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Archives pour janvier 2018



Dirty Dancing – Emile Ardolino – 1987

13. Dirty Dancing - Emile Ardolino - 1987Sexual warrios.

   8.0   J’ai longtemps refoulé mon plaisir éprouvé devant Dirty Dancing. Oui, je parle bien du film d’Emile Ardolino, sorti en 1987, avec Jennifer Grey et Patrick Swayze. Non pas que c’était un plaisir coupable, mais j’ai toujours eu l’impression que j’appréciais le film pour des raisons uniquement reliées au fait qu’il a bercé mon enfance, comme plein d’autres films, certes, mais aussi parce qu’il touchait un genre qui à priori n’était pas celui qui me parlait en priorité. Je le voyais comme mon film de midinette, relativement inavouable quand t’as quinze ans. Du coup j’en gardais de beaux souvenirs, le plaisir toujours intact à croiser quelques morceaux de la (très belle) bande originale mais je ne l’avais pas revu depuis longtemps. J’étais tombé dessus une fois il y a quelques années sans que ça me fasse ni chaud ni froid. Effet La La Land ou effet Danse avec les stars (Oui, je regarde, ça te pose un problème ?) ou le fait que j’ai remis la main récemment sur un dossier contenant moult musiques de films dont She’s like the wind ou le fait d’avoir revu Crazy Stupid Love (superbe séquence hommage – Gosling ferait un très beau Swayze dans un éventuel remake, j’en suis persuadé) ou simple hasard – tu choisiras – j’ai eu soudain très envie de revoir Dirty Dancing. Fallait bien réactiver le truc. Et en même temps, briser quelque chose : Je l’ai donc regardé en version originale. Ça au moins j’en suis certain, c’était la première fois.

     Et c’est une superbe redécouverte. Objectivement parlant, je veux dire. La plupart des gens (Ceux qui le défendent comme ceux qui vomissent dessus) vous diront que le scénario est écrit par une gamine de dix ans, mais franchement, s’il y a bien un domaine dont je me fiche éperdument, dès qu’il s’agit de comédie musicale (au sens large du terme) c’est bien le scénario. Ce qui relève de l’écriture cinématographique m’intéresse davantage c’est-à-dire la manière de filmer la danse, le choix de faire durer ou non telle séquence, le story-board, l’espace qu’on utilise, la volonté de faire parler un mouvement ou un regard plutôt que d’employer des mots. Il me semble que Dirty Dancing est un film passionnant de ce point de vue. Tout simplement car Emile Ardolino vise la comédie romantique et musicale qui va transpirer le sexe, la sueur, le désir. C’est palpable. Et le fait que la visée soit archi populaire rend la chose d’autant plus déroutante. Danser c’est un peu baiser, dans Dirty Dancing. Lorsque Baby débarque dans une soirée parallèle il n’est question que de cela : Les couples de danseurs font littéralement l’amour sur la piste, c’est punk, on se croirait dans une version érotico-musicale des Guerriers de la nuit. De la danse sale (comme l’indique le titre) mais que le film va ériger en sommet de sensualité par l’intermédiaire d’une histoire vieille comme le monde : la rencontre entre deux êtres opposés, la fille à son papa, encore adolescente, curieuse et inconsciente, et l’homme à femme, garçon rebelle au passé sulfureux.

     Leur histoire est la plus belle de toute puisqu’elle est impossible. L’enchainement pivot du film consistant à remplacer la partenaire habituelle de Johnny par Frances (Oui c’est Frances en VO, pas Frédérique, eh ouais, magie absurde des traductions) est à ce titre complètement improbable, mais on a envie d’y croire, tout simplement parce qu’il y a des échanges de regards qui sont des tremblements de terre érotiques, qui peuvent faire tomber les convenances et faire oublier les fines coutures scénaristiques. Avec tout plein de trouvailles pour accentuer cette dimension érotique, à l’image de la séquence où ils rampent l’un vers l’autre et récupèrent en play back les paroles de la chanson. De toutes les comédies musicales, c’est sans doute celle qu’on a le plus taxé de film pour midinettes et pourtant, c’est celle qui respire le plus le cul. Il y a quelque chose de très bestial dans la relation entre Frances et Johnny, et quelque chose de très violent dans le petit monde qui s’agite autour d’eux. Les vieux sont des voleurs, une femme est accouchée par un boucher, la caricature du gendre idéal s’avère être une belle raclure, le jeune gérant (aux faux airs d’Emmanuel Macron) veut lisser chaque spectacle à base de fox-trot ou pachanga. C’est un monde qui implose. Une page qui se tourne comme elle se tourne aussi pour Baby, devenue femme, de sentiments, de désirs et de sexe.

