jouant sur les hasards, la (mal)chance et constater qu’il n’y a plus vraiment de différence entre périr et s’en tirer. Probablement un peu trop formaté « divertissement » tant ses dialogues sont trop écrits, ses situations généralement téléphonées et son interprétation respire le jeu de stars – Qui font soldat autant que je fais curé. Mais bon film malgré tout.

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silencio


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