Archives pour juin 2020

Le dernier des Mohicans (The last of the Mohicans) – Michael Mann – 1992

38. Le dernier des Mohicans - The last of the Mohicans - Michael Mann - 1992Madeleine, définition.

   10.0   30/04/17.

C’est toujours un exercice périlleux de revoir un film qu’on a tant aimé jadis, sans l’avoir revu depuis longtemps. Les déceptions sont légion, forcément, à quelques agréables exceptions près. Le dernier des mohicans constitue personnellement le sommet de cet exercice puisqu’il fut mon film préféré quelques années durant. Je pouvais le regarder en boucle. Je me souviens, j’étais en CM2, un ami – qui pourra se reconnaître s’il lit ces lignes et/ou s’il se souvient de ma fascination pour ce film – m’avait offert le bouquin de James Fenimore Cooper, la version abrégée chez Fabbri. Que j’avais dévoré. Puis j’avais lu l’édition Flammarion, nettement plus conséquente. Bref, j’étais fasciné par Œil-de-faucon, admiratif de Chingachgook, terrifié par Magua, amoureux des filles Monro. J’imagine qu’il représente pour moi ce que Danse avec les loups représente pour d’autres.

     L’autre problème qui se pose c’est Michael Mann. Comment revoir, aujourd’hui, un film de Michael Mann qui ne fait pas très Michael Mann, après cette grandiose filmographie qui a suivi ? Car si Le dernier des mohicans aborde des thématiques tout à fait Manniennes, emprunte des chemins qu’on a pris l’habitude de croiser chez lui, le film en lui-même n’est pas un projet très personnel, c’est une adaptation, c’est une commande, c’est du classique, c’est polissé pour les récompenses (Qu’il récoltera peu, d’ailleurs).

     Bref, sans faire durer le suspense plus longtemps, j’ai adoré revoir cet ancien film de chevet. Je suis surpris d’avoir autant aimé le revoir, en fait. Je trouve que le film vieillit merveilleusement bien, qu’il passe en un claquement de doigts, qu’il est un pur film hollywoodien épique, opératique, nourri aux grandes acmés et aux musiques orchestrales de Trevor Jones. Ça pourrait être trop, comme ça pourrait l’être dans ses projets plus diaphanes que sont Miami Vice ou Hacker, pourtant les envolées lyriques emportent le tout, notamment car Mann était déjà un grand romantique et s’il est sans doute passionné par cette guerre de Sept ans, qui voit les affrontements entre Anglais et français (alliés aux amérindiens) il crée surtout une étrange dynamique des cœurs, trio amoureux archi classique mais sublime ici (Nathaniel, Cora, Duncan) et un duo, plus secret et silencieux (Alice et Uncas) qui explose dans un final absolument déchirant.

     J’en gardais le souvenir de superbes séquences (relativement étirées) qui débouchaient sur d’autres superbes séquences, de bout en bout. J’ai pas mal retrouvé ça : La chasse au wapiti, la ferme des Cameron, l’embuscade Magua dans la forêt, la ferme brulée, la bataille nocturne au Ford William Henry, la reddition des anglais, l’embuscade de la clairière, les canoës, la grotte, le village huron, le final sur les falaises. Tout fonctionne et se relaie comme dans un magistral film d’aventures, dans lequel Mann, déjà, y libère autant des pics de violence bien crus qu’il y trouve des moments de suspensions magnifiques. Et puis hormis Duncan (archétype du loser lâche et sacrifié) tous les personnages sont passionnants, les filles Monro comme la famille mohicans, et les présences parfois brèves assez mémorables : Le grand Sachem ou le général Montcalm (Très surpris de constater qu’il est joué par Patrice Chéreau). Et puis comme souvent chez Mann, il y a des regards qu’on n’oubliera jamais, celui d’Alice Monro sur le point de se donner la mort ici, ceux de Cora & Nathanael se croisant le soir de la bataille du fort.

30/06/2020.

Si ma rétrospective consacrée au cinéma de Michael Mann me permet de redécouvrir certains de ses films auquel j’étais peu familier, elle me renvoie aussi à ceux qui font depuis longtemps parti de mon panthéon personnel. Le dernier des Mohicans est l’un de ceux-là, évidemment.

