Cul-de-sac.
7.0 Signoret & Gabin incarnent un couple de retraités, sans enfants, au crépuscule de leur vie conjugale. C’est le Saraband, de Granier-Deferre. Un huis-clos étouffant, se déroulant quasi entièrement à l’intérieur d’un petit pavillon de banlieue parisienne. Inutile d’avoir lu (ce) Simenon pour détecter son ombre au sein de ce récit torturé d’un amour qui s’est évaporé. Le film se déroule selon quatre zones de temporalité qu’on serait tenté d’intituler : « Avec le chat » et « Sans le chat », « Le désir » et « La mort ».
Sans surprise, le film s’ouvre et se ferme sur la mort : Une sirène d’ambulance sillonnant les rues de Courbevoie, vient s’arrêter devant cette maison, coincée dans un cul-de-sac. Jadis, cette petite bâtisse ornait le fond d’une rue pavillonnaire. Dans un raccord fulgurant, Deferre remplace la vue de la fenêtre de la chambre d’une époque par la même d’une autre époque, afin de comprendre que les grands ensembles (tout l’entourage est en chantier) prennent possession des lieux. Que les ruines sont dedans autant que dehors.
Dans Le chat, si ce dernier revêt une importance fondamentale, les images et sons du chantier ne sont pas en reste : On y voit et on y entend des grues, des machines, des marteaux-piqueurs, en permanence. C’est un beau film désespéré où les brèves images de bonheur sont floues comme pour raconter qu’elles sont beaucoup trop enfouies. Pourtant elles sont là, elles proviennent d’un moment de suspension, à lui comme à elle, sur des mains ou des gestes, qui enclenchent un souvenir.
Et le chat sera le parfait vecteur du malaise puisqu’en plus de prendre sa place à elle au simple niveau de l’attention (On comprend qu’il ne l’aime plus, point, sans doute en priorité pour une question d’alcoolisme et aussi parce qu’il aime se réfugier dans les bras d’une tenancière d’hôtel de passe) en plus d’être son reflet rajeuni : Elle était trapéziste de crique dans le temps, avant qu’un grave accident lors d’un spectacle, ne la fasse boiter pour la vie.
Un évènement qui semble le déclencheur de tout : D’une perte de désir jusqu’à l’impossibilité même de faire des enfants. Il ne reste alors plus que ce chat. Et puis bientôt plus rien. C’est un film superbe, mais terrible. Mais pas terrible de façon malsaine : C’est pas Amour, de Haneke. Deferre trouve toujours un raccord, une idée pour leur donner à tous deux beaucoup de lumière et ne jamais les écraser sous l’austérité formelle. Signoret & Gabin y sont au sommet de leur art.
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