Il boss pentito.
6.0 Bellocchio raconte l’histoire de Tommaso Buscetta, éminent caïd repenti de la Cosa Nostra qui entreprit en 1986 de balancer tout le monde lors d’un maxi-procès tenu à Palerme. Il dira qu’il ne bafouait pas son code d’honneur imposé par l’omerta puisqu’il s’attaque à ceux qui selon lui, ne l’ont déjà pas respecté. Le récit couvre deux décennies de sa vie, son exil au Brésil (au cours duquel deux de ses fils restés en Italie sont assassinés par le clan Corleonesi), son arrestation pour trafic de drogue et un emprisonnement de huit ans, ses entretiens avec le juge Falcone et bien entendu le procès (l’entonnoir du film) qui aboutira aux centaines de condamnations de parrains siciliens.
Le début du film n’est pas très inspiré : Présentation caricaturale des visages, des familles ; Décompte de cadavres (de personnages présentés en intro) via un petit chronomètre absolument sans intérêt ; narration anarchique ; apparitions animalières franchement grossières. Bellocchio ne retrouve jamais de sa superbe déployée dans Vincere, car on n’est malheureusement pas loin du téléfilm de luxe ici, tant l’action est sèche et réduite à une succession de faits, brefs et précis, jamais ornementés. Et tant la photo est souvent terne, dévitalisée : On sent que Bellocchio n’a qu’une obsession, ne jamais glamouriser cette grande famille de la mafia, ces hommes qui la font, ni même leur procès.
Mais lors du point d’orgue de la longue scène du tribunal transformé en véritable arène, on retrouve un certain vertige, farcesque et opératique. Et Favino, l’acteur principal, est exceptionnel. Puis aussitôt le film reprend les rails factuels, ne déborde plus et s’en va très dignement en n’oubliant pas de rappeler que son héros est une belle pourriture, comme les autres. Il en résulte un film très froid, concis, carré. Le traitre, c’est l’anti Parrain de Coppola, en somme. C’est bien car ça impressionne, c’est tout à son honneur, mais ce refus de glamour dans le récit, d’idées de mise en scène, crée une forte distance et peu d’émotion. Le temps est parfois long, c’est le revers de la médaille.
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