     Le revoir via cette nouvelle édition ESC m’a aussi permis de mieux comprendre d’où il venait : En effet, le film annonce d’emblée qu’il s’inspire du roman de John Fenimore Cooper, ainsi que du scénario de Philip Dunne, écrit pour la version de George B. Seitz, dont Mann en fera in fine une sorte de remake sublimé. Car s’il est fidèle à l’esprit du premier, il reprend essentiellement le déroulement du second. A l’image des histoires d’amour parallèles qui n’existent pas dans le livre, mais aussi de scènes entièrement reprises, jusqu’aux dialogues parfois identiques.

     Le revoir m’aura aussi permis de cerner que sous ses dehors de film disons plus académique, il est charnière dans la filmo de Mann, aussi bien d’un point de vue financier (C’est à ce jour son plus gros succès commercial et ça lui ouvre donc le droit de mettre en chantier son chef d’oeuvre) qu’intime : Il ne cesse de renvoyer aux obsessions de son auteur, son goût pour le muet (les dix dernières minutes sur la crête, par exemple), son attirance pour le classicisme des films qui ont bercé son enfance (ici un film oublié de 1936) et origines probables de son envie d’être cinéaste ; mais aussi son désir de se plonger dans ces récits fondateurs, de héros sacrifiés, d’origines du monde, de nature ancestrale brisée par le colonialisme. Et ainsi de raconter l’histoire d’Œil de faucon, ce personnage magnifique, qui appartient à chaque monde, sauvage et civilisé, puisqu’il est un frontalier d’origine européenne élevé par une famille mohawk. Personnage typique des récits de Mann, sorte de héros solitaire, le meilleur dans son domaine, comme pouvaient l’être avant lui le voleur Frank ou le profiler Will, puis le seront bientôt Vincent Hanna, Neil McCauley ou Mohamed Ali.

     La première surprise, quand on sait Mann adepte des paysages urbains, qu’il a pu déployer notamment dans Thief, Manhunter ou dans son ébauche de Heat, à savoir le dispensable L.A.Takedown, c’est de le voir se plonger dans le film historique, en costumes. L’autre surprise, elle est formelle : Le dernier des mohicans est un pur film d’aventures qui se déploie sous une dimension éminemment épique, lyrique et opératique qu’on retrouve aussi dans la bande originale signée Trevor Jones & Randy Edelman, quasi omniprésente. Pas sûr qu’il y ait de film hollywoodien aussi total et majestueux, durant les années 90. Autre que le Titanic, de Cameron, je ne vois pas, en tout cas.

     Si George Sand disait du roman de John Fenimore Cooper qu’il était habité d’une « sublime barbarie », d’un « héroïsme effrayant » et de « vertus homériques » ça vaut aussi pour le film de Michael Mann, épanoui entre rivières des fuites en canoës, clairières des grandes batailles et duels à flanc de falaise. Entre vaillants sauvetages et exécutions sommaires. Entre Fort assiégé et ferme incendiée. Entre mousquet et tomahawks. Et c’est le propre de cette naissance d’une nation : L’Amérique s’est fondée sur le sang, le combat et la destruction, le massacre de la nature, le génocide des indiens.

     En quelques scènes introductives, le film nous fait découvrir l’Amérique de 1757, à Albany, New York, plus précisément : plongée dans la guerre de la Conquête, avec ses sauvages, ses colons, ses pionniers, ses familles frontalières. Des français alliés aux hurons d’une côté, les britanniques aux mohawks de l’autre. Et on comprend qu’une cohabitation est impossible, mélanges des langues et des cultures à l’appui : « Vous êtes une espèce à part, remplie d’incohérences » dit Œil de Faucon à Cora, citant son père adoptif, le mohicans Chingachgook.

