Archives pour avril 2019



L’Empire de Médor – Luc Moullet – 1986

23. L'Empire de Médor - Luc Moullet - 1986Le randonneur se rebelle.

     7.0   C’est en tournant dans Cabots, une farce sur un réalisateur obligé de tuer un chien pour les besoins d’un tournage, qui récolta attaques en tout genre, que Moullet comprit qu’il existait une religion du chien et qu’il n’était pas de bon aloi de tourner cet empire en dérision. Il va donc contourner la censure et faire ce documentaire, très drôle, très corrosif, sur une société à son paroxysme de l’absurde, dans lequel il filme les toilettages, les produits de beauté, les concours, un cimetière canin (Unique cimetière de Paris où il faut payer pour entrer, n’hésite-t-il pas à dire) mais aussi les caninettes en action, car dit-il un moment donné – où l’on sent que son filtre est un peu tombé : Paris est devenu la capitale de la merde. On voit donc des chiens en train de chier en toute impunité. Puis Moullet demande à une enfant : « Pourquoi appelle-t-on un chien, un chien ? » Parce que ça chie partout, répond t-elle. Alors quand Moullet se défroque et choisit son arbre, il est agressé par une avalanche de sifflets de police. Et le film varie ainsi entre le ton neutre qu’impose le genre du documentaire sur les bêtes, et un second degré réjouissant, qui finira même par filmer un défilé de motocrottes accompagné par l’élan épiques des premières secondes de La chevauchée des Valkyries, de Wagner. Auparavant, on apprend que les dépenses de produits pour chiens en France dépassent le PIB du Sénégal, qu’on peut insérer une page toutou dans un journal qui fera cinq lignes sur les morts de Soweto. Plus qu’un film pour ceux qui n’aiment pas les chiens, L’empire de Médor est un film contre ceux qui préfèrent les chiens aux humains. Moullet ne manque pas de rappeler dans la présentation du film (hors film, donc) qu’en tant que randonneur chevronné, le vrai danger ce ne sont pas les chutes ni les animaux sauvages, mais les chiens non tenus en laisse.

Un steak trop cuit – Luc Moullet – 1960

22. Un steak trop cuit - Luc Moullet - 1960Qui aime bien châtie bien.

   6.0   Il s’agit du premier film réalisé par Luc Moullet. Vingt minutes qui se déroulent entre salle à manger et cuisine, dans un petit appartement, le sien, dans lequel il filme son petit frère, qui plus tard lui fera la musique d’Une aventure de Billy le kid, et qui jouera dans Les carabiniers, de Godard. Il filme aussi déjà Françoise Vatel (qu’on retrouvera plus tard dans Brigitte et Brigitte, entre autre) autour d’un déjeuner à se chamailler et bien entendu autour d’un steak trop cuit. Moullet raconte que ce film est né grâce au papier (à l’époque il écrivait dans Les Cahiers) sur A bout de souffle, qui poussa Godard à demander à De Beauregard, son producteur, de produire son premier film. On peut aussi penser qu’il répond à Charlotte et son steak, de Rohmer. Le minimalisme du décor, mais aussi des mouvements de caméra et l’aspect bricolé renforcé par une post synchro très approximative, sont compensés par la truculence des dialogues et cet impertinence si propre à son auteur, qui s’amuse ici à apparaitre en voisin grimé en Godard, mais aussi à faire déchirer quelques pages des Cahiers du cinéma, mais aussi à insérer quelques sous titres pour traduire l’argot du frère. Le garçon est rustre, certes, mais quand il va chercher des saucisses chez sa voisine, c’est un nounours. La fille est amoureuse et pense à son rencard du soir, espérant laisser la corvée de vaisselle à son frère pour ne pas le manquer. Et les dernières minutes son très douces, Moullet filme la complicité frère et sœur, avec en point d’orgue ce baiser sur le bout du nez contre une corvée. C’est assez chouette. On retiendra une jolie réplique : Au « T’as de beaux yeux » de son frère, Françoise répond : « Jojo, aujourd’hui une fille qui n’a pas un beau regard est une fille perdue ! » Pas impossible que De Beauregard ait accepté de produire Un steak trop cuit sur ce jeu de mots.

