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Archives pour 9 mai, 2019

Avengers, Endgame – Joe & Anthony Russo – 2019

avengers-4-endgameSnap to the past.

   8.0   Je poursuis mon voyage à travers le cinéma des Studios Marvel, je fais des ponts, découvre de beaux échos, butte sur un détail avant d’en apprécier pleinement un autre. La vue d’ensemble est de plus en plus nette, les pièces du puzzle s’imbriquent et la grosse machinerie apparemment sans âme, parfois grossière, révèle ici un troublant vertige. En allant voir Endgame, je savais qu’il me manquerait encore quelques pièces, tant pis, c’est le jeu, apprécier l’univers de façon non linéaire est un fonctionnement comme un autre.

     A l’heure où j’écris, le film vient de passer devant Titanic dans l’histoire du box-office mondial. En gros il a franchi la barre des 2 milliards de recettes. En seulement douze jours d’exploitation. Record absolu, évidemment. Si je serais toujours plus admiratif de la double anomalie réalisée par James Cameron puisqu’il n’a pas eu besoin de 21 films pour tout péter avec le 22e, je dois avouer que ce colossal succès m’impressionne beaucoup et curieusement me réjouit bien plus qu’il ne me terrifie : Au moins, les gens continue d’aller au cinéma. A l’heure où tu me lis il a probablement battu Avatar. Qu’importe ce qu’on pense du film, de cette saga et du box-office en général, le raz-de-marée que le film provoque est inédit, fascinant, flippant. Mais que reste-t-il du film lui-même après la démesure de son plan marketing ? Attention, spoilers en veux-tu en voilà.

     Le film se découpe clairement en trois parties. Il sera d’abord question de deuil puis il faudra élaborer la solution avant de filer vers le grand affrontement. La partie centrale est un pur délice. On traverse le temps et on retourne dans les films précédents afin d’aller chercher les pierres et faire en sorte que Thanos ne les récupère pas. Et c’est assez jubilatoire. On retourne dans la temporalité du premier Avengers mais aussi dans celle de Captain America 2 et le film a l’audace de rejouer une scène de Thor 2, le plus mauvais épisode de la série et d’en faire une scène très belle, entre Thor et sa mère. Sur Morag, il faut devancer Quill, toujours en train d’écouter Come and get your love. Steve Rogers se bat contre son lui-même de 2012 et Tony Stark retourne chercher le Tesseract en 1970 et y fait la rencontre de son propre père. Mais avant cela, le film tente déjà beaucoup, autrement.

     L’ouverture d’Endgame prolonge la cruauté sur laquelle se fermait brutalement Infinity war et demande à partager les derniers instants de bonheur familial de Clint Barton – qui était oublié, absent de ce final tétanisant – avant que sa femme et ses trois enfants ne s’évaporent en poussière. La séquence n’est pas très longue pour un « film normal » mais pour un blockbuster, c’est tout de même un étirement surprenant – que le film se permet, comme toute sa première heure de deuil, parce qu’il dure trois heures. C’est une grâce bucolique quotidienne qui soudain vire à la quadruple disparition, qui n’est pas sans rappeler la séquence introductive de The leftovers, voire celle, moins anonyme, qui touche le personnage incarné par Carrie Coon dans la série de Damon Lindelof. Comme elle, Barton perd tout. En un claquement de doigts, c’est le cas de le dire. Pas autour d’une table de cuisine mais en plein pique-nique dominical. Dans la séquence suivante, le récit fait un bond de cinq ans. La table rase n’est donc pas encore au programme.

