Mad Men – Saison 3 – AMC – 2009

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12/01/18

     Déjà, j’étais très impatient de connaître le choix des créateurs concernant la durée de l’ellipse. Quelque chose comme 1 an ½ avait respiré hors-champ entre les saisons 1 et 2. Ici, ce sera quelques mois, six tout au plus. Pourtant, j’ai d’abord craint cette curieuse entrée en matière de nouvelle saison. Les visions / flashbacks / souvenirs de Don Draper sur sa naissance, comme s’il était soudain frappé d’omniscience. L’avalanche de nouvelles têtes à l’agence, britanniques pour la plupart, depuis la fusion – Et Duck a dégagé, mais ça on le pressentait vu que c’était lui ou Don. Le licenciement d’un type, qui le prend mal et le fait savoir, mais qu’on ne connait ni d’Eve ni d’Adam. La double promotion de Pete et Cosgrove (Je sais pas pourquoi je ne peux pas appeler Pete « Campbell » ou Cosgrove « Ken ») en tant que co-directeurs de clientèle. Le retour « comme à la bonne époque, ou presque » entre Betty & Don, même si grossesse oblige on s’en doutait un peu. Trop de bouleversements d’un coup. Puis l’épisode gagne en profondeur à mesure qu’il se déploie, jusqu’à Baltimore, retrouvant ses marques, plutôt d’autres marques, qu’on a hâte d’apprivoiser. En fin de compte, j’achève l’épisode en me demandant comment il est possible d’écrire des choses aussi fortes, de proposer des situations aussi intelligentes (la relation entre Don & Sal, dans l’hôtel, dans l’avion, l’hôtesse, le groom, l’alarme à incendie, la campagne de pub « Limit your exposure » sur laquelle repose leur voyage : magnifique), d’en proposer autant en seulement 45 minutes et d’en laisser couver dix fois plus pour les épisodes à venir. C’est Mad Men, quoi. D’ailleurs, s’il s’ouvre sur la naissance de Don, l’épisode se ferme sur une autre puisque sa fille lui demande de lui raconter le jour de la sienne. Etrange de voir Don autant en difficulté face à ce souvenir (comme s’il l’associait à sa propre naissance, extra glauque, puisqu’enfant non désiré et mère décédée en couche) se stoppant brusquement, incapable d’en dire davantage avant que Betty ne prenne son relais. Saison à peine lancée et c’est déjà immense.

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22/01/18

     L’attirance à peine perceptible qui règne entre Peggy et Don depuis le début du show s’ouvre très largement durant cet épisode – Je ne serais pas surpris de les voir tous deux succomber au charme sexuel de l’autre assez vite. C’est sans doute lié au fait qu’ils sont sur une progression inversée. Peggy est de en plus en plus sexualisée. Don se situe lui dans une phase de désexualisation : Une alarme à incendie le privait d’une infidélité supplémentaire dans l’épisode précédent ; Là le cadre familial d’une fête scolaire l’empêche de se livrer à ses habituels jeux de séduction avec la jeune enseignante de sa fille – Campée par la sublime Abigail Spencer, la sœur de Daniel dans Rectify. Et si cinéma et publicité réunis (Pepsi voudrait lancer sa campagne marketing autour se da boisson allégée sur le final de Bye Bye Birdie, le film musical de Georges Sidney)  reliaient ces deux-là ou faisait naître quelques chose entre eux qu’ils ne soupçonnaient pas ? Je m’emballe peut-être après tout. Mais y a un truc entre les deux, c’est certain.

     C’est un épisode très bizarre du reste. Sans véritable ossature, sans enjeu majeur sinon que Don gère la perte de nombreux clients de l’agence et le destin du père de Betty qui perd vraiment la boule. Sinon que Peggy se rachète une jeunesse en allant draguer un jeune étudiant. Il y a quelque chose de cassé dans l’identité de ces deux personnages. Ils n’ont pas la même histoire, ni le même âge ni les mêmes intérêts, mais ils se réunissent dans une mélancolie commune : Quand Don caresse l’herbe que l’enseignante foule de ses pieds nus, Peggy chante Bye Bye Birdie devant son miroir, c’est une volonté d’ailleurs qui s’empare d’eux, un rejet brutal de ce qu’ils se forcent à être.

