Jeu de massacre au fisheye.
4.5 C’est mieux que The lobster, mais ce n’était pas difficile. La favorite séduit autant qu’il lasse, agace, épuise, mais c’est un fait, il séduit. Et étant donné qu’il est globalement très antipathique, son relatif sauvetage ne tient pas à grand-chose, en l’occurrence à ses actrices. On sent qu’elles prennent toutes trois un malin plaisir à cabotiner là-dedans, chacune dans leur registre, en s’adonnant à ce petit jeu de querelles et séductions, jalousies et complicité. Elles vont dans le sens du film, qui est méchant, jamais drôle, juste méchant. Doté de personnages – ces trois femmes, autant que ceux plus secondaires – vils et abscons, qu’on les voit s’affronter au tir aux pigeons ou qu’on les lynche nu en leur balançant des oranges. C’est un film qui donne même envie d’être méchant, qui donne envie de mettre des taquets à l’inconnu qui te sert de voisin de rangée, c’est dire sa force. Sans compter son délire esthétique autour du fisheye et de la caméra grand-angle pour bien appuyer la dimension écrasante. Ça n’ouvre sur aucune idée, ça appuie, c’est tout. C’est un film d’une lourdeur formelle terrible. A l’image aussi de ces titres de chapitres qui sont des répliques disséminées ci et là. Ça m’a rappelé Problemos. Mais c’est pas rigolo comme dans Problemos. C’est plus de l’ordre de « Cette boue empeste » que « Désolé, tu dors pas dans la yourte ce soir ». Et pourtant, il a un certain pouvoir, puisqu’il n’est pas si désagréable à regarder, il séduit, grâce notamment à ses séquences nocturnes dans le palais qui dénotent un peu du reste, des moments où l’on sent le grec pas loin de lâcher prise. Il y a le dernier plan aussi, je pense que si on aime le film, ce dernier plan doit être hyper fort. Et surtout comme je le disais grâce à ses actrices qui sont formidables et par quelques petites touches d’hypnose qu’il s’agisse de ses fresques immenses qui ornent chaque plan ou bien de cette musique, aux accents de Mica Levi dans Under the skin, qui par deux fois, deux apparitions faussement crescendo crée une attente parallèle, une angoisse très bizarre. Bref de l’anxiogène là où il ne peut y en avoir puisque on regarde tout ça de très, très loin – Même si c’est nettement plus « rassembleur » qu’un The lobster, par exemple, rien d’étonnant à l’avoir vu concourir pour les Oscar.