L’amour est une fête – Cédric Anger – 2018

29. L'amour est une fête - Cédric Anger - 2018Cum on feel the noize.

   6.0   Il a réalisé quatre films, j’en ai vu trois à ce jour, adoré un, oublié un autre, et s’ils ne révolutionnent rien chacun dans leur style/genre, j’aime le soin que Cédric Anger apporte à leur univers. A l’âpreté et la méticulosité quasi parfaites de La prochaine fois je viserai le cœur, inspiré de l’affaire Alain Lamare, répond la nonchalance et l’extravagance de L’amour est une fête, qui pénètre dans le monde du porno du début des années 80. Bref, absolument rien à voir.

     Autant l’aspect réunion d’acteurs-copains-comme-cochon et franchement relou dès l’instant qu’ils tournent  ensemble (Mon idole, Narco, Les infidèles…) Canet/Lellouche ne m’inspirait pas des masses, autant la perspective de voir d’une part Anger s’attaquer à ce projet casse-gueule et d’autre part voir comment on peut raconter le porno parisien de 1982 en parallèle de ma découverte de The deuce, série qui raconte la naissance du porno new yorkais en 1971, m’excitait grandement. La comparaison s’arrête là, ils ne jouent absolument pas dans la même cour.

     C’est un film très bizarre. D’un côté ça ne ressemble pas du tout à un film dans lequel on s’attend à croiser Canet & Lellouche, tant la dimension comico-beauf qu’ils émanent, est souvent évacuée au profit d’une chronique qui ne se vautre que rarement dans la suffisance et la sur-écriture. D’un autre coté c’est un Anger un peu raté tant le film d’ambiance qu’on attend de lui est aussi parfois contaminé par ce duo trop imposant et une construction un peu informe, dont on aurait bien condensé la première heure. 

     Si Canet n’avait jamais été aussi bon que dans La prochaine fois je viserai le cœur, justement, il l’est une fois de plus ici, en flic infiltré dans le peep-show pour enquêter sur les affaires de blanchiment. Lellouche moins, mais on s’y attendait, surtout le temps d’une scène sur un terrain de tennis, qui en plus de s’avérer complètement inutile grimpe à 7 de ridicule sur l’échelle de Chacun sa vie. Le reste du casting est parfait. Aussi bien le producteur barré, joué par Michel Fau que le réalisateur nounours joué par Xavier Beauvois. Sans parler de l’indice nichons très élevé, évidemment.

     Si le film bascule du bon côté à mes yeux, c’est pour sa dernière demi-heure, en gros, car je comprends qu’il se fiche de son histoire d’infiltration, qu’il se fiche de filmer le duo, qu’il se fiche de filmer des nichons : le film tient sur le même fil que les tournages pornos qu’il raconte, fasciné par cette ambiance pré-numérique, qui découle de 68, où les gens s’amusent, où ces types considèrent le porno comme de l’art, où les actrices rêvent encore de devenir de vrais actrices hors du circuit porno. Je trouve L’amour est une fête très proche d’Un couteau dans le cœur, en fin de compte. Gonzalez et Anger redonnent un sens plus sensuel à la nostalgie. La fin est superbe, en plus, avec sa quête lumineuse guettée par la mélancolie crépusculaire. C’est 1982 qui s’en va : La pellicule dans le X va bientôt disparaître et le Sida va arriver.

4 commentaires à “L’amour est une fête – Cédric Anger – 2018”


  1. 0 Jordan Kajol 12 mai 2019 à 10:38

    Déception totale.

    J’ai adoré « La prochaine fois je viserai le coeur » mais là pas du tout accroché à ce film qui voulait être très léger et s’avère au final à mes yeux tout sauf ça, et vraiment peu drôle alors que son sujet ainsi que son titre pouvaient le laisser penser.

    Honnêtement pour avoir vu nombre de pornos de l’époque (en majorité les films Alpha France produit par le très intelligent et cultivé Francis Mishkind, patron légendaire de la boîte), c’est-à-dire tournés entre 1978 et 1983 -bien que le sommet soit atteint entre 1975 et 1977 à mon avis-(le dernier en pellicule étant de cette année), ils sont largement plus joyeux, drôles que ce « L’amour est une fête ».

    Alors il y avait sans doute des réalisateurs plus bourgeois que d’autres (Mulot par exemple ou Barny à l’inverse de Kikoïne et Leroi plus proches par exemple de Cronenberg d’une certaine manière dans leur façon intellectuelle et organique de présenter le sexe) mais surtout les films avaient beaucoup d’humour et de situations drôles.