Ali Baba et les 40 voleurs – Jacques Becker – 1954

28. Ali Baba et les 40 voleurs - Jacques Becker - 1954Jacques et les 40 Fernandel.

   3.5   Il y a du soin dans la gestion du rythme et des plans. Becker reste un admirable cinéaste de l’espace. Il tente régulièrement des plans relativement longs, très composés, ne laissant pas contaminer sa mise en scène par l’hystérie de son acteur principal. Mais ça reste affreusement lourd. Les gags sont éculés, l’interprétation générale frise le ridicule. Il fallait bien qu’il mange, j’imagine. Et la farce n’est pas ce qui lui sied le mieux, alors avec Fernandel en figure de proue ça donne quelque chose d’un peu ringard au mieux, de carrément indigeste au pire, même en tant que simple divertissement familial.

K.O. – Fabrice Gobert – 2017

29. K.O. - Fabrice Gobert - 2017Fabrice Gobert a disparu…

   2.5   Après Simon Werner et la première saison des Revenants, Fabrice Gobert est logiquement entré dans la section « cinéaste à suivre de près ». La seconde saison des Revenants fut une telle douche froide (Et pour tout le monde, j’ai l’impression) qu’on en était venu à se demander si on ne s’était pas trop emballé sur son compte. KO viendra malheureusement confirmer nos doutes. Rien à sauver (Si ce n’est la photo et la sobriété de la mise en scène, annihilés par la nullité de l’ensemble) dans ce revival 90’s sans intérêt. Le film a vingt ans de retard mais on a vite le sentiment qu’il aurait été raté il y a vingt ans. Las de naviguer entre le vrai et le faux (On pense à The game), le malaise permanent (façon La Moustache), les dédoublements (comme dans la dernière partie de Mulholland Drive), les rebondissements ridicules en pagaille, le jeu volontiers over the top de Laurent Lafitte (que j’aime beaucoup habituellement) et le discours rebattu du combat / de la scène en tant que réalité parallèle – Le film s’ouvre même sur un match de boxe mais appuie bien sur l’idée que le vrai match (qui nous intéresse) se joue dans les tribunes, avant de s’envenimer en combats clandestins dans un clin d’œil franchement tout en sabots crottés au film schizophrène absolu qu’est Fight Club. Vraiment pénible à regarder. J’en ai soupé de ces trucs, qui plus est quand on se fiche, comme ici, de chaque personnage et de chaque retournement de situation.

Viens chez moi, j’habite chez une copine – Patrice Leconte – 1981

20. Viens chez moi, j'habite chez une copine - Patrice Leconte - 1981Trop chèvre, le boulet.

   6.0   Revu ce film de Patrice Leconte avec beaucoup de plaisir. Les dialogues, écrits par Michel Blanc, sont ciselés à merveille. Et les diverses rencontres (pas mal d’acteurs du Splendid) qui jalonnent le quotidien de notre couple accompagné de leur boulet, sont les plus belles idées du film. C’est aussi un très beau document sur le Paris 80’s, certes Leconte aurait pu encore mieux le filmer, mais on prend plaisir à traverser la ville de long en large. Sur les appartements parisiens aussi, que tu pouvais habiter en étant serveuse chez Mc Do et déménageur, apparemment. Giraudeau était un putain de beau gosse là-dedans. Et Liotard y est sublime. Gros bémol que j’y vois depuis toujours, ce qui m’empêche d’aimer le film autant que d’autres comédies dans cette veine : Je ne crois pas au personnage incarné par Michel Blanc, surtout je ne crois pas que ses potes l’aient pas laissé tomber plutôt que de continuellement lui faire comprendre qu’il est un boulet, égoïste, lâche et goujat. Dans La chèvre, de Veber, ça fonctionne (Campana doit se coltiner Perrin) puisqu’il faut retrouver la petite Bens et qu’on est dans la comédie d’aventures, mais là, dans un moule aussi réaliste, ça crée un déséquilibre il me semble. Ça manque de nuance. Car autant je trouve le film hyper cohérent dans ses enchaînements, sauf ce qui touche à Michel Blanc (qui par ailleurs est absolument génial, littéralement à baffer) problème est qu’il est de quasi chaque plan. C’est la grosse limite du film à mon goût, que j’aime par ailleurs beaucoup tant il me suit (et ses moult diffusions télévisées) depuis longtemps.