     Il y a quelque chose qui s’effrite imperceptiblement dans cette saison et qui serait peut-être le reflet de ce que va traverser l’Amérique dans cette année 1963. Si l’on apprend que le mariage de la fille de Roger Sterling se déroulera le 23 novembre 1963 soit le lendemain de l’assassinat de JFK, ce n’est pas un hasard je pense. Penn Station s’apprête à laisser place au géant Madison Square Garden. On constate aussi que Betty, même très enceinte, fume et boit toujours allègrement. Etranges années 60. Insouciantes autant qu’elles sont au bord de l’implosion. L’Histoire et l’Intime dialoguent toujours dans Mad Men. Il ne serait donc pas étonnant que l’arrivée du père de Betty dans le cercle familial bouleverse le semblant d’équilibre retrouvé – D’autant que c’est Don qui prend l’initiative de le prendre chez eux plutôt que de l’envoyer en hospice. J’attends de voir, hein, je nage dans les hypothèses, mais j’ai l’impression que l’Amérique gronde jusqu’à en faire gronder ses foyers et qu’ils ne vont pas tarder à entrer en irruption.

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26/01/18

     Après un épisode 3 en deçà, plus anecdotique, disons par rapport à l’excellence habituelle, puisqu’il fait office de parenthèse durant laquelle certains dont Peggy (qui saisit chaque occasion pour accentuer son indépendance) vont jusqu’à se faire un trip marijuana au bureau pendant que les autres filent à la garden-party (et son spectacle très gênant) de Jane et Roger Sterling – durant laquelle on retiendra l’échappée de Don et sa discussion avec un barman extra-lucide – pendant que Sally choure de l’oseille à son grand-père, l’épisode suivant resserre ses fondements dramatiques, notamment en brossant la délicate relation entre les enfants et leurs parents. Il y aura un affrontement entre Betty et son père au sujet de ses funérailles, une douce (quoiqu’un peu absurde : il lui laisse conduire la voiture familiale) complicité entre Sally et son grand-père, la cassure entre Peggy et sa mère au sujet de son emménagement à Manhattan, la mégalomanie d’un jeune client et héritier persuadé qu’il tient le nouveau sport national pour égaler les réussites de son paternel, et surtout, surtout, Don qui traverse une fois de plus ces minutes en fantôme en scrutant un moment donnée une vieille photo de ses parents. Et puis l’épisode se clôt dans le deuil et trouve, grâce au personnage de Sally (qui n’avait jamais été autant sur le devant de la scène) des instants absolument bouleversants, ici sur le perron de la porte d’entrée, là dans sa rage face aux éclats de rire inopportuns des adultes puis enfin couchée en larmes devant la télévision. Très peu de plans à chaque fois mais ils sont choisi avec minutie afin d’y restituer toute la puissance que chaque séquence mérite. Et puis j’ai adoré l’issue de cette campagne publicitaire autour de la boisson allégée et de Bye bye birdie, lancée en épisode 2. Tout est fait dans les règles, chapoté par un Sal si excité (par sa nouvelle étiquette de cadre commercial) qu’il en fait douter son épouse sur sa sexualité, mais les clients n’y croient pas et admettent leur échec sans savoir ce qui coince. Personne ne parvient à trouver ce qui cloche en effet, l’impasse, excepté pour Roger qui lâche, comme il sait si bien le faire, un : « Because she’s not Ann-Margaret ». Un Roger des grands jours.

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01/02/18

     Un épisode essentiel (Une fois de plus) et je ne dis pas ça uniquement parce qu’on y retrouve Abigail Spencer. Tu sais, l’enseignante de Sally, qui faisait une sensuelle apparition en début de saison. Là on passe le cap de la simple apparition, elle tient un vrai rôle, convoque les parents pour une rixe d’enfants et se retrouve bouleversé quand elle apprend que Sally vient de perdre son grand-père. Et on saura bientôt pourquoi lors de l’appel téléphonique qui suivra, dont le ton solennel (Elle appelle les Draper pour s’excuser d’avoir sur-dramatisé la situation) est vite secoué par une ambiance de flirt mutuel entre elle et Don, puisque c’est lui qui a décroché. Ce rapprochement dans la douleur et la fuite identitaire est d’autant plus absurde et inopiné que c’est le moment qu’a choisi le bébé pour se pointer. J’imagine qu’on va la revoir. Je crois les doigts pour qu’on la revoie beaucoup, même si ça veut dire que Don poursuit sa fuite. Mais là c’est autre chose qui se joue pour le moment, un accouchement vécu de part et d’autre comme un vertige existentiel. Tout ce qui suit ne fera qu’éloigner le couple, par le récit, le plan, les rêves. Et de cette froideur conjugale naît de mystérieux et/ou chaleureux échanges pour Don : Ici avec sa fille Sally, puis avec Peggy, puis avec le jeune papa /maton dans la salle d’attente de la maternité. Lorsque Don le croise un peu plus tard, il ne semble pas le reconnaître et esquive complètement son sourire. Quant à Betty, elle fait des rêves chelou, elle recueille une chenille dans la paume de sa main, voit ses parents morts dans sa cuisine et une serpillère pleine de sang. Un peu lynchien cet épisode.