     En parcourant les papiers qui fleurissent autour du film, je remarque en priorité un nombre conséquent de déception vis-à-vis de l’abandon du radicalisme qui parcourait le final du film précédent. Curieux reproche tant je ne vois pas ce qu’il y a de si inattendu dans ce déroulement ? Je veux dire, on savait bien que « ceux qui restent » trouveraient un moyen de faire revenir « ceux qui sont partis », évaporés parmi la moitié des êtres humains évaporés de la planète. On savait bien que le génocide serait effacé. Que Thanos finirait par perdre. Restait plus qu’à savoir comment ? Le « comment » peut être déceptif, oui. Mais il ne tombe pas comme un cheveu sur la soupe non plus, nous étions un peu prévenu. Avant de laisser la dernière pierre à Thanos, Dr Strange avait clairement annoncé à Tony Stark que son rôle serait prépondérant. Ant-man nous avait familiarisé avec la physique quantique – Et Ragnarok et son bifrost avait un peu joué là-dessus aussi. La scène post-générique d’Infinity war montrait que Nick Fury avait envoyé un SOS à Captain Marvel juste avant de se volatiliser. Et si je ne l’ai pas vu, comme par hasard quel film sort avant Endgame ? Captain Marvel, évidemment. Si l’on a appris un truc avec le MCU et sa façon d’écrire une saga de cinéma, c’est que tout s’imbrique, tout est toujours utile, il n’y a que des pistes, jamais de fausses pistes. Et tout cela, en effet, nous le verrons dans Endgame. Ça peut être déceptif mais c’est aussi un vrai tour de force, ainsi qu’un plaisir de fan service, cet opus agira en opposition au précédent : Retrouver l’humour de nos héros et retrouver nos héros. Alors si en plus tout ça s’opère en faisant du pied à Retour vers le futur, hein, allons-y gaiement. C’est un film qui semble sans cesse récompenser ses fans, leur offre pile (ou presque) ce qu’ils souhaitent. Un film qui se fait ses propres clins d’œil et revisite sa propre légende. Au moins autant que lorsque Spielberg revisite dans Ready player one, ce qu’il a en grande partie engendré. Quant aux reproches focalisés sur l’impossibilité au film de montrer le chaos que ce claquement de doigts a généré, oui, en effet, c’est pas The Leftovers. Mais bon, cette saga n’a jamais eu cette prétention, elle n’a jamais filmé le Monde. La population a toujours été réduite à de la simple figuration abstraite. Donc ce chaos ne s’incarne pas dans une dimension globale et mondiale mais uniquement via ses personnages, fortement touchés (Barton) ou non (Stark).

     Cinématographiquement, le film ne tente aucun vrai pas de côté, mais ce n’est pas nouveau, c’est comme ça depuis le premier Iron man, tous les films se ressemblent plus ou moins dans cette écurie, il ne faut surtout pas prendre le risque de briser la fidélité de la clientèle. Avec un tel marché financier et de tels chiffres, on les comprend. Il y aura parfois eu de ridicules déraillements – Thor 2, évidemment – mais aussi d’agréables interférences – l’ovni Ragnarok – mais rien qui n’entache l’univers produit par Disney. C’est donc majoritairement du fond vert dans chaque séquence d’action. Et majoritairement du plan télévisuel durant les dialogues, dont on désamorce systématiquement le sérieux, l’aigreur et/ou la lourdeur par une petite vanne, efficace, bien placée comme un produit. Thor est encore un peu dans Ragnarok, apparemment, puisque c’est lui, panse pendante et joues boursouflées, grimé en The Dude (The Big Lebowski cité ouvertement, trop, puisqu’on le voit et que les personnages le disent, deux fois ! On préfèrera, plus loin, la subtilité de son clin d’œil à l’ouverture des Aventuriers de l’arche perdue) sur qui reposera l’essentiel du potentiel comique d’Endgame. La fourmi aura aussi son rôle à jouer là-dedans. Ainsi que Le cul de l’Amérique.