Opération peur (Operazione paura) – Mario Bava – 1966

16. Opération peur - Operazione paura - Mario Bava - 1966Le masque de la vengeance.

   7.0   Une femme pousse des cris tonitruants. Elle se réfugie dans la villa de la baronne où comme poussée par une force invisible elle se jette d’une fenêtre et s’empale sur une grille. On entend alors un curieux ricanement d’enfant, à la fois doux et machiavélique, mais on ne voit rien. La caméra se met à tourbillonner dans un village morbide, qui n’est qu’un amas de ruines. Voici une ouverture qui en jette et qui, comme souvent chez cet homme d’images qu’est Bava, est une merveille plastique, un dédale gothique, plein de couleurs, fait de ruelles que tu ne voudrais surtout pas traverser, et de recoins de malédiction. Le village semble dévoré par la végétation et la brume, et cette histoire de malédiction qui le frappe jusqu’à rendre ses habitants mutiques et cloisonnés dans des superstitions morbides, tire sa force d’une tragédie provenant d’une fille de sept ans, morte dans la villa vingt ans plus tôt, revenue hantée le village tout entier qui ne lui avait pas porté secours. Haut fait du cinéma de Bava à mes yeux, non loin de sa plus grande réussite qu’est Le masque du démon, auquel on pense beaucoup tant par son ambiance gothique que dans sa dimension plastique d’orfèvre, car tous les plans, notamment dans les intérieurs, sont magistralement composés.

La planète des vampires (Terrore nello spazio) – Mario Bava – 1965

10. La planète des vampires - Terrore nello spazio - Mario Bava - 1965L’envieux passager.

   5.5   Voici donc l’ancêtre d’Alien. J’en sais rien en fait, mais j’y ai beaucoup pensé. Ne serait-ce que dans le pitch : « Au cours d’une mission d’exploration, deux vaisseaux spatiaux atterrissent sur une planète inconnue et sont décimés par un mal mystérieux caché dans la brume. Seuls quelques-uns des astronautes parviennent à y échapper et découvrent bientôt qu’une entité extraterrestre prend possession des morts dans le but de fuir sa planète en péril ». Quelques idées semblent aussi avoir inspiré Alien notamment via la découverte de cette immense carcasse extraterrestre (Le grand moment du film, impressionnant, poétique) ou via le vaisseau qui ressemble fortement au Nostromo. Alien aussi dans son côté huis clos, uniquement guidé par des trouvailles visuelles et une lourde ambiance sonore. La (grosse) différence c’est que Bava pond ça avec rien et qu’il est difficile d’être happé dans le vertige, tourmenté par l’angoisse, contrairement à ce que génèrera Ridley Scott, quinze ans plus tard. La comparaison s’arrête donc là, le film est brillant visuellement avec le peu de ce qu’il a sous la main : C’est à la fois très coloré, très imaginatif (un vrai ballet de lumières vives) dans les extérieurs gothiques comme dans ces morbides intérieurs de vaisseaux. Mais aussi trop kitch, trop cheap, pas suffisamment radical, à l’image de ces combinaisons un peu ridicules et de ces dialogues franchement trop imposants et explicatifs.