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04/03/18

     Un mois sans voir un épisode de Mad Men. Aucune explication. Je ne sais pas trop à quoi c’est dû si ce n’est que j’ai vu beaucoup de films durant ce mois de février et aucun épisode de série. AUCUN. Alors que de nombreuses me font de l’œil. Alors que j’avais laissé Mad Men sur un épisode somptueux. Vraiment pas d’explication.

     Mad Men et moi sommes recroisés hier soir pour un épisode fantastique. Encore. L’un des plus beaux, tout simplement. D’une linéarité diabolique. Dune fluidité déconcertante. Dans lequel les propriétaires de l’agence viennent un 4 juillet pour proposer leurs désirs de restructuration.

     Comme un mauvais sort concerté, jeté par Joan mélancolique à cause de son départ imminent, Don qui se voyait déjà londonien, Roger agacé qu’on l’ait zappé dans le nouvel organigramme, Lane déconcerté par sa mutation dans une succursale en Inde, un rebondissement tondeuse à gazon, spectaculairement gore viendra perturber cette nouvelle donne hiérarchique qui n’avait promu qu’Harry Crane.

     Enorme séquence. C’est comme si Cronenberg débarquait dans La Party. Et puis ça nous aura offert deux répliques d’anthologie. Roger, d’abord, débarquant sur le tard : « Jesus, it’s like Iwo Jima out there ! » et Don, patientant aux côtés de Joan à l’hôpital : « One minute you’re on top of the the world, the next some secretary is running you over with a lawnmower ».

     L’épisode permet aussi de s’intéresser à Sally qui vit très mal la naissance de son deuxième petit frère Eugène, effrayée de voir en lui la réincarnation de son grand père décédé. Dans un final bouleversant, Don la console et lui parle du bébé qui prend forcément beaucoup de place mais qui est un être à part entière et qu’on va apprendre à aimer. Bob Dylan au générique. Song to Woody. Ou quand une série a la classe.

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07/03/18

     Le 7 n’est clairement pas le plus inspiré des épisodes de Mad Men, aussi bien dans sa structure par trois que dans le flou de ses enjeux sous forme de whodunits un peu lourdingues. L’épisode s’ouvre sur trois situations à expliquer : Peggy est au lit avec un homme ; Don se réveille le nez ensanglanté dans un motel ; Et Betty se prélasse sur un sofa ancien. L’occasion de revenir sous forme de flash-back sur les jours qui ont précédés ces trois situations. Rien de bien passionnant. Reste une hallucination de Don, drogué par un couple de routards, avec la vision de son père lui racontant des blagues sur son rocking-chair. Badant.

     Si l’épisode précédent nous apprenait que Betty était diplômée d’anthropologie, on découvre dans le 8 qu’elle parle couramment l’italien. J’en bavais. Bref, bien que ce soit pour le boulot de Don, c’est une escapade à Rome, en plein mois d’août, dans une vie parallèle auquel nous convie ce voyage. Au point qu’ils vont tous deux l’espace d’un instant, quand Betty se fait draguer par deux italiens, rejouer leur rencontre. Celle qu’ils auraient pu avoir. Celle dont Betty rêvait qu’elle soit reconduite ad aeternam – A son retour elle dit ne plus supporter New York. De son côté, Pete flirte avec la nounou de ses voisins de palier, puisque Trudy est parti une semaine en vacances. Je continue d’avoir beaucoup de mal avec Pete. On avance systématiquement d’un pas pour reculer de deux avec lui.

