Réveil dans la terreur (Wake in fright) – Ted Kotcheff – 1971

07. Réveil dans la terreur - Wake in fright - Ted Kotcheff - 1971Errance au bout de l’enfer.

   8.0   Le film s’ouvre à peine que la violence se loge déjà dans le moindre recoin d’absurdité. D’abord dans ce plan circulaire dévoilant une ligne de chemin de fer et un désert ocre à perte de vue d’où s’échappent quelques bicoques de bois. Puis dans ce bruit d’horloge qu’on  entend plus que distinctement dans la salle de classe, avant la sonnerie qui marque le départ en vacances. Puis quelques instants plus tard, dans le « shut up » du barman qui vient interrompre la douce mélodie de John Scott. On n’est pas encore dans les tréfonds de l’Outback mais on y glisse progressivement.

     Wake in fright, film rêvé, réalisé en 1971, annonce, pour rester dans le bush australien, aussi bien Walkabout, de Nicolas Roeg que Mad Max, de George Miller, et plus largement, Délivrance de John Boorman, Chiens de paille, de Sam Peckinpah, Cockfighter de Monte Hellman, La dernière maison sur la gauche, de Wes Craven voire même le plus récent Wolf Creek, de Greg McLean. Ce qui frappe en premier lieu devant la découverte de ce film, c’est que tout s’inspire de Wake in fright mais rien ne le devance, sinon le plus urbain Wanda, de Barbara Loden. Jamais nous n’avions vu le bush filmé de la sorte. Jamais nous n’avions pensé tutoyer à ce point ses enfers. Jusqu’à virer au film d’horreur en lui faisant respirer le reportage ethnographique – confirmé par le panneau final – à la Jean Rouch, quand il fait La chasse au lion à l’arc.

     Avant de s’intéresser à la guerre du Vietnam par le prisme d’un vétéran traumatisé, montagne de muscle qui détruit tout avant d’éclater en larmes, Ted Kotcheff avait peint ce pur cauchemar, qui restera quarante années invisible, dans lequel il nous embarque – à renfort de cris et bourre-pif – aux crochets d’un instituteur de campagne qui lors de son voyage vers Sydney pour ses congés, va se transformer au gré de rencontres diverses avec les autochtones qui ne vivent que pour la chasse, la biture et la baston, en vagabond accroc au jeu et à la bière, avant de se révéler tueur de kangourous.

     C’est un voyage. Les vacances de noël les plus perturbantes, brulantes, poussiéreuses, ivres, asphyxiantes, qu’on peut voir sur un écran. Un voyage entre le trou du cul du monde et Sydney, mais qui très vite, stagne dans une ville minière nommée Bundayabba. On dirait une farce. A moins que ce soit le nom d’un monstre. Toujours est-il qu’il semble impossible de s’en échapper : La temporalité nous échappe, la géographie est impalpable. Lorsque vers la fin, John récupère sa valise dans un tripot, il dit qu’il l’a oublié la veille mais ne sait plus très bien si ce n’était pas la semaine dernière ou dans une autre vie. C’est une plongée qui va plus loin qu’une simple plongée objective : Il y a une fascination pour cet enfer, pour sa sauvagerie, qui en fait un film aussi génial qu’il peut être malaisant.

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