La douleur – Emmanuel Finkiel – 2018

30. La douleur - Emmanuel Finkiel - 2018L’attente des femmes.

   7.5   Au départ, on pense comme d’habitude à cette impossibilité de mettre en images un texte de Marguerite Duras. On réalise pourtant vite que Emmanuel Finkiel s’en tire pas trop mal dans son style, nettement mieux que Rithy Pann quand il s’attaque au Barrage contre le pacifique, par exemple. Il capte quelque chose dans la non linéarité digressive, la plongée dans le souvenir, quelque chose qu’on voit peu au cinéma, quelque chose qui tient probablement beaucoup à Duras mais qu’il parvient à brillamment incarner à l’écran. On se dit qu’il reste un problème, à savoir les acteurs, enfin le fait qu’il y ait des acteurs, une Mélanie Thierry, Un Benoit Magimel : Quand Lazslo Nemes réalise Le fils de Saul, il choisit des inconnus et ça fonctionne. Duras en images ça devrait être comme chez Bresson, habité par des modèles. En revanche, une fois qu’on a fait ce deuil-là, accepté que Duras est inadaptable, réalisé que les acteurs sont hallucinants, absolument tous, le film est passionnant, toujours à la bonne distance, peu parasité par les ornements, c’est un film qui tient sa ligne de conduite, ne l’enfreint jamais. Homogénéité totale, dans ses plans, sa reconstitution, l’utilisation impeccable de la voix off. Si un jour je m’y replonge, je suis certain que je ne verrai plus ses menus défauts qui sont probablement moins de réels défauts qu’ils ne font partie intégrante de mes préjugés. J’avais tellement peur de ce truc. Adapter Duras, quoi. Et en fait j’ai pris une claque. Réalisation hallucinante, que des bons choix, beaucoup de longue focale pour masquer le manque de budget, et tellement bien utilisée comme j’avais rarement vu une longue focale si bien utilisée. Mélanie Thierry incandescente à tel point que c’en est flippant. Elle est Duras. Enfin voilà j’ai envie de le revoir tellement ça m’a semblé absolument parfait à tout point de vue.

Love, Death + Robots – Saison 1 – Netflix – 2019

05. Love, Death + Robots - Saison 1 - Netflix - 2019D’inégaux précipités animés.

   5.0   Une création Tim Miller / David Fincher exploitée sur dix-huit épisodes minuscules (Entre six et dix-sept minutes) et indépendants, puisqu’ils n’ont strictement aucun rapport entre eux, sinon qu’ils sont tous articulés autour d’une technique d’animation propre. L’ensemble est forcément inégal, l’arc narratif souvent dévoré par l’ambition technique, un peu comme dans la dernière saison de l’autre série anthologique Black Mirror, mais le tout est suffisamment accrocheur pour qu’on l’engloutisse très rapidement. Malgré tout il faut s’armer de patience pour retrouver un chapitre digne de Sonnie’s edge, celui qui ouvre le show, véritable déflagration visuelle, monstre d’intensité érotique, de brutalité sèche, aux rebondissements magnifiques. Le tout baigné dans une mixture Créature du lac noir / Ready player one du plus bel effet. J’ai adoré. Il faut attendre The dump ou Handing help pour être un peu titillé dans son confort et/ou retrouver un niveau excellent. La plupart du temps ça reste aussi beau que vide et vain ou bien ça mérite plus long, le temps d’apprivoiser l’univers dépeint.

Les uns et les autres – Claude Lelouch – 1981

17. Les uns et les autres - Claude Lelouch - 1981Beaux les rots, de Lelouch.

   3.0   Un Lelouch très apprécié de manière générale, Les uns et les autres. Mais ça m’est passé complètement au-dessus. J’imagine que c’est le lot des films de Lelouch, c’est souvent quitte ou double. Ici il se prend à la fois pour Kubrick, Visconti et Cimino. Tranquilou bilou.

     Si son cinéma ne manque pas d’élans ni d’une certaine force visuelle, l’aspect fresque est neurasthénique au possible. Il est donc bien délicat de se souvenir d’un personnage, un seul, dans ce tohu-bohu, véritable bouillie d’images superposées sans aucun liant. Les uns et les autres mise aussi beaucoup sur Michel Legrand. Jusqu’à la nausée. Bref c’est à la fois impressionnant et catastrophique, ample et ridicule, fascinant et chiant. En fait ça représente assez bien ce que je m’étais imaginé du cinéma de Lelouch avant de voir un film de Lelouch. Alors c’est pas Chacun sa vie, puisque la dimension romanesque, aussi ratée soit-elle, en impose, mais on n’est pas si loin, finalement.

      Pourtant il y a ce final, vers lequel tout le film tend, où la dimension chorale est à son paroxysme puisqu’on y retrouve tous les personnages, tous ces acteurs lors d’un concert sur le Trocadero, dans une chorégraphie somptueuse, dansée par Jorge Donn, sur le Boléro de Ravel que Lelouch semble capter dans la continuité en faisant virevolter sa caméra partout. C’est un moment magnifique, ma récompense pour ce gouffre d’ennui qui le précède. Il faut voir le film pour cette fin. Ainsi que pour une scène vers le mi-temps, dans laquelle Jacques Villeret explose complètement face à Francis Huster. Oui, explose. Villeret, oui. C’est peu, mais c’est déjà ça.