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12/03/18

     D’un côté, le couple Draper traverse une crise silencieuse. Tandis que le bébé et le client Hilton les réveillent chaque nuit, Betty est séduite par Henry Francis quand Don s’en va retrouver Suzanne, tous deux s’enlisant dans de périlleux mensonges. De l’autre, il y a Sal, personnage infiniment tragique qui se fait draguer par un des gars de Lucky Strike et se retrouve, puisqu’il a refusé ses avances et que le client veut lui faire payer, dans une fâcheuse posture. D’abord, Roger exige qu’il prenne la porte. Mais lorsqu’il s’entretient avec Don dans la foulée, on espère que ce dernier trouvera une solution au moins aussi intelligente que sa façon de tenir le secret de Baltimore. Mais Lucky Strike étant trop important il préfère confirmer la décision de Roger en accompagnant ça d’un cinglant « You people… ». Putain. Trop dégoûté, j’adorais Salvatore Romano. Et vu le bouleversant final « Kitty je ne rentrerai pas ce soir, j’ai encore du travail, je t’aime » peu de chance pour qu’on le revoie. Rarement on avait autant senti le poids de cette agence, de ses associés, de sa clientèle sur les petits responsables ou alors il faudrait remonter à l’épisode Freddy Rumsen. C’est le moment de dire combien cette saison aura perturbé le fonctionnement pantouflard attendu « des personnages ancrés qui ne sortent jamais du récit ». Joan est partie. Maintenant, Sal. Peggy & Pete sont courtisés par Duck Philips qui travaille pour une autre agence et il faut bien le reconnaître un peu délaissés par le récit. Tout est devenu très brinquebalant au point que si je ne savais pas Mad Men étirée sur sept saisons j’aurais pu penser, ici, qu’elle filait vers son crépuscule. Un peu à l’image du couple Draper. Qui sont de plus en plus beaux sitôt pris individuellement ou quand ils font semblant de ne pas se connaître – Cf épisode précédent. Betty semble retrouver toute sa maitrise et son pouvoir dès l’instant qu’elle fait face à l’homme qui s’immisce dans ses rêves – Et ira jusqu’à son bureau à l’improviste pour lui prouver qu’elle a le dernier mot. Et Don est d’une intense fragilité au contact de la jeune institutrice. Il parait que Matthew Weiner a demandé à Abigail Spencer d’écouter Suzanne, de Leonard Cohen, pour entrer dans le personnage. Quel beau personnage, bon sang. Et quelle magnifique actrice. A part ça on entend un moment donné sur le poste de radio le discours du 28 août 1963 de Martin Luther King. L’assassinat de JFK n’est plus très loin.

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14/03/18

     Fallait bien que ça arrive. A la faveur d’un hasard de clé de tiroir oubliée dans un peignoir, Betty fait connaissance avec la boite secrète de Don, autant dire avec son autre vie : Des photos de famille – sur lesquelles il apparait légendé « Dick » – côtoient un sacré paquet de cash ainsi qu’un certificat de divorce, entre autre.

     Entre-temps, Don se retrouve à filer un coup de main au frère de Suzanne, qui lui demandera de le laisser sur le bord de la route plutôt que de l’emmener là où sa sœur croit qu’il reconstruira sa vie. L’ombre du frère de Don plane fortement sur cette curieuse et éphémère interaction et le fait qu’il lui offre sa carte avant de le laisser partir rappelle qu’il ne l’avait pas fait pour son frère – se contentant de lui filer de l’argent pour acheter son silence, son évaporation, sa mort en un sens.

     Au milieu de tout ça, Sterling Cooper fête ses 40 années d’existence. L’occasion entre autre de saluer Don Draper pour son génie et son étroite collaboration. Le regard de January Jones à cet instant-là, fait partie de ceux qu’on n’oubliera pas de sitôt. La discussion entre Suzanne et Don, au sujet des différentes perceptions de couleurs, sur laquelle s’ouvrait l’épisode, entre en écho avec la situation silencieuse de Betty qui n’attend plus que l’affrontement : La couleur qu’elle attribuait depuis tout ce temps à son mari n’était apparemment pas la bonne.

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15/03/18

     L’affrontement tant attendu n’aura pas lieu comme on l’attendait. Après moult appels du pied, toujours esquivés par Don (qui aura fait ça toute sa deuxième vie, en fait) Betty finit par lui montrer la clé, ouvrir son tiroir, sous ses yeux, au moment où il allait la quitter le temps d’un week-end et filer dans les bras de Suzanne. Il lui faudra encore du temps pour accepter la situation, pour entrer dans la discussion.

