Skyscraper – Rawson Marshall Thurber – 2018

08. Skyscraper - Rawson Marshall Thurber - 2018Piège de numérique.

     4.0   Bon, c’est nul. Mais il y a deux séquences à sauver, enfin pas forcément dans leur lourdingue exécution, mais dans l’idée et chaque fois un plan ou deux, à l’intérieur de ces mêmes séquences, qui te font fantasmer ce que le film aurait pu être. Il s’agit bien entendu de la scène de la grue (qui m’a donné quelques sensations de vertige, j’avoue) et de celle de la fin, dans la pièce aux trois cents miroirs. La première donne envie de revoir True lies, la seconde crie La dame de Shanghai. Le film cite beaucoup. Et c’est pareil d’un point de vue plus global : Skyscraper cherche clairement mais vainement à se mettre dans la roue de La tour infernale (Et si le feu se déclenchait au même étage, d’ailleurs, non ?)  et des Die Hard, de McTiernan. Ambition noble, hein, mais punaise faut assurer un minimum derrière, ce qui est loin d’être le cas de cet énième « blockbuster estival avec The Rock » qui enfile les poncifs (dialogues ineptes, scénario sans intérêt, découpage chaotique) comme des perles et fait le plein de fonds verts. Mais le pire là-dedans, c’est que les méchants n’ont aucune épaisseur. Ils sont nuls. Ils sont débiles – à l’exception « de la fille mutique et brutale » qui est une pâle copie de celle au couteau d’Une journée en enfer. Quant aux gentils, on te balance la famille entière, gamins compris, manque plus que le chien. Heureusement que Dwayne Johnson est amputé d’une jambe (depuis la scène d’intro traumatique) et se trimbale tout le film avec une prothèse, afin de pimenter un peu chaque rebondissement. Et heureusement qu’il y a Neve Campbell. On est toujours content de revoir Neve Campbell.

     Il y a autre chose de très gênant, très problématique, c’est que le film n’assume jamais ce qu’il pourrait être : Un divertissement estival, bourrin et drôle. Il faut toujours qu’il explique les tenants et aboutissants de son scénario, il faut qu’il fasse une mise en place interminable, il faut qu’il se gave de scènes parallèles pour ne pas nous perdre, soit avec l’autre partie des méchants, soit avec la police, soit avec le public devant les écrans, applaudissant les acrobaties de Dwayne Johnson. Et c’est pareil avec l’humour, il ne se donne jamais les moyens d’être drôle, de jouer sur des vannes, du burlesque, des idées : Il y a des tonnes de trucs drôles dans Die Hard et ça ne nuit pourtant jamais à l’action, au contraire. Là un moment donné, Dwayne Johnson s’apprête à démolir une porte avec une hache, mais il se rend compte qu’elle est ouverte et fait un petit geste de satisfaction de la tête. C’est pas fou mais c’est rigolo, ça. Et bien c’est tout ce qu’il y a de drôle dans le film, juste ça. On parle d’un film réalisé par Rawson Marshall Thurber, le réalisateur de Dodgeball ou We’re the Millers, quoi. Bizarre, non ? Comment rester sérieux quand un mec – Ok, c’est The Rock, mais bon – avec une fausse jambe court sur une grue et effectue un saut de quinze mètres pour entrer dans une tour en flammes ? Le film est vite fatiguant à ne pas se contenter de son gratte-ciel en feu, cherchant à tout prix à donner du sens. Si ça suffit pas, y a Hong-Kong à filmer ou bien donner de la consistance aux personnages secondaires : Ok ça parle pas mal chinois, c’est plutôt original, ça, mais la langue c’est bien, les personnages c’est mieux. Quant au feu, qui aurait mérité d’être un personnage à lui seul, bah c’est pas celui de Backdraft, quoi. C’est de la bouillie numérique, c’est insupportable.

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