     Le dernier des Mohicans est un grand film nocturne : Le chapitre du fort, quelle audace ! Et rien que sur cet aspect, on y retrouve pleinement la patte de son auteur. Mais c’est aussi un grand film de vengeance (celle de Magua, d’abord puis celle de Chingachgook) et d’amour, appuyé par cette tension érotique qui sourd en permanence, sur un regard, une image suspendue. Annoncé d’emblée dans la ferme des Cameron. Confirmé dans le fort William Henry. Et en cela (l’idée de l’amour et la vengeance, en tant que talon d’Achille magnifique, de ces êtres en apparence invulnérables) il annonce pleinement Heat.

     Le film s’ouvre et se ferme de la même manière, au moyen d’un plan panoramique sur une gigantesque forêt, suivi d’une séquence de chasse. Ce plan semble raconter deux horizons très différents. Le premier nous convie dans la nature, c’est la naissance sauvage du monde. D’ailleurs, il sera suivi d’une chasse au wapiti par trois Mohicans. Le second, à l’autre bout de la pellicule, raconte plutôt l’effondrement de la nature, la naissance de la civilisation, de la violence des Hommes et il sera suivi d’une tout autre chasse. Ce plan de nature infinie n’est donc plus qu’un mirage, que la suite de la filmographie de Mann, qui retrouvera son décor urbain, reprendra systématiquement par l’utilisation des plans océaniques.

Les naufragés de la D17 – Luc Moullet – 2002

06. Les naufragés de la D17 - Luc Moullet - 2002« De l’autre côté des terres noires »

   5.5   Majastres, Alpes de Haute-Provence. « La seule gare de France avec une faute d’orthographe » nous précise le narrateur, qui n’est pas Moullet dans la voix, mais nous ne sommes pas dupes : c’est bien lui dans la plume. On apprend aussi que ce village est traversé par la départementale 17, qui n’est plus goudronnée au-delà. Ça commence donc comme les courts ethnographiques de Moullet, on s’attend à rencontres quelques malejactois, mais non, le cinéaste embraye et se paie le luxe de la fiction. Et Bouchitey & Amalric, entre autre.

     Le récit s’amuse à faire chevaucher plusieurs histoires. Un pilote de rallye automobile en panne ; le tournage d’un film entre les rochers ; une dépanneuse embourbée ; un couple d’astrophysiciens en crise ; des randonneurs pédestres ; un convoi militaire à la poursuite de Saddam Hussein (En effet, l’action se déroule en janvier 1991). Et tout ce petit monde se croise plus ou moins, dans ce que Moullet surnomme « Le coin le plus paumé de France ». Plutôt moins que plus, d’ailleurs.

     « A ce train-là je pourrais même pas voir la guerre du golfe à la télé ce soir » lâche un moment Bouchitey qui campe cet immonde coureur automobile égocentrique et macho qui martyrise sa co-pilote. Il est donc génial. Presque aussi génial que ce drôle de berger qui pue le bouc mais qui couche avec toutes celles qui passent par sa ferme. Presque aussi génial que ce sergent-chef (Bouvet qui réitère son rôle de Taxi2 grosso modo) en plein psychose sur la possibilité de rencontres des troupes irakiennes.

     Il y a de grosses lourdeurs. Mais il y a une volonté fidèle de filmer les lieux, de s’embarquer dans des villages perdus, sentiers isolés, à flanc de falaise parfois. C’est aussi sa limite : Moullet ne prend pas vraiment le temps de les filmer comme, au hasard, le ferait un Guiraudie, auquel on pense beaucoup – et pas à l’avantage de Moullet – en préférant se petites touches comiques et l’aspect gentiment choral et bordélique de son petit délire anecdotique.

Mon nom est personne (Il mio nome è Nessuno) – Tonino Valerii – 1973

47. Mon nom est personne - Il mio nome è Nessuno - Tonino Valerii - 1973Et pour quelques légendes de plus.

   6.0   Si le thème principal de la bande-son signée Ennio Morricone est archi-connu et toujours très efficace, il me semble que le compositeur italien recycle beaucoup avec ce film – Un peu à l’image de ce que fait Valerii de Léone, en un sens – ne serait-ce que dans le choix de ces deux morceaux calqués sur La chevauchée des Walkyries & My way. Si les scènes d’action sont plutôt chouettes, l’aspect cartoon surprend puis lasse, tant son utilisation est systématique dès l’instant qu’un climax se pointe. Il y a cette scène des miroirs notamment, dans l’attraction hantée, qui marque un affrontement entre Personne et quelques autres, qui évoque aussi bien La dame de Shanghai, de Welles que Canon, de Norman McLaren, mais c’est assez raté, malheureusement.

