Rhapsodie en jaune.
4.0 On a demandé à Timothy Spall de faire des grimaces, bougonner, grogner, jouer de ses sourcils et sa mâchoire, alors il s’en donne à cœur joie et cabotine à l’excès. L’autre problème du film de Mike Leigh c’est le jaune. C’est un film jaune. Ok, les toiles de Turner étaient faites d’embrasements ocres-écarlates, mais était-ce une raison pour accompagner chaque scène d’un filtre jaune, d’un ciel jaune, de cloisons jaunes, de costumes jaunes, de cheveux jaunes ? En outre, le film est un petit musée des merveilles, bien programmé et cadenassé, dans lequel chaque plan semble faire lourdement écho aux œuvres du peintre, citant laborieusement Le dernier voyage du Téméraire, Le Négrier, Lever de soleil avec monstres marins et j’en passe. Et dans lequel chaque personnage est vide, d’incarnation et de considération, puisque le peintre, et Timothy Spall dévorent tout. Triste de voir un truc si dévitalisé, si sage, qui filme sagement un type qui est tout le contraire : animal, excentrique, alcoolique, qui crachait sur ses toiles entre deux coups de pinceaux, utilisait du jus de tabac entre deux traits d’aquarelle. Leigh serait plus du genre à se branler sur ses images, lui, en se rêvant, le temps d’un film, comme le William Turner du cinéma. Je retiens quelques jolies choses, malgré tout, enfin disons qu’on a le temps de chercher des choses à aimer tellement c’est chiant, donc au bout du compte on en trouve. Plastiquement je me moque du jaune, mais outre le jaune, c’est beau, quand même.