      L’essai est donc à saluer pour sa tentative de démesure, mais ça reste un truc imbuvable. J’ai dormi deux fois devant, je l’ai donc lancé trois fois. C’est un chouette film pour une bonne sieste. J’ai oublié de préciser le plus important : ça dure plus de trois heures, cette plaisanterie.

Marie Stuart, reine d’Ecosse (Mary Queen of Scots) – Josie Rourke – 2019

14. Marie Stuart, reine d'Ecosse - Mary Queen of Scots - Josie Rourke - 2019Damned of thrones.

   5.0   Avec La favorite c’est donc l’autre film de ce début d’année sur la cour des Stuart. Quand Lanthimos visait (assez mal) la dimension Kubrickienne, Josie Rourke, dont c’est le premier film, semble plutôt s’inspirer de Game of thrones, d’autant qu’Ecosse et XVIe siècle ça convoque déjà GoT, dans le côté médiéval et le nom de dynastie qui évoque évidemment les Stark. Malheureusement ça n’en a pas les épaules, ça manque d’étoffe et de personnages, ça manque d’une vraie ambiance et certains partis pris de mise en scène sont très lourds, à l’image de la rencontre des deux reines entre les linges. Il y a un côté Eyries meet Winterfell, mais sans gigantesque viaduc et trou de la mort, ni donjons et bois sacré. Bref, c’est un peu chiant. Ce sont évidemment des intrigues de cour, de chair et de trahison, on y assassine intensément au couteau ou froidement à la hache, mais ce n’est jamais retors, sulfureux, surprenant. C’est très pédagogique. Mais ça se regarde d’assez loin, sans déplaisir d’autant qu’il y a la belle Saoirse Ronan en Mary Stuart, et une fois n’est pas coutume, la très moche Margot Robbie en Queen Elizabeth tellement grimée en clown de Ça que j’ai chaque fois l’impression qu’elle va me demander si je veux un ballon.

La favorite (The favourite) – Yórgos Lánthimos – 2019

12. La favorite - The favourite - Yórgos Lánthimos - 2019Jeu de massacre au fisheye.

   4.5   C’est mieux que The lobster, mais ce n’était pas difficile. La favorite séduit autant qu’il lasse, agace, épuise, mais c’est un fait, il séduit. Et étant donné qu’il est globalement très antipathique, son relatif sauvetage ne tient pas à grand-chose, en l’occurrence à ses actrices. On sent qu’elles prennent toutes trois un malin plaisir à cabotiner là-dedans, chacune dans leur registre, en s’adonnant à ce petit jeu de querelles et séductions, jalousies et complicité. Elles vont dans le sens du film, qui est méchant, jamais drôle, juste méchant. Doté de personnages – ces trois femmes, autant que ceux plus secondaires – vils et abscons, qu’on les voit s’affronter au tir aux pigeons ou qu’on les lynche nu en leur balançant des oranges. C’est un film qui donne même envie d’être méchant, qui donne envie de mettre des taquets à l’inconnu qui te sert de voisin de rangée, c’est dire sa force. Sans compter son délire esthétique autour du fisheye et de la caméra grand-angle pour bien appuyer la dimension écrasante. Ça n’ouvre sur aucune idée, ça appuie, c’est tout. C’est un film d’une lourdeur formelle terrible. A l’image aussi de ces titres de chapitres qui sont des répliques disséminées ci et là. Ça m’a rappelé Problemos. Mais c’est pas rigolo comme dans Problemos. C’est plus de l’ordre de « Cette boue empeste » que « Désolé, tu dors pas dans la yourte ce soir ». Et pourtant, il a un certain pouvoir, puisqu’il n’est pas si désagréable à regarder, il séduit, grâce notamment à ses séquences nocturnes dans le palais qui dénotent un peu du reste, des moments où l’on sent le grec pas loin de lâcher prise. Il y a le dernier plan aussi, je pense que si on aime le film, ce dernier plan doit être hyper fort. Et surtout comme je le disais grâce à ses actrices qui sont formidables et par quelques petites touches d’hypnose qu’il s’agisse de ses fresques immenses qui ornent chaque plan ou bien de cette musique, aux accents de Mica Levi dans Under the skin, qui par deux fois, deux apparitions faussement crescendo crée une attente parallèle, une angoisse très bizarre. Bref de l’anxiogène là où il ne peut y en avoir puisque on regarde tout ça de très, très loin – Même si c’est nettement plus « rassembleur » qu’un The lobster, par exemple, rien d’étonnant à l’avoir vu concourir pour les Oscar.

