Liaison(s) dangereuse(s).
5.0 « Brillant procureur, marié et père de famille, Rusty Sabich est soupçonné du meurtre de l’une de ses collaboratrices, autrefois sa maîtresse »
C’est étrange comme Présumé innocent annonce les années 90, tant il est l’un des premiers films d’une série de thrillers (judiciaires ou non) efficaces mais relativement impersonnels. C’est donc un tout petit Pakula. Qui se cache derrière son malin scénario saupoudré d’un inattendu twist. La partie procédurière est formellement terne, le film ne tient que sur son bavardage. Alors évidemment celui qui réalisa jadis Les hommes du président fait le job, Harrison Ford est magnétique avec trois expressions de visage et les seconds rôles sont bien choisis (Raul Julia & Brian Dennehy, notamment). Jusqu’à, disons, la première résolution, le film coche les cases du cahier des charges et s’en tire bien. Amené autrement, le final pourrait être étourdissant mais ce monologue est un monologue de papier, la confession ne fonctionne pas très bien à l’écran.
Le film, un moment donné, a l’idée (quasi saugrenue, au regard de sa résolution, mais c’est aussi pour agrémenter les nombreuses fausses pistes) d’intégrer des flashbacks afin de se pencher sur la liaison entre Rusty et Carolyn (Greta Scacchi, magnifique). Jusqu’alors un peu terne, le film reprend des couleurs lorsque celle-ci apparait tant on découvre une menace féminine sur ce monde d’hommes, avec son ambition et son indépendance. Ce n’est pas qu’un plaisir des yeux, puisque ça rend tout le monde suspect mais c’est surtout que la mécanique huilée s’enraye. Mollement quand même – ça ne débouche nulle part – mais elle s’enraye.
Le film échoue surtout dans sa multiplicité. Il vise tellement à mettre en relief la perdition de son héros, souvent mutique qui plus est – ce qui nous amène à douter jusqu’au bout de son innocence – que les autres personnages, sa femme comprise, n’existent pas suffisamment. Les femmes sont par ailleurs assez peu étoffées dans l’ensemble, réduites à des caricatures, comme si on les percevait du seul point de vue perdu de Rusty, l’avocat incriminé. Mais c’est bien avec la partie adverse que Pakula s’avère le moins subtil, soit les deux avocats de l’accusation, qui seront les plus débiles et caricaturaux possible. Là-dessus, Présumé innocent manque vraiment de finesse.