     Qu’importe, je ne l’avais jamais vu. J’ai suivi aveuglément le livre des Boukhrief (Les cent films à montrer aux plus petits) pour le découvrir avec mon fiston et ce fut en effet un excellent moment. Ceci étant et je sais que Léone n’est pas très loin là-dedans, c’est dingue ce que ça fait sous-Léone. Mais c’est sans doute ce qui m’a le plus parlé, du coup : Cette histoire d’homme sans nom, qui dit s’appeler Personne, fan d’une légende de l’ouest qu’est celui incarné par Fonda, c’est assez clairement la position de Valerii (qui fut son assistant sur la trilogie des dollars) face à Léone. Bref c’est un joli film théorique doublé d’un très chouette divertissement familial bien accompagné par les sourires de Terrence Hill et d’un duel final surprenant. Plutôt conquis, donc.

Le sucre – Jacques Rouffio – 1978

Jean Carmet, Gérard DepardieuL’argent.

   5.0   Je n’aime pas beaucoup ça, la faute à son obsession pour l’hystérie et une impression que le film est branché sur cent mille volts pour pas grand chose, à l’image de son interprétation en surrégime, de ses retournements de situation en pagaille. C’est un film qui ne se pose jamais. Mais c’est aussi ce qui fait sa singularité, sa bizarrerie, ce qui permet de tenir, de ne pas flancher. Si Hanin et Piccoli sont catastrophiques, d’exagération mal canalisée, le couple vedette formé par Carmet & Depardieu est en revanche épatant, parfaitement fondu dans cette anomalie. C’est un film souvent ingrat dans ses enchaînements, raccord à l’impression laissée par le seul film de Rouffio que j’avais vu jusqu’à présent : Sept morts sur ordonnance. Si je suis peu convaincu je pense que c’est un film à voir, une curiosité.

Love is a racket – William A. Wellman – 1932

30. Love is a racket - William A. Wellman - 1932Coup de feu sur Broadway.

   5.0   En pleine Dépression et dans un univers nocturne riche en potins où se côtoient starlettes et producteurs, bootleggers et racketteurs, Jimmy (Douglas Fairbanks Jr., parfait) journaliste de Broadway, recherche celui qui alimentera le mieux sa brève de demain. Il tombera sous le charme d’une jeune comédienne coincée dans une affaire délicate avec la mafia sur le point de l’évincer.

     Je vais approfondir Wellman dans les jours, semaines à venir. Jusqu’ici je n’avais vu que le superbe Convoi de femmes. Ici, il trouve souvent le rythme et le ton justes, insérant quelques notes d’humour visant à rendre ce film noir aussi charmant qu’une comédie romantique, mais Love is a racket est sans doute un peu prisonnier de son petit théâtre de saynètes déployées dans trois/quatre lieux pour vraiment se démarquer du tout-venant. Un film relativement anecdotique, reste un certain brio, dans sa construction, sa narration.

Celle que vous croyez – Safy Nebbou – 2019

33. Celle que vous croyez - Safy Nebbou - 2019Liaisons dangereuses sur Internet.

   5.0   Claire (Juliette Binoche) est une femme divorcée de cinquante ans. Un jour, elle crée son faux profil sur Facebook sous l’apparence d’une jeune femme de vingt-quatre ans, ajoutant un faux prénom, Clara, accompagné de photos de sa nièce. Tout cela pour espionner son ex-amant Ludo (Guillaume Gouix), mais elle y tombe sur son meilleur ami Alex (François Civil) avec qui elle va bientôt entamer une relation amoureuse virtuelle.