Paris est à nous – Elisabeth Vogler – 2019

13. Paris est à nous - Elisabeth Vogler - 2019Et tout s’effondre.

   3.0   Paris est à nous ambitionne de filmer la rencontre et le déchirement d’un couple au sein d’un Paris réfugié dans les manifestations, la peur et la sécurité policière, bref un Paris sur lequel planent les évènements de ces trois dernières années, d’autant que c’est exactement son temps de tournage, trois ans d’images collectées ci et là. Mais c’est un ramassis de plans serrés qui tournent autour de ses personnages, le tout accompagné par instants d’une voix off poétique, dans une succession de décors changeants – On hésite d’ailleurs pas dans l’utilisation du jump cut, c’est usant – au moyen de plans impossibles, retournés, sur des arbres, des lumières, des silhouettes, des plans toujours en mouvement pour que ça fasse à la fois très intime et panthéiste, à la manière de To the wonder ou Knight of cups, de Terrence Malick. Pas le meilleur Malick, en somme. D’autant qu’on est dix étages en-dessous. Surtout, le film est tourné en trois ans et ça se voit : Le montage est catastrophique, c’est à peine regardable. Si j’étais de mauvaise foi, j’irais même jusqu’à dire que son financement participatif bien qu’il soit inédit dans la production hexagonal, se ressent. C’est une fausse bonne idée. Un éléphant qui accouche d’une souris. Un film qui promet sans cesse d’être une montagne mais qui ne décollera pas du niveau de la mer. Cependant, quand il filme la foule parisienne, il se passe quelque chose, de l’ordre d’une vibration du réel qui s’invite dans la fiction, de la pulsation mélancolique dans l’ennui abyssal. Mais on comprend vite que ce n’est que pose, grandiloquence et boursouflure. Ça voudrait être un héritier à la fois de Carax et Noé, singer Malick, insérer du Lynch et être le film qui prend le pouls du présent. Mais c’est très raté.

Docteur Strange (Doctor Strange) – Scott Derrickson – 2016

04. Docteur Strange - Doctor Strange - Scott Derrickson - 2016Pas si strange.

   3.5   Où je me rends compte à quel point je suis de plus en plus las de ces trucs. Je m’y ennuie au bout de cinq minutes. Et pourtant, au rayon Marvelleries, Docteur Strange a tout, sur le papier, pour entrer dans le (médiocre) haut du panier, le problème c’est qu’à l’image, dans l’exécution donc, c’est une fois de plus consternant de banalité, avec ses petites blagues bien placées, son casting exubérant mais sans relief, son déroulement sur expliqué afin de ne pas perdre l’ado plus lent que les autres, les jolies grimaces de Cumberbatch post Sherlock, le gimmick de la cape, personnage à part entière. Visuellement c’est pas mal, ceci dit, il y a une identité qu’on ne retrouve pas dans les autres Marvel qui se ressemblent quasi tous, graphiquement. Même si tout le côté distorsion spatiale avec le méchant fasse office d’Inception du pauvre et souvent mal à la tête. Le film n’est pourtant pas enseveli sous des montagnes d’explosions / destructions, comme on en a l’habitude avec le MCU, c’est plutôt agréable. Mais bon, au bout d’un (court) moment, fallait que je fasse autre chose en même temps. La « magie » ne prend jamais de mon côté, c’est probablement que ce n’est pas suffisamment différent du reste de l’univers Marvel, j’imagine.

King Kong – Peter Jackson – 2005

10. King Kong - Peter Jackson - 2005Grandeur et décadence.

   6.0   Un peu comme ce fut le cas d’Avatar – pour rester dans ce registre de super production – quelques années plus tard, King Kong est un film que j’ai adoré au cinéma, au moment de sa sortie – Je me souviens encore d’une salle comble dans laquelle notre léger retard nous avaient obligé à nous retrancher au tout premier rang : Trois heures aussi ébouriffantes qu’épuisantes – mais dont je n’ai jamais senti l’envie de m’y replonger. Ce qui n’est pas super bon signe. Pourtant, j’y repensais pas mal ces derniers temps.

     Si le film est toujours aussi réjouissant dans sa volonté de faire renaître l’original, de jouer sur l’idée du cinéma (le voyage d’une équipe de cinéma) dans le cinéma, sa démesure permanente, c’est justement là-dessus qu’il (s’)épuise. Trop de chantilly sur le gâteau. Et la chantilly ça s’affaisse. Parfois le film est donc impressionnant (les T.rex, Kong et Naomi Watts dans une crevasse, suspendus à des lianes) et parfois il est très gênant (un troupeau de brachiosaures et un effondrement de falaises franchement gênant) et souvent il en met une, deux, trois couche(s) de trop à l’image de l’interminable séquence finale.

     Prochaine étape : Revoir l’opus de 1976. Réalisé par John Guillermin. J’en étais fan, quand j’étais gosse. Je me souviens de ce dernier plan terrible où l’on entendait le cœur du gorille s’arrêter. Hormis ceci et la présence de Jessica Lange, le reste est on ne peut plus flou.

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silencio


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