Us – Jordan Peele – 2019

us-156128Peele à l’heure.

   7.0   (Nouvelle parenthèse dans mon voyage/festival de Mouk – J’en profite pour avouer que je commence à trouver le jeu long : Je ne suis décidemment pas fait pour m’imposer ce type de défi : être obligé à voir des films bien précis et parler de chacun de ces films, surtout lorsqu’il y autant de déchet dans une sélection. Là j’ai plutôt envie d’écrire sur les derniers films vus au cinéma (Bonello & Dardenne, j’y viendrai, évidemment) voire m’étaler sur deux de mes films préférés revus il y a peu (Profession reporter, Terminator 2) voilà pourquoi je me permets ce nouveau petit écart, afin d’évoquer deux (très) beaux films sortis récemment, deux films très justement encensés. Deux films qui dialoguent un peu entre eux, par ailleurs.)

     Si l’ouverture de Get out rejouait grossièrement Carpenter, Peele soigne davantage celle de Us, singulière première séquence, délicieusement inquiétante. Une jeune fille trahit la vigilance de ses parents inattentifs et se perd dans une fête foraine de Santa Cruz, déambule sur la plage et entre dans une pièce de miroirs où elle fera la rencontre de son double, affublé d’un sourire maléfique. La somme d’inspirations que cette séquence semble receler – Et qui sera de mise durant tout le film – ne contamine jamais son impact. Qu’on ère aux côtés de cette jeune fille sur la plage ou dans cette lugubre pièce aux miroirs, Peele crée un vertige, la tension est palpable, bien plus que dans le simili-Halloween de l’ouverture ratée de son précédent film.

     Ensuite, le film retombe un peu, demande à suivre une autre famille au moment de leur départ en vacances. On reprend la voiture, mais on ne heurte pas de cerf, cette fois-ci. On ne rencontre pas de flics douteux non plus. On est trente ans après cette ouverture glaçante, c’est elle, la jeune fille désormais maman, qui emmène ses enfants à Santa Cruz. Le film prend son temps, rejoint la plage, de jour cette fois, la famille rejoint une autre famille, des gens sympas mais un peu plus aisés qu’eux : La satire sociale se met progressivement en place. Puis vient la nuit. Le film s’envole littéralement lorsque cette famille afro-américaine bourgeoise doit affronter ses doppelganger maléfique, animés d’une colère de refoulé, habités d’un râle guttural en guise de voix, extirpés d’un monde souterrain. C’est comme si les sosies de Dale Cooper prenait source dans un univers inversé. Comme si Twin Peaks, the return croisait la route de Stranger things.

     Un peu partout, le film convoque le spectre de nombreux films, on pense à Shining, à Funny games, à Scream. Les codes du home invasion et du slasher sont parfaitement intégrés, digérés, mélangés. La comédie s’invite dans l’horreur et vice-versa avec un brio assez déconcertant – La séquence pivot chez les amis, sous Good vibrations des Beach boys ou Fuck tha police de NWA, est un moment inattendu, de pure jubilation et de terreur, unique et dingue. Il faut voir la maestria de la réalisation à l’intérieur de cette villa et aux alentours de cette villa – les différentes poursuites, sur la route, sur le lac – et surtout aimer se perdre dans ce déluge de doubles qui s’affrontent. Us a aussi le mérite d’être un beau film pour ses acteurs puisqu’ils incarnent tous un double rôle. C’est une (longue) séquence à l’image du film, qui fait beaucoup rire, mais qui effraie tout autant.

     Puis vient le temps de la vengeance quand la famille parvient à affronter et tuer ses doubles. Peele utilise des ressorts burlesques insensés – Le zodiaque, magnifique – tout en laissant infuser un certain malaise. Cette victoire du bourgeois cruelle et sauvage, façon La dernière maison sur la gauche, aurait fait une fin parfaite, amère, troublante. Mais Peele a plus d’une corde à son arc – et une de trop cette fois – et ne va pas s’en contenter. Tant mieux, tant pis. Tant mieux car d’une part ce virage est une promesse pour les films à suivre : Difficile de savoir jusqu’où Peele nous emmènera ; d’autre part car s’il y a une astuce de scénario qu’on n’avait pas envisagée c’est bien celle-là et c’est assez grisant en un sens, de savoir qu’un film puisse tenter et bifurquer autant, qu’importe qu’il réussisse ou non. Tant pis car il se vautre dans un déluge explicatif sans intérêt sur sa toute fin en sortant une allégorie sur l’absurdité de la croyance en l’égalité des chances – effaçant tout ce qu’il préservait de mystères – et surtout, semble prendre le pouvoir sur l’humilité du genre, souhaite viser plus haut là où la série B féroce suffisait tant – Roméro ne s’en privait pas, lui : Day of the dead, c’était puissant à tous niveaux, par exemple.

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