     Il y a du romanesque, mais le labyrinthe n’est ni vraiment fascinant ni émouvant, car on en reste au stade de l’écriture et que cette rom’com vertigineuse et cruelle ne s’incarne pas dans un geste de cinéma original. Sans avoir lu le roman de Camille Laurens, duquel Nebbou en fait l’adaptation, on peut imaginer qu’il séduit avant tout par son pitch. Et Nebbou ne le transcende pas. C’est un peu dur, mais d’un point de vue formel le film m’a semblé vraiment emprunté.

     Bref, j’aime les intentions, (beaucoup) moins le résultat. Le film peine à trouver sa vitesse de croisière, déjà. Et si la seconde partie m’intéresse malgré tout, me surprend dans sa narration, il me manque ce que je viens y chercher : De l’émotion. J’imagine que si ça fonctionne c’est très intense comme film, moi j’y suis resté en retrait tout du long. Et quand c’est comme ça j’observe la mise en scène : Et tout est un peu à l’image des scènes de dialogues sur Facebook, je ne trouve pas ça très inspiré.

L.A. Takedown – Michael Mann – 1989

25. L.A. Takedown - Michael Mann - 1989Working paper.

   5.5   Il est important de préciser que Michael Mann a commencé à écrire le scénario de Heat, depuis l’époque de The Jericho mile. Puis qu’il n’a cessé d’y retoucher durant les années 80, sans toutefois trouver les fonds pour le mettre en image. Miami Vice (la série) aidant, il a une première opportunité de coucher sur écran cette obsession, le projet de sa vie.

     En somme, difficile de ne pas comparer L.A. Takedown à Heat, puisqu’il en est l’esquisse. De fond, de forme, de climat, de sidération, de mélancolie. De tout, puisque chaque scène (ou presque) est un décalque en moins bien, en brouillon. Tout Heat est là, moins l’équilibre et la perfection de Heat. Donc au jeu de la comparaison, L.A. Takedown est grand perdant.

     Logique, néanmoins, tant leur conception diffère : L.A. Takedown est d’abord pensé comme pilote d’une série, avant d’être transformé en téléfilm suite à un désaccord avec la chaine. Il est le fruit d’un tournage de dix-neuf jours (cinq fois moins que celui de Heat) et sans faire injure aux tournages courts, ça se voit. Surtout il est clairement cisaillé de part en part, afin de correspondre aux canons télévisuels qui lui impose les quatre-vingt-dix minutes : les scènes ne s’étirent pas suffisamment, quand bien même on en retrouve certaines quasi à l’identique, à l’image du braquage du fourgon, du climax de la grande fusillade ou du fameux face-à-face. Toutes mises en scène avec nettement moins de brio, incarnées avec moins de talent.

     Malgré tout, même si on connait Heat par cœur, il y a des surprises. Des coupes et différences notables, notamment la belle fille d’Hanna (Ici il n’y a pas d’enfant) ou sur l’aparté intime du chauffeur remplaçant (qui sera là réduit à un rôle de figuration). Des modifications mineures qui marquent : L’âge des deux protagonistes centraux, puisqu’ils sont beaucoup plus jeunes dans L.A. Takedown, la trentaine, grosso modo ; Et ce n’était pas Neil McCauley, mais Patrick McLaren. Waingro ne disait pas « L’artiste » mais « Champion ». Quant à Xander Berkeley, il fait le lien entre les deux films, puisqu’il incarne l’infâme Waingro quand dans Heat il jouera le rôle plus passif de Ralph, l’amant de la femme d’Hanna. Mais surtout, il y a un final complètement différent, qui à lui seul mérite que le film soit vu, montrant que le récit n’était pas tout à fait pensé, encore, comme la tragédie grecque déployée dans Heat. Indice : Ce n’est pas Hanna qui tue McCauley, enfin McLaren.

     Quoiqu’il en soit, c’est un film tout à fait regardable. Et donc un téléfilm tout à fait honorable. Notamment du seul point de vue scénaristique, car bien qu’amputée par rapport à celle magistrale de Heat, l’écriture s’avère riche, efficace, cohérente. Et Mann déploie quelques idées graphiques très fortes, notamment via de singuliers décors, des moments de suspensions ou des courtes focales réjouissantes. Je ne suis pas sûr qu’on voie ça dans d’autres téléfilms de cet acabit, disons.

