Inception – Christopher Nolan – 2010

Inception - Christopher Nolan - 2010 dans * 2010 : Top 10 Inception

Sit down roller coaster. 
And tears.  

     9.0   Si Dunkerque, plus tard, concocte trois films de guerre en un seul, avec Inception, Nolan navigue autant entre les niveaux de rêves qu’entre les genres, puisqu’on est à la fois dans le film d’espionnage (la mission consistant à infiltrer le cerveau d’un riche héritier en lui administrant une idée), le film d’action (La séquence du couloir et de l’ascenseur sous pesanteur, pour ne citer qu’elle, ferait pâlir n’importe quel film d’action) mais aussi le pur mélodrame, puisqu’il n’est question que de deuil impossible.

     Si la mission investit en effet les rêves d’une cible, le film, lui, plonge dans les souvenirs torturés de Cobb, brillant espion extracteur, de plus en plus malmené par des vieux démons : D’une part sa défunte femme et ses enfants (qu’elle a jadis laissés en se suicidant) apparaissent dans les rêves de chacune de ses missions, au coin d’une rue ou dans la foule de figurants, créant un vertige plutôt perturbant, d’autre part car il utilise après chaque sortie de rêve un procédé de vérification à base d’une toupie (qui ne s’arrête pas de tourner si le rêve se prolonge) prouvant son instabilité face à cette frontière, devenue quasi invisible, entre rêve et réalité.

     Il faut attendre le dernier tiers du film pour que nous soit révélées les causes de cette disjonction : Cobb a jadis visité ce qu’on appelle les limbes. Autrement dit un niveau de rêve hyper avancé duquel on peut ne jamais revenir, où les minutes dans la réalité sont des années tout en bas. L’idée ô combien bouleversante d’Inception se situe dans cet espace créatif-là, à la fois exaltant (un monde façonné à notre image, où il s’agit de se prendre pour son Créateur, où l’on peut ne pas choisir entre une maison et un appartement, pour reprendre les mots de Cobb) mais dangereux puisque quoiqu’on finisse par croire (Il a vieilli avec sa femme là-bas avant de revenir, jeune, dans le monde réel) ce n’est pas la réalité. C’est du voyage dans le temps, pur et simple. Sorte de pendant mental d’Interstellar, en somme.

     Comprendre Inception de fond en combles, à en extraire les moindres détails et les étaler sur les forums n’est pourtant pas du tout ce qui m’intéresse. C’était déjà ça à l’époque de Matrix, vers lequel ce film de Nolan semble s’approcher et si ça m’avait titillé d’en ouvrir et fouiller les tiroirs je m’étais vite rendu à l’évidence que ce n’était pas tellement mon truc. Non, ce qui fonctionne à merveille ici, c’est cette plongée, complètement hollywoodienne dans une imagerie typique de l’action movie (Mission impossible, Au service secret de sa majesté) revisité par la technologie actuelle qui permet de faire des choses incroyables en terme de rythme tout particulièrement (la dernière heure du film c’est du jamais vu à ce niveau-là, Inception montrant les rêves dans les rêves, avec les mêmes personnages sur quatre temporalités différentes), mais aussi visuellement lorsque la ville de Paris se referme sur elle-même, lorsque les magasins explosent au ralenti, lorsque des rangées d’immeubles s’effondrent peu à peu dans l’océan, lorsque l’on assiste à un combat sous pesanteur.

     Alors certes, c’est une grosse machine, cent cinquante minutes qui filent à cent mille à l’heure,  il faut passer outre des codes de cinéma d’espionnage usés jusqu’à la moelle, avec son installation, ses rebondissements en rafale, son utilisation musicale (Le score de Hans Zimmer occupant 95% de l’ambiance sonore), sa narration pédagogique : en permanence, les personnages expliquent le déroulement de l’action, afin de former le personnage nouveau, incarné par Ellen Page, sur lequel on se projette. Ce n’est pas gratuit, mais heureusement qu’elle est là, disons, autrement ce serait imbitable. Après la projection, que l’on ait tenté de saisir chaque morcellement de l’histoire ou que l’on ait simplement été véhiculé par la dynamique du film, on est lessivé, quoiqu’il en soit. Ça fait presque office d’attraction forte.

     Mais la grande réussite d’Inception est d’avoir atteint la combinaison alchimique et souvent paradoxale voir casse-gueule entre film d’action et casse-tête, si bien que celui qui serait réfractaire à l’un pourrait tout aussi bien prendre son pied dans l’autre. Donc, le film peut se voir comme un récit de science-fiction où il s’agirait de cambrioler les rêves, d’en extraire des éléments (l’extraction) ou d’en y injecter (l’inception) dans une logique qui tiendrait entièrement du récit d’espionnage, mais tout aussi bien comme un film d’action nouveau, non au sens où il réinvente véritablement mais au sens où il prend des risques incommensurables à jouer sur différentes strates temporelles. On est moins vers quelque chose de cérébral que dans une version 2.0 de Mission : impossible, grosso modo.

      Lors de sa sortie en salle il y a huit ans, j’y suis allé deux fois. Moins pour comprendre et démêler des zones d’ombre que pour prolonger le plaisir, l’exaltation qui se dégage de chaque plan, chaque séquence. J’y suis retourné comme on remonte dans un manège. Inception est un rollercoaster, certes (le plus beau depuis quand ?) mais c’est sa mélancolie qui me fait l’aimer encore davantage aujourd’hui. C’est un grand film d’amour, sur une âme perdue, seule face à ses démons, ses souvenirs cruels, sa temporalité disloquée. Aujourd’hui, je me dis même qu’il est presque aussi fort émotionnellement qu’Interstellar. Bref, ça faisait 4 ! Comme le nombre de rêves imbriqués à la fin. Et je le reverrai encore, sans problème, d’autant que c’est comme Titanic, ça passe en un claquement de doigts.

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