Voyez comme on danse.
6.0 Renoir aussi avait fait son film de science-fiction. Si le film sort en 1927, le récit lui se déroule en 2028, tandis que « la prochaine guerre » (comme le mentionne un carton) semble avoir décimé une grande partie de l’humanité. Un explorateur noir quitte l’Afrique à bord d’un aéronef et s’échoue en terre inconnue (mais on reconnait nos contrées sur la carte et une Tour Eiffel en ruine) où il fera la rencontre d’une sauvagesse blanche qui va lui enseigner le charleston. L’idée c’est évidemment de détourner les clichés et peut-être de s’ériger contre des films très douteux type Naissance d’une nation ou The Navigator : Faire du Noir un explorateur en costumes, raffiné et cultivé et de la Blanche une autochtone déshabillée vivant dans une colonne Morris avec un singe, dans un Paris revenu à l’état sauvage. Après avoir déjà joué pour Renoir dans Nana, Catherine Hessling va se donner pour l’explorateur jusqu’à l’engourdissement. Quant à Johnny Hudgins (alors célèbre danseur de claquettes) il sera séduit par la découverte de « La danse de nos ancêtres » (dira t-il) et proposera à la jeune femme de l’accompagner dans son prochain voyage. Le film se termine par ces mots : « C’est ainsi que partit vers l’Afrique une mode nouvelle : La culture des blancs aborigènes ». Si le ton est volontiers burlesque, il faut noter de très beaux décors post apocalyptique, une érotisation savoureuse de l’actrice et une ambiance assez hypnotique – quand bien même il faille imaginer un accompagnement jazz, puisque le film est entièrement muet – dans l’observation de ces corps se trémoussant au rythme d’une drôle de rencontre, qui aurait comme traverser par uchronie savoureuse le temps et les cultures.