Danger, Diabolik (Diabolik) – Mario Bava – 1968

09. Danger, Diabolik - Diabolik - Mario Bava - 1968Opération délire.

   6.0   Adaptée d’une bande dessinée italienne, Diabolik a tout du nanar de luxe idéal, conscient qu’il est un nanar et complètement décomplexé quant à ses libertés visuelles. En somme, c’est un peu l’anti-épisode de James Bond. Foutraque, car le scénario, l’histoire, la vraisemblance, l’issue, tout ça on s’en tape. Interprété n’importe comment car les acteurs on s’en tape aussi, du moment qu’ils cabotinent, dans l’excès comme dans l’apathie. Mais esthétiquement délirant sans jamais pourtant se perdre dans un kitch insupportable. Diabolik c’est aussi grotesque que sublime, sorte d’ancêtre d’Austin Powers et de Fantômas. Il n’est donc pas gênant d’y voir Michel Piccoli en inspecteur d’une seule obsession : Coincer l’audacieux voleur masqué (d’une cagoule noire à se tordre) qui lui file chaque fois entre les doigts. On va dire que Diabolik c’est ce qui pouvait arriver de plus incongru et jubilatoire d’une collaboration Bava / De Laurentiis / Morricone. Ça reste hyper gratiné, hein, il faut choisir le moment propice pour se le coltiner.

Louise en Hiver – Jean-François Laguionie – 2016

11. Louise en Hiver - Jean-François Laguionie - 2016La vieille femme et le chien.

   5.0   Sur une côte normande imaginaire, une vieille femme manque le dernier train qui lui faisait quitter – comme à chaque fin de saison – sa résidence estivale. Pas grave, elle reviendra demain. Mais ce qu’elle ignore, c’est qu’une tempête se prépare et s’apprête à la cloîtrer seule dans cette station balnéaire désertée, une année durant. Après le mauvais temps, elle retournera attendre le train, en vain. Puis elle se confectionnera une cabane de fortune sur la plage. Et fera la rencontre d’un chien, aussi seul qu’elle. Il manque sans doute à ce film archi épuré – jusque dans son très beau dessin, ses traits, ses fines textures horizontales et ses discrètes images d’enfance – une idée d’écriture forte ou de vraies trouvailles visuelles dans ce drôle de voyage immobile. La Tortue rouge, auquel on pense beaucoup, était plus réussi plastiquement, plus poétique aussi. Dans un cas comme dans l’autre, ça manque un peu d’émotion en ce qui me concerne. Mais c’est joli, ça oui.

Iris – Jalil Lespert – 2016

15. Iris - Jalil Lespert - 2016La fièvre au corps.

   6.0   On avait pu le constater devant sa version d’Yves Saint-Laurent (très éloignée de la virtuosité de celle de Bonello) Jalil Lespert, réalisateur, est un bon artisan, rien de plus, rien de moins, il ne faudra donc pas s’attendre à une œuvre originale et personnelle. Partant de là, Iris est un objet tout à fait passionnant. Déjà, on peut dire que je suis la cible idéale, puisqu’il réactive un genre, quasi exclusivement américain, tombé en désuétude depuis son pic de conception durant les années 90 : Le thriller érotique. Pêle-mêle, pour le meilleur comme le pire, j’ai des souvenirs d’ado d’Excès de confiance, Liaison fatale, Les nuits avec mon ennemi, Color of night, Sexcrimes, Harcèlement, entre autre. Je mets volontairement de côté Verhoeven (Basic Instinct) et De Palma (Body Double) car il y a là de vraies propositions de mise en scène et non des films que n’importe quel yes man aurait pu construire de façon identique. Lespert s’inscrit dans cette veine. On craint d’abord qu’il nous sorte un sous Gone Girl. Puis finalement ça semble plus tarabiscoté, moins mystérieux, davantage film de seconde partie de soirée sur une chaine hertzienne. Mais il fait les choses correctement, joue habilement des fausses invraisemblances (le jeu volontiers rentré de son personnage de banquier, qu’il incarne lui-même d’ailleurs) que des nombreux flashbacks et twists en rafale ou plutôt disons que l’on voit tout venir dans ce qu’on a l’habitude de guetter (Qui est la victime ? Qui est le méchant ?) mais pas du tout sitôt qu’on prenne le récit pour ce qu’il est : Un enchainement de grandes choses malheureuses et non une machination diabolique. Je ne voudrais pas en dire trop, mais le film s’en va de façon plus surprenante qu’il en a l’air, et s’avère plutôt émouvant, débarrassé de ces habituels affrontements finaux qui font le sel du genre. Et puis il joue sur le terrain de l’intimité sadomasochiste, on n’a rarement vu ça dans le genre, il me semble – La scène pivot, qu’on a pourtant compris avant de la voir, est vraiment forte. Coté mise en scène ça reste donc très scolaire, mais soigné dans le scolaire, musique sulfureuse comprise, et c’est exactement ce qu’on attend de ce type de film. Je recommande, donc.