     Cette séquence prend une place conséquente dans l’épisode. De façon très posée, dont Mad Men restera coutumière, Don s’ouvre tout en reconnaissant qu’il n’a jamais pu déballer un mensonge aussi grand, quand Betty écoute, silencieusement, tout en ne masquant pas sa déception et sa colère. Ça dure une éternité et c’est somptueux.

     Chacun ses larmes, c’est sans doute ce qu’il y aura à retenir de cette mise à nu. Deux douleurs qui s’affrontent mais un gouffre de contradictions qui s’ouvre. Don en tremble au point de faire tomber sa cigarette, au point de faire cogner les glaçons de son verre de whisky. Et Betty aura cet air de compassion / compréhension, cette main sur son épaule, cette douceur dans sa voix qui évoquent paradoxalement un choix à venir sans équivoque.

     Inutile de préciser que cet épisode bouleversant s’en ira sur une note infiniment bouleversante : Un dernier halloween en famille. Au premier trick or treat, un homme ouvre la porte, reconnait the gipsy and the hobo (Sally et Bobby), avant de lever les yeux vers les parents (Don et Betty) et de demander, en prophète, plutôt qu’en blagueur : « And Who Are You Supposed to Be? ». C’est à chialer.

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16/03/18

     Immense fin de saison. Après les larmes provoquées par cette putain de boite secrète, Matthew Weiner nous aura offert des trucs attendus mais traités avec une maestria totale (L’assassinat de Kennedy), des rires (l’agence parallèle improvisée : Absolument jouissif de voir notre fine équipe devenir soudain des résistants maquisards retranchés dans leur cellule) et encore des larmes (Betty & Don, les enfants, cette séquence de canapé comme une photo de famille qui s’évapore).

     La Betty mélancolique de la première saison aurait été anéantie par cette découverte mais bouleversée par les explications de son mari. La nouvelle Betty n’aura aucune pitié, aucune faveur à offrir à ces aveux tardifs. Et comme souvent dans ces cas-là ce sont les enfants qui trinquent en premier. Cette discussion dans le salon, d’une douceur et d’une tristesse sans nom. C’est Kramer contre Kramer qui rencontre Douglas Sirk.

     Mad Men fait régulièrement entrer en résonnances l’immense fiction qu’elle construit avec le réel des années 60. Les exemples sont légion et m’est avis qu’on n’a pas fini d’en trouver dans les saisons à venir, toujours est-il que l’évènement qu’on attendait tous car nous savions qu’il ébranlerait autant la série qu’il a ébranlé les Etats-Unis ce jour de novembre 1963, c’est la mort de JFK. Réguliers sont les épisodes qui font un clin d’œil à un fait réel. Rares sont ceux qui sont construits autour de l’un de ces faits. The Grown-Ups sera de ceux-là. Et c’est probablement parce que l’annonce débarque en plein milieu d’épisode – quand celui-ci ne cessait de montrer des téléviseurs allumés dans chaque scène – qu’elle s’avère puissante : Chacun avait sa journée avant que ça ne se produise. Chacun aura une toute autre journée, alors. La diffusion de l’information dans les familles ainsi que chez Sterling Cooper est un monument de montage et d’écritures, ni plus ni moins.

     Répercussions directes chez Sterling Cooper puisqu’à l’annonce de son rachat, Don a cette idée lumineuse de créer une entité parallèle en prenant sous son aile les éléments essentiels : Roger, Bert, Lane, Joan, Pete, Peggy et Harry. Il faudra passer par ce moment où les quatre actionnaires se virent eux-mêmes : « Well gentleman, I suppose you’re fired » après que les deux commerciaux « poules aux œufs d’or » n’aient absorbé leurs capitaux clients. Cet élan résistant prononcé par Lane est l’issue qu’on n’avait même pas osé rêver.

     Si ce final season enterre un couple, il marque aussi le retour de Don dans la roue professionnelle, tant il fait table rase de ses divergences diverses en allant reconquérir Roger, Pete et plus difficilement Peggy, dans un échange de larmes discrètes absolument étonnant. La plus belle image restera celle de cet appartement improvisé bureau partagé, dans lequel Trudy fera entrer le petit déjeuner.

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