Kill Bill, volume 1 – Quentin Tarantino – 2003

32. Kill Bill, volume 1 - Quentin Tarantino - 2003La mariée était à cran.

   8.5   C’est très étrange de revoir cette moitié de Kill Bill, aujourd’hui. D’abord parce que c’est le quatrième film de Quentin Tarantino et que depuis, il a sorti quatre films supplémentaires, tellement différents et puissants chacun dans leur registre, qu’on a oublié à quel point Kill Bill, déjà, frappait un grand coup. Ensuite parce que je ne l’avais jamais revu, depuis sa sortie vidéo. Découvrir des films au cinéma ne faisait alors pas partie de mon hygiène de vie. C’est quand je vois ces films-là que j’ai un petit pincement, une pointe de regret : Découvrir un film en salle ça change souvent beaucoup de choses. C’est d’autant plus important dans ce cas-là, dans la mesure où les deux films ne sont pas sortis en même temps tandis que moi, je les ai découvert coup sur coup. Ça m’a permis de m’apercevoir que si le film avait gravé beaucoup en moi, mon esprit, lui, mélangeait très largement les deux volumes. Qu’importe, grâce à ma découverte récente de Lady snowblood, j’ai donc revu ce premier volet de Kill Bill. Celui que j’ai eu tendance à préférer à l’époque. Affaire à suivre mais ça m’étonnerait que ça change.

     Kill Bill, volume 1 peut être abordé sous l’angle de la pépite récréative mais s’il y a un enjeu il serait de l’ordre de l’hommage multiple, plus encore que d’habitude. Une obsession pour son auteur de relier des genres, des cultures de cinéma qui font ce qu’il est devenu lui aujourd’hui. On peut aussi se dire que Kill Bill joue contre ses précédents films qui jusque-là jouaient l’ambivalence du récit et la puissance des dialogues : plus formaliste, Kill Bill travaille davantage l’image, le noir et blanc d’abord, la couleur ensuite, de l’anime au duel enneigé tout droit sorti d’un western, des imposants costumes aux nombreuses giclées de sang. L’autre enjeu et pas des moindres à mon avis c’est le leurre, faire croire à un film de vengeance tout bête, d’une mariée, enceinte, laissée pour morte, mais déplacer les curseurs en faisant le pari que les plus beaux personnages seront les méchants, enfin ces personnages qui se dressent sur la route de ce personnage moteur. Oren Ishii est fabuleuse et pas seulement parce que Tarantino lui offre un chapitre pour déployer son background – dans un manga aussi violent que déchirant – elle est la cible mais aussi le cœur – la naissance de la vengeance, la naissance de l’hommage : c’est elle la Lady Snowblood des années 70.

     Il faudrait aussi parler de l’originalité de la construction – Quelle audace d’entamer cette vengeance par sa deuxième cible, parce qu’elle s’avère moins cinégénique, moins cathartique – son pouvoir de jubilation permanent, sa brièveté (ce sera le film le plus court de Tarantino avec Réservoir dogs) et sa merveilleuse façon de canaliser le hors champ. Bill est magnifique dans ce volet, justement car on ne le voit pas, il laisse la place aux femmes. Ce premier volet est surtout une affaire de femmes, par ailleurs. Et musicalement c’est à tomber et justement car là aussi il s’agit de tout mélanger, de Nancy Sinatra à Santa Esmeralda, en passant par Meiko Kaji et Bernard Herrmann. Mixture qui à l’instar des chorégraphies semblent reliées à son personnage et son évolution, donc c’est à la fois grossier et très stylisé. Formellement je jubile (pas toujours : moins fan de l’ouverture en noir et blanc hyper contrasté) ne serait-ce que dans ces savants plans-séquences, le parfait agencement de ses montées en puissance, ces mouvements de caméra impossibles dans le palais pendant le Woo hoo et que dire de ce duel final avec ce bruit régulier du bois qui une fois rempli, rejette l’eau et se cogne contre la fontaine.

     Kill Bill est parcouru d’une somme d’idées brillantes. J’imagine volontiers qu’on peut se sentir enseveli sous sa virtuosité malade, mais c’est monstrueux, vertigineux sitôt qu’on accepte le pari. Comme souvent chez Tarantino, cela dit. Moi avec le temps j’aurais tendance à dévaluer Boulevard de la mort, sans doute car ce n’est que du grindhouse, du bon, certes, mais ça manque d’enjeu, on ne dépasse jamais la dimension grotesque – D’autant que ça fait trop écho à la daube de Rodriguez, avec laquelle il « partage le programme ». Kill Bill a davantage d’amplitude. Bref c’est assez exemplaire. Ça l’est tellement, in fine, que je me demande si ce n’est pas la quintessence du cinéma de Tarantino. Si c’est évident pour certain, ça l’est moins pour moi, à priori, mais ça m’a cette fois beaucoup traversé l’esprit à la revoyure de ce premier opus de Kill Bill. Même si je sais pertinemment que Pulp Fiction n’est pas détrônable dans mon cœur, j’aurais tendance à dire que oui, Tarantino est au sommet de son art.

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