Sans que ce soit si préoccupant, cette cérémonie avait d’avance le goût d’un déroulement plus amusant/flippant que d’habitude. Il y avait cette annonce comme quoi elle serait dépourvue de présentateur. Il y avait cette polémique (caduque depuis que certains ont poussé la gueulante) de remettre des prix techniques pendant les pubs pour aller plus vite. Et bien entendu la possibilité de sacrer une plateforme de streaming. Disons que ça allait un peu plus loin qu’un simple, touchant, humain petit problème d’échange d’enveloppes – cf mon résumé 2017.
Plus terne que la cérémonie des César : celle des Oscar. Jolie prouesse. Certes l’absence de maître de cérémonie (Une première) n’a pas joué en sa faveur, mais c’est surtout dans sa « politesse » que cette 91e cérémonie s’est engluée, dans un ennui poli autant que dans son agréable célébration de la diversité. Une ode à la réconciliation que semble parfaitement représenter celui qui gagna la plus haute récompense, à savoir Green book, de Peter Farelly, coiffant les grands espoirs et les grandes peurs que suscitait une victoire de Roma, le film Netflix, mais aussi Bohemian Rhapsody et sa production chaotique ou le film de super-héros Black panther. Dans chacun de ces cas, la polémique aurait pu gonfler. Polémique qui échappe à Green book, film antiségrégationniste, film parfait (semble-t-il, car je ne l’ai pas encore vu) dans l’Amérique (anti) Trump.
Mieux qu’une victoire de Green book, l’académie aura fait gagner, ailleurs, ces trois autres films qui sur le papier se tiraient la bourre. Black panther s’offre trois statuettes, pour ses décors, sa musique et ses costumes. Bohemian Rhapsody en remporte quatre, assez curieusement je dois dire, puisque si celui pour Rami Malek me semble le seul valable quid des trois autres ? Le son, le mixage sonore à la rigueur, mais le montage, le MONTAGE, sérieusement ? J’en revenais déjà pas que le film soit nommé dans cette catégorie, alors qu’il la remporte, franchement. Franchement c’est du niveau d’un film de Jean-Marie Poiré le montage de Bohemian Rhapsody. Enfin c’est pas grave, fallait bien qu’on se marre un peu. Heureusement, Alfonso Cuaron a reçu quelques lauriers. Alors oui on récompense un film Netflix (Qui aura aussi glané l’Oscar du court-métrage, d’ailleurs) mais je suis tout de même ravi pour le cinéaste mexicain, qui remporte donc le meilleur film étranger, la meilleure réalisation et la meilleure photographie. Les plus belles récompenses pour un réalisateur, en somme.
Pour le reste, cérémonie incroyablement terne je le disais, en terme « d’animations des remettants ». A ce petit jeu l’académie aura bien fait de démarrer fort en lançant d’entrée Maya Rudolph, Tina Fey et Amy Poehler (Toutes les trois pour animer la prochaine cérémonie, qui est pour ? MOI) puis Melissa McCarthy et Brian Tyree Henry, car ensuite plus grand-chose de vraiment original ni drôle. Il faudra attendre une jolie interprétation de Shallow, par Lady Gaga et Bradley Cooper, filmée comme dans le film, des coulisses, de la scène, dans un très beau plan-séquence. Comme Convenu Shallow sera sacrée un peu plus tard meilleure chanson. Moins convenu le meilleur film d’animation qui échoit au dernier Spiderman, coiffant l’hégémonie Disney/Pixar qui squatte les victoires depuis bien longtemps – Et pourtant j’aurais adoré que ce soit pour Les indestructibles 2, enfin pour Brad Bird, surtout. Sympa aussi la récompense pour Spike Lee (meilleure adapatation) lui qui n’avait jamais eu les honneurs d’être oscarisé pour que ce soit si ce n’est « d’honneur » il y a quelques années.
Alors ok, ces derniers temps on a beaucoup craché sur Roma, moins sur le film que sur ce comment il a été distribué chez nous, puisqu’il nous imposait l’écran télé sans nous convier à ce pourquoi il est éminemment fait : La salle. Alors ça me fait chier que ça tombe sur Roma, et par extension sur Cuaron (Ceci dit, je lui en veux un peu, il l’a bien voulu) mais c’est évidemment la suite logique depuis le scandale de Cannes, le lion d’or, les BAFTA. Alors on échappe in-extremis à la récompense la plus convoitée (Et pourtant vu la concurrence je voyais pas trop comment ça pouvait lui échapper) mais symboliquement ce qui s’est passé dit beaucoup de choses. C’est gerbant. Et c’est à l’image de l’industrie en ce moment, puisque la Fox se fait présentement rachetée par Disney. Bientôt, on aura plus d’autre choix (dans un circuit de gros sous) que Disney ou Netflix, j’en ai bien peur, et le second est apparemment moins chiant que le premier puisqu’il laisse davantage de libertés aux auteurs. Et moi, concernant Roma, c’est pas de le voir couronné (ou non) d’Oscar qui me préoccupe, mais bien entendu le fait de ne pas avoir pu faire sa rencontre sur un grand écran.