BNSF – James Benning – 2013

18. BNSF - James Benning - 2013Vers l’obscurité silencieuse.

   6.5   La démarche est opposée à celle de RR même si, comme le dit mon fils « On dirait qu’ils sont jumeaux » d’une part car nous ne traversons pas l’Amérique cette fois, il n’y a plus qu’un seul lieu, c’est un voyage immobile, un tableau dont la surface est parcourue d’infimes évolutions éphémères. D’autre part car il n’y a plus vraiment de montage – Celui de RR a son importance, quoiqu’on puisse en penser – si ce n’est le parti pris de commencer ici et finir là, plutôt qu’à d’autres instants, à moins que Benning n’ait shooté entièrement ce que l’on voit, mais j’en doute.

     La contrainte temporelle n’existe pas (Le film s’étire d’ailleurs sur 3 heures et treize minutes) donc pourquoi ne pas avoir allongé la nuit, ôté un peu du jour, ou l’inverse, qu’importe ? Pourquoi ce plan plutôt qu’un autre, comme souvent chez Benning, mais plus encore ici puisqu’il n’y en a qu’un ? Interrogations parmi d’autres. Toujours est-il que si BNSF déploie par sa richesse visible et hors champ un imaginaire fort, l’expérience est repoussée aux confins de la patience, pour mon fils comme pour moi. RR c’est un blockbuster en comparaison de BNSF. Mais on y pense, forcément, mon fiston le premier : « On dirait le deuxième train de RR » Tu peux vérifier, il est incollable.

     Nous avons attendu le premier train en décrivant ce que nous avions sous nos yeux, jusqu’à sa profondeur infinie, en imaginant le hors champ ; Nous avons attendu le deuxième train avec une excitation intense (le tremblement de terre sonore qu’avait procuré le premier fut un choc) accentuée par cette inconnue : D’où va-t-il sortir, du fond gauche de l’écran ou au premier plan à droite ? Mais sitôt qu’on avance c’est plus difficile, on a parfois fait autre chose, on s’est un peu assoupi aussi – Il semble qu’il y ait treize trains, mais nous n’en avons compté que douze, le treizième s’est évanoui dans notre sommeil commun, à moins qu’il ne se soit brillamment caché derrière un autre, on gardera le mystère.

     Quid de savoir si la jubilation éprouvée lors de l’apparition du train vaut l’interminable attente de son apparition – J’ai parfois compté jusqu’à vingt minutes, vingt minutes de vent, de légers changements de luminosité, de petits bruits impossible à distinguer, d’un relief qui prend le temps de s’inscrire dans la mémoire – voire son interminable passage : Un train très long, probablement très chargé, est plus lent que les autres et serpente le plan (On ne doit pas être loin du kilomètre de voie ferrée, en visibilité) au ralenti durant plus de dix minutes ! Mais au moins il est là, objet de toutes les attentions, rassurant, tandis que son absence inquiète : « A quelle heure il arrive ? » L’expérience du réel, non plus sur un quai de gare mais devant un écran.

     « T’as mis sur pause, papa ? » m’a-t-il demandé un moment où le vent (Le désert des mojaves est très venteux) avait cessé. Et c’est vrai qu’il y a parfois des suspensions très gênantes, où l’on croit soudain arpenter le vide, notamment vers la fin, quand la nuit prend possession du décor, que le silence terrifiant l’envahit – comme il envahissait la campagne dans le premier épisode de Quatre aventures de Reinette et Mirabelle, d’Eric Rohmer : L’heure bleue. C’est l’heure inquiétante, ici. C’est très beau, mais il était temps que ça s’arrête car ça devenait vraiment inconfortable de se laisser bercer par cette obscurité silencieuse.

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