     Certes, L.A. Takedown fait pâle figure après l’immense Manhunter, mais il faut le voir en tant que simple curiosité pour fan de Michael Mann, curieux de voir la maquette d’un chef d’œuvre. En cela, c’est tout à fait passionnant.

Toujours moins – Luc Moullet – 2010

32. Toujours moins - Luc Moullet - 2010Les temps post-modernes.

   4.5   Un Moullet en écho à l’un de ses autres films intitulé Toujours plus au sein duquel il égratignait les grandes surfaces. Ici il s’attaque aux machines, les bornes, les codes. S’il n’a certes rien perdu de son ironie, Moullet reste en surface, il manque les étranges travellings et comparaisons de slogans, logos, couleurs qui faisaient la drôlerie du film original suscité. Il avait plus tard regretté de n’avoir pu filmé les nouvelles caisses automatiques qui furent popularisées aux Etats-Unis dans les années 90. Voilà, il a rectifié le tir, afin de l’agrémenter du plaisir du toujours moins d’effort, de déplacement, d’êtres humains par secteur d’activité. S’il refaisait cela en 2020, Moullet pourrait clore sa trilogie par le titre « Toujours connecté » : on ne verrait qu’un écran, un clavier, une souris et des tas d’onglets ouverts, en E-commerce ou alimentaire. Passionnant sur le papier, Toujours moins reste malgré tout un film parfaitement dispensable.

Dernier amour – Benoît Jacquot – 2019

41. Dernier amour - Benoît Jacquot - 2019L’homme seul.

   3.0   Jacquot c’est de pire en pire. Ou presque tant les deux précédents étaient déjà très mauvais. Je n’en reviens encore pas que le réalisateur de La fille seule, L’intouchable ou A tout de suite, puisse faire des trucs aussi abominable franchement. Et sur tous les plans ici : C’est moche (une image grise, insupportable), désincarné (tout y est terriblement mort), mal narré : Le film s’ouvre sur Casanova vieux qui s’en va raconter une partie de sa vie – quand il tombe amoureux d’une courtisane qui lui résiste, ce qui aboutira à sa tentative de suicide – qu’on verra dans un flashback entier. Quelle originalité ! Bref c’est un film crépusculaire sur une lumière, un désir d’antan qui se cache, jaillit puis disparait. Mais que Jacquot ne parvient jamais à faire jaillir. Et puis faut être solide pour accepter Lindon en Casanova sous perruque. 

Les estivants – Valeria Bruni Tedeschi – 2019

40. Les estivants - Valeria Bruni Tedeschi - 2019Méta-stase.

   2.0   Si l’on pense beaucoup à l’horrible Fête de famille, de Cédric Kahn, le nouveau film de Valeria Bruni Tedeshi – Pourquoi je regarde ça, franchement ? – est plutôt un croisement bâtard, plus théorique, mais tout aussi clos et solaire, respectivement parlant, entre Vous n’avez encore rien vu, d’Alain Resnais et La grande Bellezza, de Paolo Sorrentino. Je grossis, évidemment, mais citer ces trois étrons me permet simplement de faire partager l’angoisse que j’ai traversée devant le visionnage de ce machin insupportable. Tout est usant là-dedans, du jeu des acteurs au petit décalage cynico-depressif mais le plus désagréable c’est son obsession pour la mise en abyme. Les estivants ce n’est que ça : Un film dans le film en train de se faire ou la vie de Tedeshi dans un personnage de réalisatrice qui joue son propre rôle d’actrice.  A tel point que tout va dans le triple sens jusqu’à citer sans vergogne le Buñuel du Journal d’une femme de chambre ou La règle du jeu, de Jean Renoir. Mais c’est bien simple : Prenez la tronche de six pieds de longs arboré tout du long (et notamment ici sur la photo) par Riccardo Scarmaccio et bien c’est exactement la gueule que je devais tirer devant ce truc durant deux heures. La mise en abyme est totale.

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