     C’est curieux car l’univers de la pop culture est un peu chamboulé ces temps-ci, puisque le calendrier superpose la sortie du dernier volet d’Avengers avec la diffusion de l’ultime saison de Game of thrones. D’autant que c’était le 8.03 de GoT cette semaine-là. Loin de moi l’idée de les comparer, mais vivre cet épisode dingue et Endgame à quelques heures d’intervalle c’est l’assurance d’avoir vécu un truc à part, dans « l’histoire de la pop culture » si j’ose dire, d’être dans le vent, quoi, c’est très bizarre. Si j’ai suivi la série de Weiss & Benioff depuis ses quasi faits d’arme – J’avais rattrapé les wagons au moment de la diffusion de la quatrième saison, il y a cinq ans donc, je m’en souviens bien puisque le season finale tombait pile avec le début de la coupe du monde au Brésil – je recolle les morceaux avec la saga produite par Kevin Feige seulement depuis le mois dernier. Pourtant, je ressens des frissons similaires, quand je vois une discussion au coin du feu d’un côté, dans un bureau de l’autre, une bataille face aux marcheurs blancs ici, face à Thanos là : L’ambition n’est pas la même, la qualité d’écriture et de réalisation non plus, mais il y a le parfum de la mélancolie qui s’en dégage, une volonté de dire adieu aux personnages, qu’ils survivent ou bien qu’ils meurent. Cette même sensation de frissons s’exprime aussi via l’utilisation musicale : Dans l’un c’est au retentissement de son générique d’intro, dans l’autre c’est au moment d’une réunion dans la bataille. Deux thèmes bien bourrins comme il faut, mais qui te collent à ton siège.

     Il y a l’idée du « endgame » puisque le titre le revendique. C’est la fin d’un jeu. Evidemment le jeu s’est un peu durci, s’est un peu fait avaler par la mort à l’image du vaisseau de Thanos débarquant à la toute fin de Ragnarok et bien entendu à l’image de cet impressionnant goût de cendres que l’on respire depuis Infinity war, mais malgré tout il y a toujours l’idée du jeu et il reprend le dessus ici, très clairement, d’une part dans ses velléités comiques – la saga n’avait jamais été aussi drôle – et d’autre part dans sa volonté de tout faire péter dans un gigantesque feu d’artifice et l’idée du voyage temporel est une partie de ce feu d’artifice. Alors oui il y a une mélancolie quasi permanente parce qu’on prend le « risque » de perdre un présent parfois convenable (Les moments de complicité entre Stark et sa fille sont par ailleurs très beaux) pour revoir ceux qui se sont évaporés. Mais il y a le jeu. Et le film ira ouvertement là-dedans en citant d’abord Fortnite puis Retour vers le futur. Ce n’est pas faire offense au film de Zemeckis je crois, même si Endgame va gentiment s’en moquer, puisqu’il s’amusait déjà de ces ascenseurs émotionnels.

     Je pense, malgré tout un tas de défauts évidents – Punaise, le vrai héros du film c’est un RAT, quoi. C’est Rémy qui fait revenir Scott Lang, on croit rêver – qu’il est le plus stimulant, avec Infinity war, des films du MCU. Mais contrairement aux opus de Captain America, je ne crois pas que ces deux films s’apprécient indépendamment du reste, tant ils fonctionnent dans un ensemble, ils fonctionnent parce qu’ils sont la convergence de cet ensemble et sont donc touchants – vraiment, moi ça m’a collé un tas de frissons à plusieurs reprises voire quelques larmichettes, mais chut – si l’on a quelque atome crochu avec cet ensemble, cet univers, cette galerie de personnages.

     Il est possible que mon enthousiasme soit provoqué par le fait que je sois plongé à fond dans l’univers depuis peu – et qu’il retombe vite comme un soufflé mais qu’importe – ou bien c’est simplement le fait d’y être allé en Day2, de le voir en Imax 3D dans une salle blindée, aux côtés de ma femme et mon fils, tous deux aussi enthousiastes que moi, mais en l’état, j’ai pris un pied monstrueux. Un plaisir de divertissement idéal doublé d’une vraie mélancolie. Si on m’avait dit, il y a encore un mois, que je pourrais être ému par un film de super-héros, punaise. J’ai presque envie d’y retourner, tant ça m’a semblé aussi jubilatoire qu’astucieux. Le film réussissant aussi l’exploit d’être une belle conclusion pour les fans mais aussi de ne pas être réfractaire quant à l’idée de séduire les néophytes – Et j’en suis donc la preuve.

