Le tourbillon du désir.
6.0 Jacques Becker plonge dans le milieu de la mode pour raconter cette histoire d’amour fou entre un couturier et la future femme du fils de son plus important fournisseur. En s’ouvrant sur la fin (la découverte du corps d’un homme sur le pavé dans les bras d’un mannequin vêtu d’une robe de mariée) le film se prive de l’éventuel suspense inhérent à ce traditionnel jeu de « suis-moi je te fuis » : L’intérêt ne sera donc aucunement de deviner si les amants finiront ensemble ou non. Ça finira mal, c’est une certitude. Et c’est ce plan de bascule, virant du corps inerte aux multiples branches d’un arbre décharné, qui nous explique que seul un flashback pourra retracer le drame.
Becker va décrire ce monde avec richesse et déploiement, autant qu’il le fera du couple (Antoine et Antoinette) ou d’un groupe de prisonniers (Le trou). Notamment les règles de pouvoir d’un poste sur un autre, d’une personne haut placé (elle-même surveillée par le couturier dictatorial) sur celles qui travaillent d’arrache pied dans l’ombre. Cette minutie quotidienne de la maison de couture se dissout très vite au profit de cette histoire d’amour déséquilibrée, où chacun semble prêt à abandonner sa vie, tour à tour, avant de retourner sa veste. Le film était précis, cadré, il devient désordonné, spirale. Le couturier qui règle sa vie et sa réussite sur ses créations saisonnières veut tout abandonner, il a signé son arrêt de mort. Je ne connaissais pas Raymond Rouleau, il est excellent en plus de ressembler outrageusement à Michel Piccoli. Outre la finesse des dialogues, il faut préciser que la mise en scène de Becker est aussi très inventive : Suffit d’évoquer cette fabuleuse partie de ping-pong.