Violentes solitudes.
8.0 Melville reprend les codes du Doulos, mais remplace l’aspect ramassé de ce dernier par une densité avec laquelle il semble entièrement à son aise. Le polar, en tant que genre, est transcendé au point qu’il semble acquérir, au fil des minutes, une pureté sans précédent. Par son esthétique, son ambiance (Une utilisation musicale discrète, notamment), sa durée et son écriture : Moins de tiroirs, davantage d’épure. Pas de gras, un équilibre idéal tandis que le film avoisine les 2h30.
Qu’il se déploie dans les extérieurs marseillais, en ville ou dans ses routes de campagne, ou bien dans les intérieurs de ces appartements, le film est très méticuleux. De nombreuses scènes resteront sans dialogue, à l’image de cette ouverture, évasion d’une prison parisienne, course à travers la forêt puis le train ; ou plus tard lors du hold-up d’un fourgon transportant une demi-tonne de platine sur la route des Crêtes.
Impressionnante séquence – un sommet du genre, clairement – qui prépare, entre autre, tout le cinéma de Michael Mann (qui saura se souvenir de Melville, c’est évident) et évoque très largement Le salaire de la peur, de Clouzot voire Cent mille dollars au soleil, de Verneuil (déjà avec Lino Ventura) notamment dans sa façon de s’accaparer l’immensité de ce paysage, désert, rocheux et ces routes en bord de falaise.
Meurisse & Ventura forment un superbe duo de flic et voyou qui évoque celui formé par Pacino & De Niro dans Heat, trente années plus tard. Il suffit de voir comment Melville les présente, chacun dans une introduction légendaire, pour se convaincre qu’il aime infiniment les personnages qu’il a écrits, pensé. Leur affrontement à distance sera le cœur du film. Et inévitablement, le final en sera déchirant.