The hole – Joe Dante – 2012

03. The hole - Joe Dante - 2012The fears under the stairs.

   6.0   Dante c’est un peu comme Carpenter, il y a peu d’espoir de les retrouver aujourd’hui au dixième de leur meilleur niveau. Si je les compare c’est bien entendu par ce qu’ils sont de la même génération, que j’ai grandi avec leurs films, qu’ils ont offert leurs meilleurs au même moment (Entre 1978 et 1987, en gros) avec de beaux sursauts dans la décennie suivante avant d’entrer dans un triste désert artistique.

     Au moment où l’un pondait le très dispensable The ward, l’autre faisait The hole, ce petit film d’abord à mi-chemin entre l’épouvante, le récit d’aventure de petits banlieusards et le teen-movie – Il les rate un peu tous les trois, je crois – avant de basculer dans quelque chose à la fois de plus direct (Une trappe qui renferme un monstre qui s’incarne différemment suivant les peurs de chacun) et de plus abstrait, tant le film vire au cauchemar polymorphe et labyrinthique.

     Si Dante ne parvient guère à nous attacher à ce trio de personnages – Aussi parce que soyons honnêtes, leurs interprètes ne sont pas très bons – il canalise notre fascination sur leurs peurs : Une fillette, un père, un clown. Pas d’élément traumatique concernant le clown, puisque le jeune Lucas en est seulement terrifié, basiquement, comme on pourrait l’être par les araignées ou les fantômes, en revanche Dante s’amuse autant avec cette apparition qu’il le faisait par le passé avec ses Gremlins. La dimension cartoonesque effleure ci et là. Bref, on le retrouve un peu.

     Chez les deux autres, c’est une peur bien plus enfouie, bien plus écrite. La fillette (et ses déambulations syncopées) n’est autre que le fantôme de la meilleure amie de Julie, disparue dans des circonstances opaques (suicide ?) : La séquence miroir sur les montagnes russes est la première belle idée visuelle du film : Dante capte une ambiance à la fois de fête foraine nocturne mais aussi de climat post-apocalyptique, avec ici les vestiges d’une grande roue et là les planches en bois du grand huit qui semblent s’effriter sous les pieds.

     Quant à Dane, le plus âgé, il est hanté par les violences de son père. Tous trois affronteront leurs monstres, mais lui, sa plongée cauchemardesque se déroule dans une réplique de sa maison d’enfance. C’est la deuxième grande idée visuelle, aux relents expressionnistes du Lang du Secret derrière la porte dans des brumes quasi surréalistes : Sol, plafond, cloisons sont déformés et les meubles sont gigantesques, comme si Dane retrouvait son plus jeune âge, courrait se cacher sous la table de salon, derrière le canapé puis dans le dressing.

     Le film prend beaucoup trop de temps pour atteindre cela – L’image est beaucoup trop lisse avant le basculement volontiers fantastique – mais au moins il l’atteint. Ajoutez à cela des éclats référentiels qui rappelle qu’on est bien chez Dante, de façon plutôt rigolote quand un personnage lit La Divine comédie, merveilleuse quand le sifflement d’un père convoque La nuit du chasseur ou Le labyrinthe de Pan, voire de façon fourre-tout puisqu’on pense tour à tour à The ring, aux livres Chair de poule voire à Poltergeist. Et comme c’est une habitude, on a droit à un cameo de Dick Miller, ici en livreur de pizza. Ça reste tout à fait mineur dans la filmographie de Joe Dante mais carrément charmant.


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