La vie d’Amel.
3.0 Le film se déroule à Tunis, on y suit Amel, jeune photographe libre, amoureuse, indépendante. Quand son petit ami meurt dans un accident, Amel est prise en charge de façon aussi bienveillante qu’insistante par sa belle-famille, surtout son beau-père avec qui elle partage le goût pour l’art, qui veut lui préserver ses libertés ainsi que son espace créatif en l’aidant financièrement aussi bien pour son matériel photographique que ses expositions, et bientôt en lui offrant un nouveau studio. Cette extrême bonté révèle rapidement une ambiguïté très troublante, dans la mesure où Taïeb est comme cette montagne d’hommes qui gravite autour d’Amel – qui plus est lorsqu’elle se met en tête de transformer ses photos de lieux en photos d’hommes, dans un style de plus en plus érotique – fasciné par (la liberté de) cette fille qui de plus semble désirer tous les hommes qu’elle embrasse de son objectif. L’amour des hommes est clairement un film sur la femme artiste tunisienne d’aujourd’hui, un film féministe qui ira jusqu’au bout de son dispositif, Amel finissant par se refuser à celui qu’elle semblait aimer, lui préférant sa pleine solitude. Heureusement qu’il y a la toujours radieuse et magnétique Hafsia Herzi et dans chaque plan ou presque, afin de cristalliser notre regard sur elle et non sur la mise en scène insipide, inexistante. C’est simple, on dirait un mauvais téléfilm, de ceux accompagnés en permanence d’une petite musique passe-partout, de ceux caressés par une lumière sur une seule note, un rythme sur un seul ton, de ceux habités par ce jeu théâtral, ces séquences pas trop longues pour que ça ne dérange personne. C’est sans intérêt alors on s’en remet à des bribes – une séance photo homo-érotique, un affrontement du regard entre une artiste et son modèle – ou bien à des anecdotes. En l’occurrence j’ai été perturbé par une apparition au début, celle de Férid Boughedir. Je ne connaissais pas cet homme, enfin cet auteur jusqu’à maintenant, pas même de nom, puis j’ai découvert il y a quelques jours deux de ses films, Halfaouine et Un été à la Goulette, tous deux très beaux, je reviens dessus prochainement. Le voir ici furtivement dans un rôle anecdotique de coiffeur discutant avec Hafsia Herzi offre une coïncidence étrange. En effet j’aurais découvert le cinéma de Boughedir après avoir vu L’amour des hommes, je n’y aurais vu que du feu. Là ça m’a fait un truc, ce genre de truc, de relais, de passerelle, d’accointance, directe ou oblique, logique ou improbable que seul le cinéma permet, parfois.
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