    Là si j’en ai compté deux c’est déjà bien dans « L’amour est une fête »). Et c’est dû essentiellement aux seconds rôles, Xavier Beauvois en réalisateur et Michel Fau en producteur (avec un côté très barré)

    Lellouche et Canet sont peu aimables c’est le moins que l’on puisse dire, les deux comédiens ne sont pas ici dans leur meilleur rôle, d’ailleurs j’ai trouvé Canet largement moins bon ici que dirigé par le même dans « La prochaine fois je viserai le coeur » où il excellait. Lellouche a un côté beauf assez vite crispant.

    Les filles sont jolies, mais c’est aussi une facilité de recourir aux actrices porno (dont Jade Laroche) pour des rôles qui auraient très bien pu être interprétés par des actrices non X (je ne pige pas à ce niveau là).

    Photo pas terrible, longueurs dans le dernier tiers, et surtout impression de tourner autout du pot sans vraiment aller dans les détails non plus (alors que « Truands » par exemple avec ses énormités et ses moments cultes au moins allait au bout des choses).

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  2. 1 silencio 13 mai 2019 à 14:07

    Merci pour votre message,
    J’imagine qu’une partie de notre différend se joue sur notre culture / attachement à ce monde. On voit que vous connaissez bien le sujet ce qui sera moins mon cas, du coup je suis peut-être plus indulgent.
    Je pense pas qu’il se veuille si réaliste. Enfin si, disons que l’on sent qu’il est documenté, mais qu’il agit surtout dans une ambiance ouatée, un spleen qui a plus à voir avec l’idée que c’est la fin de ce monde, donc qu’il soit moins « drôle » ne me choque pas réellement. Les approches de Cédric Anger sont fascinantes, je trouve, justement parce qu’il n’aborde rien come n’importe qui l’aurait abordé, que ce soit ici, ou dans l’infiniment plus réussi et fort (je suis d’accord avec vous) La prochaine fois je viserai le cœur. Mais il y a une vraie mélancolie ici, qui m’a touchée.

  3. 2 Jordan Kajol 13 mai 2019 à 17:06

    En fait si on veut être puriste : )

    Anger filme en vidéo alors qu’il évoque dans son film y compris sur la dernière parenthèse temporelle une époque où les films étaient tous tournés en pellicule. Il aurait très bien pu utiliser de la pellicule lui-même pour parler d’un moment de transition entre le passage du 35 mm à la vidéo

    Il aurait par exemple pu introduire une séquence qui nous laissait comprendre que les réalisateurs avaient abandonné la pellicule au profit de la vidéo et des conséquences qui allaient frapper l’univers du X : beaucoup moins de moyens, des salles spécialisées, la taxation à 33%, etc

    Je ne comprends pas bien en fait pourquoi il a décidé de filmer en vidéo ce qui pouvait l’être en pellicule. Peut-être un choix, technique, esthétique. Mais je trouve cela très discutable, d’autant que je n’aime pas la photo.

    Sinon le film est absolument porté par l’idée d’un monde qui s’évanouit et d’un autre qui surgit et qui ne sera plus du tout le même qu’avant. Oui il y a de la mélancolie mais je trouve totalement forcée dans le film, les dialogues sonnent parfois faux, la scène de filature par exemple m’a semblé pénible. Mais je dois dire que Lellouche n’est pas terrible ici.

    Dans « La prochaine fois » il ne donne aucune réponse et c’est cela qui fait sa force : il laisse sur des sensations, sur l’immersion dans le quotidien sans juger, juste en montrant des actes et un homme du quotidien.
    Dans « L’amour est une fête » la patte est beaucoup plus lourde, et fondamentalement je ne trouve pas que ce soit drôle.

    Sinon, petite correction : c’est bien Francis Mischkind (avec « sch ») pardon à lui : )

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  4. 3 silencio 20 mai 2019 à 14:22

    Quoiqu’il en soit,
    Merci pour toutes vos précisions.
    J’ai tendance à y voir plus de « bonne choses » que de mauvaises, c’est vrai, mais dans l’ensemble je suis assez d’accord avec ce que vous en dites. Le film ne fait pas toujours les bons choix et se vautre un peu dans une mélancolie appuyée. Mais je trouve que c’est un film plus fragile que ce qu’il laisse paraître (la présence de ses deux stars notamment) voilà pourquoi il me touche plus qu’il ne me gêne.

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