Publié 19 février 2019
dans Jacques Audiard
De sang et d’or.
6.5 C’est un Jacques Audiard tout juste auréolé d’une palme d’or (Pour le très discutable Dheepan) qui s’en va tourner un western en Espagne, bien que l’action se déroule en Oregon, en 1850. Il part avec John C. Reilly (C’est lui qui est à l’origine du projet) et Joaquin Phoenix, qui incarneront donc les frères en question, deux tueurs à gages, mais aussi avec les chercheurs d’or qu’ils traquent, campés par Jake Gyllenhaal et Riz Ahmed. Casting quatre étoiles, en somme.
Si le film manque clairement de souffle, tant il est tout en introspection, peu dans la démonstration – C’est quasi de la psychanalyse entre cow-boys – et qu’il manque de passion, tant il est verrouillé dans sa dynamique, on s’y attache au fur et à mesure, proportionnellement à l’intérêt qu’on porte à son couple de frangins, d’abord longtemps antipathiques avant qu’ils ne deviennent de beaux personnages, tout en rancœur et mélancolie, jusque dans ce magistral final en forme de retour aux sources désenchanté.
Il faut donc s’armer de patience, ce qui n’est pas si difficile puisque l’image est belle et qui dit western, dit déplacement, chevaux, grands espaces, feux de camp, et qu’Audiard restitue cela à merveille. Il faut alors prendre comme ils viennent les quelques sublimes instants qui jalonnent le récit, notamment ce point culminant d’union insolite et nocturne, face à des tireurs embusqués puis dans une récolte d’or, séquence magnifique. C’est pas sans défauts, mais c’est le plus beau film d’Audiard depuis Un prophète, pour moi.
Publié 19 février 2019
dans Cédric Kahn
Une vie d’amour et de foi.
6.0 Difficile de savoir ce qui motive tant Cédric Kahn à s’essayer systématiquement à autre chose, un autre genre, dans un nouveau lieu, avec de nouveaux acteurs. Quel point commun y a-t-il entre Les regrets, Une vie meilleure, Vie sauvage et La prière ? Quatre films sur ces dix dernières années, quatre films singuliers, pas tous de la même qualité, mais tous de qualité, au sein desquels la griffe de l’auteur n’est pas si évidente à détecter. Ça n’empêche pas ce dernier film d’être assez réussi dans son ensemble. On observe une donnée nouvelle ici : Le film est dépourvu de star – Ni Attal / Tedeschi ni Canet / Bekhti, ni Kassovitz / Sallette. On connait Anthony Bajon pour son apparition brève mais géniale dans Les ogres, et Damien Chapelle grâce à Marie et les naufragés mais c’est tout (Ou presque : Un petit rôle pour Hanna Schygulla, un autre plus petit encore pour Magne-Håvard Brekke) et ça renforce quelque chose, rend le film sinon plus naturaliste, plus empathique disons, plus proche d’une certaine authenticité convoitée, que ce récit de guérison par la foi et l’amour est à même de convoquer. C’est un beau film, sans réelle fausse note, toujours à la bonne distance, à l’image de ces échanges que Kahn ne filme jamais dans un banal champ / contrechamp mais plutôt régulièrement en trois (types de) plans successifs : d’abord d’ensemble, avant d’enchainer sur le visage de l’un, puis finir sur le visage de l’autre – à la manière de la grande scène pivot dans Hunger, de Steve McQueen. Si je suis moins convaincu par l’aparté miracle dans le brouillard sur la montagne, le film tient quelques beaux instants de grâce ne serait-ce que dans sa fin, lumineuse, magnifique, mais aussi dans cette jolie séquence des confessions des anciens drogués face à leurs compagnons, donc quasi face caméra puisqu’elle nous installe parmi l’un d’eux. Un choix fort parmi d’autres, le film bien que très sobre en apparence, en regorge.